Lolita

CHAPITRE 30 :

LOLITA

« Tout ce que je fais, je le fais pour toi. »

Ces derniers mots tournent en boucle dans mon esprit, je n'arrive plus à discerner la vérité du mensonge.

Je me rappelle la manière dont ses yeux me regardaient avec amour, à présent je me demande si ça aussi c'était vrai. Ou si tout n'était qu'un mensonge. Je regarde le paysage de Tijuana défiler à travers la fenêtre de la voiture et mon cœur se serre à mesure que les petites maisons colorées disparaissent.

Rien de tout ça n'était réel.

    — Ne t'en fais plus, tout est finis. Ta place n'était pas avec lui. Prononce Federico en posant sa main sur mon genou.

Je rive mon regard sur lui, j'opine, il a sans doute raison.  Au final, je ne sais même plus où est ma place.
Après un moment interminable en voiture, le véhicule s'arrête enfin devant une énorme bâtisse dans le style victorien. Mes yeux s'ouvrent en grand au même titre que ma bouche.

Mon frère m'ouvre la porte, je contemple la devanture en pierre grise dont quelques murs sont habillés de lierres.

    — Bienvenue à la maison soeurette.

Je souris avec difficulté, je sais que je vais avoir du mal à me faire à cette nouvelle demeure, à cette nouvelle famille. Federico est mon frère, et au fond, je suis heureuse de l'avoir retrouvée et j'espère qu'un jour nous pourrons retrouver la complicité que nous avions autrefois.

Deux hommes armés nous saluent d'un geste de la tête lorsque nous entrons, la décoration est moderne, le noir est la couleur dominante. L'atmosphère chaleureuse de la propriété des Santos me manque, ici, tout est terne, froid. J'ai le sentiment de ne pas me sentir  chez moi.

    —Viens, je vais te montrer ta chambre. Lance mon frère en me tendant la main, me sortant de mes pensées.

J'accepte et le suis à l'étage où se trouve ma nouvelle chambre.

    — Tu trouveras quelques vêtements dans le placard, en attendant d'aller en acheter de nouveaux.

Je hoche la tête machinalement, tout ce dont j'ai envie aujourd'hui c'est de fermer les yeux et ne plus me réveiller.

    — Federico ?

    — Oui ?

Mon frère s'arrête dans l'encadrement de la porte, les bras croisés sur son torse tandis que je m'assois sur le lit.

— Pourquoi est ce que tu n'es pas venu avant ?

Il demeure silencieux quelques secondes, puis il rétorque enfin :

  — Même si ça me tue de l'admettre, tu étais plus en sécurité avec lui qu'ici, tu sais, notre père avait énormément d'ennemis, porter son nom nous porte préjudice aujourd'hui.

Je hoche la tête, l'image de cette scène me revient brutalement en mémoire, celle de ce jour où mon père a été sauvagement assassiné. Malgré que j'en ai également fait les frais, je ne regretterais jamais de porter son nom, peu importe si le monde est contre moi.

Se sera toujours pour lui que je me bats.

***

Le soleil a laissé sa place à la lune, la nuit calme emporte avec elle les tourments de cette journée. Je n'arrive pas à fermer les yeux, alors comme à chaque fois que mon esprit se perd je trouve mon repère sous le ciel noir.

Parce qu'en haut, il n'y a pas de douleur.

Je suis assise sous le perron, les étoiles brillent, le vent souffle sur ma peau.  Diego est là, omniprésent dans mes pensées, je n'essaye plus de l'y chasser, je sais que peu importe à quel point je le détesterais, son nom est gravé à l'encre noire désormais.