La Légende du Soleil et de la Lune

98.

Tout le monde a quitté la pièce après qu'elle ait ouvert les yeux. Tous étaient sous le choc. La pièce s'était illuminée grâce aux dons d'Aeryn, avant que tout n'entre à nouveau dans son corps, et c'est à ce moment-là qu'elle est devenue consciente.

Et jour après jour, mes soupçons se révèlent vrais, et je me sens mal de le lui cacher.

- Je suis si fatiguée, dit-elle d'une petite voix.

Allongé à côté d'elle, je lui caresse les cheveux. Je ne peux pas décrire le sentiment que j'éprouve en ce moment, je suis sur le point d'exploser de bonheur. Je n'ai jamais ressenti cela. C'est comme si je me découvrais pour la première fois, c'est comme si je réalisais que le Kaelan solitaire et froid que j'étais est mort. Vraiment mort.

- Et j'avais tellement peur, Kaelan... Murmure-t-elle. Je ne voulais pas te laisser.

- Tu es vivante, maintenant... dis-je en souriant. Vivante et guérie.

Elle me serre fort dans ses bras, enfouissant son visage dans mon torse. Je ne peux plus m'éloigner d'elle, à partir de maintenant. J'ai tellement besoin d'elle, mais en même temps... Si je ne veux pas vraiment la perdre, je dois la laisser partir. L'envoyer loin d'ici.

- J'avais peur de partir, avant que tu ne puisses l'apprendre... Commence-t-elle, un peu hésitante. Combien je t'apprécie, combien je tiens à toi.

Puis elle écarte la tête et me regarde dans les yeux.

- Combien je t'aime.

Et c'est là que mon cœur s'est arrêté de battre. Je pense que je l'ai regardée trop longtemps, essayant d'assimiler ses mots. Je dois garder mon calme, mais il y a comme une alarme à l'intérieur de mon corps.

- Tu m'aimes ? Murmuré-je.

- Oui...

- Mais tu n'aurais pas dû. Tu ne peux pas tomber amoureuse de moi.

Son visage se remplit immédiatement d'inquiétude. Je ne mérite pas cela, je ne la mérite pas, ni son amour, ni sa compassion, ni sa présence, ni son temps, ni tout ce qu'elle pourrait me donner. Je ne mérite pas Aeryn.

Elle est la lune que je désire ardemment atteindre, mais tout ce que j'ai pu faire, c'est la regarder. Mon cœur se languit d'elle, mais mon esprit me fait dévier, privilégiant son bien-être au mien.

- Oh, eh bien... dit-elle, gênée. Je pensais que tu ressentirais la même chose. Je suis désolée, je...

- Tu étais sur le point de mourir. La coupé-je. Tout cela parce que tu m'as poursuivie. Tomber amoureux est trop dangereux, et je ne veux pas de cela pour toi.

- Il est trop tard, maintenant. Dit-elle en souriant tristement. Je n'accorde pas beaucoup d'importance à ma vie si tu n'es pas là.

Je sens qu'elle tente de retenir ses larmes, mais elle n'y parvient pas. Une larme roule sur sa joue, et c'est comme si elle avait déchiré mon cœur en deux morceaux. Je déteste ça. Je déteste qu'elle se sente mal, qu'elle soit triste à cause de moi. Pour le cacher, elle s'enfouit la tête. Pas sur mon torse cette fois, mais sur l'oreiller.

Ne me fais pas cela, ma lune. Je ne peux pas...

- Je vais aller à Regina, dit-elle d'une voix faible.

- Pourquoi maintenant ?

- Veux-tu la vérité ? Ou un doux mensonge ? Demande-t-elle en levant la tête.

- La vérité.

Elle s'assoit sur le lit, je sais qu'elle a mal, et ce n'est pas ce que je voulais. Elle sait... Elle sait ce que son cœur cache, et je le sais aussi, mais je n'ai pas le courage de l'admettre.

- Je me sens seule, j'ai l'impression de ne pas mériter d'être aimée. Dit-elle, tristement. Et tout ici me le rappelle. Peut-être... Peut-être que vivre à Regina sera un nouveau départ pour moi. Une nouvelle vie, un nouvel amour. J'y guérirai.

- Mais...

C'est moi qui l'ai fait se sentir comme ça. Je sais. Elle m'aime. Elle aimait être avec moi, et le temps que nous passions ensemble lui faisait oublier tout et tout le monde. Même sa propre douleur. Et le fait de lui briser le cœur en la rejetant lui a fait croire qu'elle m'avait perdue. Je secoue la tête, je dois... Je dois ouvrir mon cœur. Je ne la perdrai pas... non.

- Je serai toujours ton alliée, Kaelan. Et notre temps ensemble était... était parfait, dit-elle et sa voix commence à trembler. Mais je ne pense pas pouvoir continuer avec toi, maintenant que nos sentiments sont connus. Je ne suis pas celle qu'il te faut.

- Non, non, non, non, non !

Je me redresse, la regarde, l'inquiétude dans les yeux.

- C'est toi qui es faite pour moi, bon sang ! Je ne peux pas vivre sans toi, Aeryn, tu m'entends ? Sans toi, je me sens perdu, j'ai l'impression de ne pas être moi-même. Ne...

- Kaelan...

- Ne me quitte pas, parce que je... Je t'aime aussi. Et je t'aime trop. Non, tu m'obsèdes. Je n'arrive pas à penser correctement parce que tu es dans mon esprit, jour et nuit ! Je me sens malade à chaque fois que je pense à te perdre ! Tu es une partie de moi, pour l'amour de Dieu. Tu es moi. Je ne te laisserai partir nulle part, je ne te laisserai pas m'oublier, je suis à toi, bon sang ! Je suis le tien, à haïr, à aimer, à désirer, à me languir, je suis le tien ! Et je suis un lâche de ne pas te l'avoir dit, je suis tellement lâche que je ne t'ai pas donné tout ce que tu méritais. Je suis tellement lâche que je t'ai fait sentir que tu n'étais pas digne d'être aimé.

J'étais au milieu de mon monologue lorsqu'elle s'est mise à pleurer. Mon Dieu. Je l'aime. Je l'aime tellement, tellement que les mots ne peuvent pas la décrire.

- Je ne te crois pas, dit-elle en pleurant. Répète-le encore une fois.

- Je t'aime, Aeryn.

- Encore une fois...

- Je t'aime...

Nous sommes tous les deux enlacés, elle pleure encore, mais je sais que c'est de joie. Elle réalise peu à peu qu'elle mérite l'amour, qu'elle mérite d'être grandement aimée. Et, oh, comme je le lui montrerai chaque jour de sa vie ! Et elle me fait aussi comprendre que je ne suis pas une trop mauvaise personne pour mériter l'amour. Je deviens meilleur pour elle.

Et mon Dieu, comme c'est soulageant de laisser mon cœur libre.