72.

947 77 5
                                    

Le lendemain, nous nous retrouvons tous à la salle à manger pour le petit-déjeuner. Le roi aussi est là. Cela reste une situation inconfortable comme d'habitude, cependant, je me sens si bien. Si heureuse.

Et la source de cela est face à moi. Il me jette des coups d'œil quelques fois, mais ne me fixe pas longtemps pour ne pas attirer les suspicions de son père et son frère.

- Tu sembles de bonne humeur aujourd'hui, me dit Adriel en se penchant vers moi.

- Ce n'est pas grâce à toi, lui répondis-je.

- Mmh. Grâce à qui, dis-moi ? Me demande-t-il.

Je roule des yeux puis détourne le regard. Même entendre sa voix est irritant, ennuyant.

- Votre Majesté, dit Kaelan, cela fait déjà plusieurs mois que ma belle-sœur vit avec nous... cependant, n'allons-nous pas l'entraîner à se défendre ?

Je lève le regard vers Kaelan, mon regard s'adoucissant immédiatement. M'entraîner à me défendre ?

- Cela ne sert à rien, répond Adriel, elle a des gardes du corps.

- Cela n'est pas assez. Rétorque Kaelan. Dois-je te rappeller la tragédie d'il y a quatorze ans ?

Je jette un coup d'œil au roi, qui devient totalement blême. De quelle tragédie parle-t-il ? Je fronce les sourcils, attendant que l'un d'entre eux m'éclaircisse.

- Je n'y vois pas d'inconvénient, dit le roi d'une petite voix. Fais ce que tu veux avec elle.

- Dans ce cas, je vais l'entraîner, dit Adriel.

Kaelan rit légèrement avant de poser le regard sur son frère.

- Je ne prendrais pas ce risque, dit-il d'une ton moqueur. Tu as faillis te rendre sourd en utilisant une arme, et tu as faillis te couper un doigt avec une épée. Si tu veux assassiner ta fiancée, tu ne pouvais pas le dire plus clairement.

Je dissimule un petit sourire, face au visage honteux et humilié d'Adriel. Je dois dire que c'est tant mieux qu'il soit aussi incompétent, cela est en ma faveur.

- Je me chargerai de cela, conclut Kaelan. Et j'aimerais commencer aujourd'hui. Cela te va, chère belle-sœur ?

- Oui, votre Altesse. Répondis-je.

Il fait un sourire en coin, et je lui fais un petit sourire. Adriel est furieux, mais je ne fais pas attention à lui. J'aurais aimé déjeuné avec Kaelan, seule à seul. Je pense que cela n'arrivera que rarement...

Le roi finit par se racler la gorge, le visage toujours aussi pâle.

- Je vais me rendre au palais privé, nous dit-il, je serais très occupé jusqu'à demain.

- Puis-je venir avec vous, Père ? Lui demande Adriel. Puisque mon frère et ma fiancée ne seront plus là.

Le roi hoche la tête, et Kaelan leur lance à tous les deux un regard dégoûté. En voyant son expression, je pense que je ne veux pas vraiment savoir ce qu'il se passe dans ce palais privé. Le roi et Adriel s'en vont, me laissant seule avec Kaelan.

- Répugnant, chuchote-t-il.

- Kaelan, est-ce que c'est ce que je pense ? Lui demandé-je, craignant une réponse positive.

- C'est leur harem, dit-il en soupirant. Mais n'y pense pas, ne perturbe pas ton bel esprit.

J'acquiesce. Tel père, tel fils... Ce sont tous les deux des pervers dégoûtants qui ne méritent rien de bon dans la vie. Je suis contente qu'il y en ait un qui ne soit pas comme eux.

- Finis de manger et on y va, me dit-il en changeant de sujet.

- J'ai finis.

Il regarde mon assiette et secoue la tête. Il se lève et s'assoit lentement sur la chaise qui était celle d'Adriel. Je me mords l'intérieur des joues, tandis qu'il prend la fourchette et pioche dans la nourriture avec. Il la coupe en petits morceaux à l'aide d'un couteau et la porte à ma bouche.

- Tu n'as rien mangé, et nous ne partirons pas avant que tu aies mangé. Dit-il.

- Je... Je peux manger toute seule, dis-je, gêné.

Il me fait ouvrir la bouche et y introduit la nourriture. Ses gestes sont doux, pleins d'attention, et mon cœur n'en peut plus.

- Mais je veux te nourrir, Aeryn.

Il continue, sans s'arrêter un instant. Je me laisse faire, et lorsqu'enfin mon assiette se vide, il lève son regard sur moi.

- Maintenant, nous pouvons partir. Dit-il en faisant un sourire en coin.

Je hoche la tête, les joues toutes rouges. Nous nous levons, puis je suis Kaelan jusqu'à l'extérieur. Nous avons descendu les escaliers, puis quand nous sommes sortis, il a pris sa propre voiture. Je me suis rendu compte que Kaelan aimait conduire tout seul, je ne l'ai jamais vu prendre un chauffeur.

Il n'a pas perdu de temps et a démarré immédiatement. 

Nous roulons à travers les rues calmes de la ville, et je profite du trajet pour observer Kaelan discrètement. Son regard est concentré sur la route, il semble perdu dans ses pensées. Le paysage défile rapidement devant nous, mais je n'arrive pas à détourner mon regard de lui.

- Tes entraînements seront notre excuse désormais pour sortir du palais ensemble, me dit-il en gardant le regard rivé sur la route.

Je hoche la tête, cela me fait vraiment du bien de sortir du palais. Et je sais que cela lui fait du bien aussi.

La voiture s'arrête finalement devant un grand palais, entourée d'un magnifique jardin. Kaelan coupe le moteur et descend de la voiture, se précipitant pour ouvrir la porte du passager et me tendre la main. Je la saisis et descends à mon tour.

- Es-tu prête ? Me demande-t-il.

J'acquiesce, il prend alors ma main et nous entrons à l'intérieur du palais. Il est grand, mais tout de même assez petit comparé au palais du royaume. Je me demande qui vit ici. Sûrement une famille fortunée, qui peut se permettre un palais sinon ? En plus, il est éloigné de toutes les villes, tous les villages. 

Kaelan marche devant, comme s'il connaissait déjà le lieu. Peut-être que c'est à lui. Peut-être que c'est ici qu'il reste lorsqu'il "disparait" pendant plusieurs jours. Il s'arrête devant une porte puis se tourne vers moi.

- En aucun cas tu ne prononceras le nom d'Adriel. Me dit-il d'un ton sérieux. C'est très important, Aeryn.

- Je ne le ferai pas, lui assuré-je.

Il acquiesce puis ouvre la porte. Au début, c'est le silence. Mais lorsque nous entrons, je vois deux femmes. L'une qui a l'air assez jeune, et l'autre qui semble avoir environ une quarantaine ou une cinquantaine d'années. Elles sourient toutes les deux en voyant Kaelan.

La plus jeune se lève et lui saute dans les bras. Ce qui me surprend, c'est que Kaelan ne la repousse pas, il la serre de plus en plus fort dans ses bras.

Qui sont-elles ?

La Légende du Soleil et de la LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant