La Légende du Soleil et de la Lune

3.

Le lendemain, je me réveille avec un mal de tête atroce. Voir le passé de Samael était très dur. À plusieurs reprises j'ai tenté de me réveiller, mais je n'ai pas réussis. C'est cela, d'avoir une malédiction. J'ai le don de guérir, certes. Mais j'ai également le "don" de voir le passé et le futur, ce don n'est rien de plus qu'une malédiction.

Je comprends désormais ce que voulait dire le jeune soldat.

"Je suis partis au palais. Je t'ai préparé le petit-déjeuner. À ce soir."

Je repose la note de mon père et prends mon petit-déjeuner sans grande envie. Je prie qu'il n'y ait rien de grave qui se passera aujourd'hui. Ma force me quitte un peu plus chaque jour, et j'ai peur de ne pas tenir longtemps. Parce que des Samael, il y en a chaque jour. Pas seulement hier.

Je me lève enfin, en soupirant, porte mes chaussures et ma veste puis sors de chez moi avant de fermer la porte à clé. Sur le chemin de l'hôpital, je remarque que les fleurs recommencent à pousser. Le printemps a débuté. La saison des amours.

Après quelques minutes, j'arrive enfin à l'hôpital et je suis accueillis par Eliza.

- Aeryn, te voilà enfin !

- Eli ? Tout va bien ? Il n'y a rien de grave qui s'est passé ?

- Tout va bien, il faut juste que l'on soit prête pour accueillir le prince. Me répond-elle.

Je fronce les sourcils. Le prince ? Personne ne m'a informé.

- Lequel ? Lui demandé-je. Et pour quelles raisons ?

- Pour quelles raisons, je ne sais pas. C'est le plus jeune, le prince Adriel. M'informe-t-elle. J'ai envie de dire, Dieu merci.

J'acquiesce. Dieu merci. Nous avons deux princes, deux contraires. Et noud avons eu un avertissement depuis leur naissance. L'héritier est né lors d'une éclipse solaire, condamnant le monde à la noirceur, présageant ainsi le désastre qu'il allait nous causer. Le prince cadet est né lors d'une éclipse lunaire, même dans la nuit sombre, il est prêt à se sacrifier pour nous laisser une onde de lumière.

Ce n'est que des rumeurs, bien-sûr, mais leur signification n'est pas si fausse que ça.

- Alors, allons-y. Dis-je à mon amie. Notre prince mérite le meilleur des accueils.

Nous montons alors à l'étage. Aujourd'hui, nous n'avons pas reçus beaucoup de blessés. Heureusement.

Je me mets alors au travail, préparant un bureau où nous allons rencontrer le Prince. Il n'y avait rien de bien grand à faire, si ce n'est garder les dossiers de nos patients et le nom des admis proche au cas où son Altesse le voudrait.

Quand j'entends du mouvement chez les infirmières, toutes collées contre la fenêtre, je comprends qu'il est arrivé. Curieuse, je m'approche également de la fenêtre pour le voir. Il a le dos tourné, parlant avec le chef de l'hôpital.

- Les filles, dis-je aux infirmières d'une voix basse, ne parlez pas de mon don au Prince.

- Ne t'inquiète pas, Aeryn. Me répond l'une d'entre elles. Ton secret est bien gardé.

Je lui souris, alors que le prince disparaît de mon champ de vision. Nous nous dispersons, toujours aussi curieuse de voir à quoi ressemble le prince Adriel. C'est rare de voir la famille royale en publique.

- Aeryn, m'interpelle Eliza, vaut mieux que tu restes avec les malades et t'en occuper. La famille royale peut sentir une personne avec des pouvoirs... reste éloignée, pour ta sécurité.

Je hoche la tête, elle a raison. Je ravale ma curiosité, et rapidement je vais de l'autre côté pour rester avec les patients. Même si le prince Adriel est connu pour son bon cœur, je ne peux pas totalement lui faire confiance. Son père est malade, il serait capable de tout faire pour le guérir. Sûrement.

Je viens alors en aide aux infirmières présentes, sans utiliser mon don. C'est difficile de ne pas l'utiliser puisque j'ai l'habitude, et c'est plus efficace. Je dois simplement patienter quelques heures.

- Bienvenue, prince Adriel. Par là, s'il vous plaît.

Le chef de l'hôpital tente de l'amener au bureau, mais je ne l'entends pas bouger.

- J'aimerais faire un tour, visiter l'hôpital. Dit-il enfin. Puis nous discuterons dans le bureau.

Je l'entends se rapprocher de plus en plus, m'a-t-il sentis ? Dans ce cas, je vais devoir partir très rapidement. Mais pour une quelconque raison, je n'arrive pas à bouger. Je dois m'éloigner d'ici, mais mes jambes sont figées. Je soigne mes patients par automatisme, mais je n'arrive pas à m'éloigner.

- Personne ne vous a appris de ne pas tourner le dos à un prince ?

Mon sang se glace en entendant sa voix. Elle n'est pas autoritaire, ni froide, elle correspond parfaitement à sa personnalité. Enfin, la personnalité que les rumeurs lui attribuent.

Je me tourne lentement vers lui. Il n'a pas l'air énervé, il me sourit. Il sourit et me fixe, alors que je baisse la tête.

- Pardonnez-moi, votre Altesse.

Il ne perd pas son sourire. Ses yeux me scannent attentivement, et même s'ils ne me donnent aucune raison de le craindre, je n'arrive pas à contenir les battements de mon cœur. La possibilité qu'il m'amène au palais pour faire de moi l'esclave de sa famille me terrifie.

Ce qui me terrifie encore plus est la possibilité que le roi punisse mon père d'avoir caché ce qui aurait pu être la clé de sa guérison.

- Quel est votre nom ? Me demande-t-il.

- A-Aeryn... votre Altesse.

- Aeryn... Répète-t-il, un léger sourire aux lèvres, original.

J'avale difficilement ma salive alors que son regard est toujours sur moi. Il incline simplement légèrement la tête vers mon chef, puis lui dit :

- Allons dans votre bureau. La raison de ma venue est assez importante.

Mon chef hoche la tête, puis lui montre le chemin avec sa main. J'incline ma tête, et le prince me regarde une dernière fois avant de s'en aller. Une fois que j'entends la porte claquer, et qu'il n'est plus dans mon champ de vision, je tourne la tête vers Eliza qui arrive vers moi en courant.

- Aeryn ? Qu'est-ce qu'il te voulait ?

Encore perturbée, je secoue ma tête avant de lui répondre d'une petite voix :

- Je ne sais pas... il est étrange.

Je passe une main dans mes cheveux pour me reprendre. Il n'a rien dit sur mon don et tout le monde à l'hôpital, et même dans le village, niera le fait que j'aie un don, alors j'ai peut-être une chance.

Un dernier espoir.