Doppelgänger

Chapitre 42

L'ambiance est pesante.

On est chacun, Vildred, Laura, Isaac et moi, assis silencieusement au quatre coin de l'immense salon de Vildred.

J'évite le regard des protagonistes, me sentant un peu coupable de la situation. Même, si je sais qu'on a tous notre part de responsabilité dans cette histoire, je suis déçue de moi. Je pensais que j'aurais pu aider Isaac et Vildred, et finalement, c'est encore pire qu'avant, maintenant que Stan sait que je me suis infiltrée chez eux. J'ai failli à ma mission, j'ai contrecarré les attentes que j'ai envers moi-même, et sûrement déçu celle de mes interlocuteurs. Moi qui voulais qu'Isaac me voit autrement que comme une humaine incapable, j'ai largement aggravé ma situation. J'ai presque honte de ma piètre performance, d'autant plus que je n'ai pas réussi à soustraire à Straze des informations importantes.

Je suis exténuée, et surtout j'ai très froid.

L'ambiance est tendue. Isaac fait vibrer nerveusement sa jambe, les dents serrées, alors que Vildred, à l'autre bout de la pièce, s'amuse à lancer machinalement des shurikens sur une cible, pour meubler le silence déstabilisant.

— Tu peux arrêter? Commence à s'agacer désagréablement le loup-garou après un ultime lancé au bruit tranchant et métallique..

Vildred pose ses shurikens sur le comptoir de son bar et fait bouillir de l'eau pour une infusion. Il remplit deux tasse m'en tend une tasse et garde l'autre pour lui.

— Merci, je déclare en lui accordant un regard reconnaissant.

Je commence à me réchauffer les mains au contact de la porcelaine brûlante, et laisse mon regard vagabonder à travers la fumée.

Vildred s'assoit sur un fauteuil et avale une gorgée.

— Quel con ce Straze. Il n'a même pas compris que la fille qui était devant lui n'était pas Bella, lance-t-il.

— Donc, y a que ça qui t'intéresse, ta petite gueguerre avec Straze? Fulmine Isaac, exprimant sur le ton cinglant de sa voix, tout l'agacement qu'il ressent depuis ce soir, et qu'il avait jusque-là tenté de garder pour lui.

Le ton monte.

Je me crispe.

Vildred s'apprête à répliquer quand Laura s'interpose.

— Les gars, calmez-vous! Vous dirigez votre colère sur les mauvaises personnes.

Je sais qu'elle parle à ce moment que d'Isaac, comme Vildred est resté comme à son habitude d'un calme et d'une froideur exemplaire. Mais, j'imagine qu'en tant que grande médiatrice qu'elle est, elle n'ose pas faire uniquement référence à lui.

— De toute façon je ne sais pas ce qu'on fait tous encore là. Il n'y a rien de plus à ajouter. On n'a plus rien a espérer après cette désastreuse soirée, rétorque froidement le loup-garou.

— Je suis sure qu'après une bonne nuit de sommeil...tente de médiatiser la vampire, qui est immédiatement coupé par son interlocuteur.

— De quoi? Qu'on aura une illumination, comme par magie et qu'on saura comment récupérer Bella? Il n'y a rien à retirer de cette soirée à part une lourde leçon. Entre l'un qui n'est pas capable de lancer correctement un sort, l'autre qui ne suit pas la seule instruction qu'il avait, et la dernière qui se fait démasquer, il n'y a rien qu'on aurait pu espérer de pire.

Isaac se lève alors frustré et énervé, et enfile son éternel blouson en cuir, en évitant délibérément nos regard.

— Je n'ai rien à ajouter. Et, comme cette soirée est véritablement catastrophique, j'aimerai éviter de perdre encore plus de temps de sommeil, si vous le voulez bien. Au cas où vous ne l'avez remarqué, j'ai beaucoup d'autres choses à m'occuper et à penser qu'une bande de vampires et d'une traître. Bonne soirée soirée à tous, si elle puisse l'être, poursuit Isaac glacialement sur un ton cinglant.