CHAPITRE 19 :

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LOLITA

Le repas s'est terminé lorsque Carlos est redescendu pour nous annoncer que Karina faisait une crise d'angoisse à l'étage.

Diego a décidé qu'il valait mieux qu'il aille la voir, j'ignore quelle relation il entretient avec elle, mais ça fait bien une vingtaine de minutes qu'il a quitté la table.

J'espère qu'elle va bien.

J'essuie la vaisselle de manière mécanique, plongée dans mes pensées les plus sinistres. Je subis de plus en plus le vide qui se créer dans ma poitrine, la disparition soudaine d'Esmeralda me brise tellement.

La déréalisation de la situation me plonge dans un déni qui me permet de ne pas sombrer dans des pensées morbides.

Mon cerveau préfère se taire pour protéger mon cœur d'une douleur profonde. Je repense à ce dîner, à la méchanceté gratuite de Karina, au geste de Diego.

Je me demande pourquoi est ce qu'il m'a posé sur ces genoux, j'ai ressenti quelque chose d'agréable, bien que surprenant.

Je range les assiettes et les couverts dans les placards, puis je m'essuie une dernière fois les mains avec le torchon avant de le poser sur le plan de travail.

Je jette un coup d'œil à la pendule qui annonce vingt trois heures, mes paupières sont lourdes de fatigues et je laisse un bâillement m'échapper.

Mes pas montent les escaliers qui grincent sous chacun de mes pas, mes doigts glissent sur la rambarde lisse et boisée. A l'étage, je distingue d'ors et déjà les deux voix basses de Diego et Karina.

Des bribes de leur discussion me parvient, j'avance à travers le couloir plongé dans l'obscurité et mon corps se fige subitement lorsque j'aperçois leurs deux silhouettes à travers l'ouverture d'une porte.

Karina déposant ses lèvres sur la joue de Diego, et ses mains posées sur son torse me provoque un frisson désagréable dans l'échine.

Je ne sais pas pourquoi, mais je déteste ce que je vois. Je détourne les yeux lorsque le regard de Diego croise le mien, je me dirige précipitamment dans la salle de bain et claque la porte.

Je me déshabille et fonce sous la douche, l'eau chaude dévale ma peau comme une douce cascade aux chutes ardentes.

Je sens chacune des gouttelettes noyer mon corps à mesure que l'eau s'écoule et m'entoure de sa buée chaleureuse. Un soupire m'échappe, mes deux mains sont posées chacune de leurs côtés sur la faïence froide.

J'essaie à tout prix de faire disparaître cette image de mon esprit ainsi que tous les maudits scénarios qui vont avec.

La confusion l'emporte sur tout autre sentiment. Je ne comprends pas pourquoi j'étais assise sur son entrejambe, un acte complètement dépourvu d'innocence, quelques instants avant qu'il ne décide qu'il était mieux avec elle à savourer ces caresses.

Je coupe l'eau une fois ma douche terminée, j'attrape une serviette et l'enroule autour de mon corps. Mon reflet dans le miroir me pousse à me demander si j'aime ce que je vois. Pendant une seconde j'ai un moment de réflexion à l'idée d'être un corps complètement dépourvu d'âme.

Parfois j'ai l'impression de n'être qu'une vulgaire âme inerte, perdu dans le vide d'un corps mort.

Une coquille vide.

LolitaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant