DIEGOLa chaleur du soleil s'abat sur ma peau en ce début d'après-midi.
Mon regard balaye la façade du bar dont la peinture s'est effritée avec le temps, Carlos m'emboîte le pas, nous pénétrons à l'intérieur et mes yeux se posent immédiatement sur la masse blonde dans le coin du bar, deux hommes se tiennent debout, assez proche d'elle pour la protéger si j'en venais à tendre quoi que se soit.
— C'est elle ? marmonne Carlos en penchant la tête vers moi.
Je réponds d'un simple hochement de tête. En m'apercevant, Katherina se lève et me sert un sourire des plus hypocrites en levant la main :
— Katherina, enchantée.
Ma paume entre en contact avec la sienne dans une poignée de main, nous nous asseyons autour de la table quand sa voix perce le silence :
— Merci d'avoir accepté de me rencontrer.
— Il faut vite traîter la gangrène avant qu'elle ne se propage, tu as dû l'apprendre à l'école d'infirmière.
Un ricanement nerveux échappe de ses lèvres maquillées d'un rouge vif.
— En effet, en revanche je ne suis pas sûre de vous suivre monsieur Santos.
— D'accord, alors laisse moi t'expliquer, dis-je en baissant mon torse contre la table, mes paumes croisées entre elles. Ton organisation veut s'emparer de choses qui ne lui appartiennent pas en mettant le nez dans des affaires qui ne la concerne pas. Et c'est là que j'y vois un gros problème.
Elle hoche la tête, son attitude professionnelle me pousse à croire qu'elle a l'habitude de ce genre de conversations.
— Mais nous sommes là pour trouver un arrangement pas vrai ? Mon patron déteste que je rentre les mains vides. Prononce t'elle d'un ton condescendant.
— Il n'y aura un arrangement que si je le décide, Katherina.
— Vous avez une proposition à me faire ? Dit-elle en faisant claquer le mécanisme à ressort de son stylo sur la table.
— Retournez d'où vous venez, on évitera une guerre inutile, vous n'aurez rien de moi.
Elle ne prend pas la peine d'écrire mes quelques mots sur son petit carnet rouge, elle relève ses iris bleus sur moi pour me dévisager avec dédain.
— Vous êtes fort, peste-t-elle d'une voix basse, la menace pèse sur vous mais vous n'oubliez pas de faire comprendre que la vraie menace, c'est vous. C'est sexy.
Dans mon dos, j'entends Carlos ricaner, ce qui accentue le petit sourire de Katherina lorsqu'elle fait rouler ses yeux sur moi.
— Puis-je quand même vous dire la proposition de mon patron ? Tente-t-elle en voyant que je ne rétorque rien.
J'acquiesce d'un hochement de tête.
— 30 % de vos parts, pour éviter une guerre inutile.
Carlos explose de rire alors que je me contiens pour ne pas insulter cette folle là tout de suite.
— Mais elle est tarée ! S'écrit Carlos.
— La mort de ton frère ne vous a rien appris ? Dégagez du Mexique avant que vous soyez les prochains, c'était mon dernier avertissement.
Je me lève, prêt à partir en comprenant que je n'obtiendrai rien d'elle, mais sa voix m'interpelle alors que je m'apprête à franchir le seuil de la porte :
— Réfléchissez-y, monsieur Santos. S'il vous plaît.
Je ne réussis pas à cacher mon mépris en la toisant de bas en haut.
***
Mon crochet droit s'abat violemment contre le sac de frappe que Juan maintient en place, j'ai besoin d'expulser les émotions qui débordent en moi, j'ai l'impression d'être submergé, mais le pire dans tout ça c'est que je n'arrive pas à le contrôler. Parfois j'aimerais redevenir celui qu'on appelait Trevas, lui ne ressentait pas toutes ces conneries qu'on appelle l'amour et le manque. Le désespoir. Trevas n'aimait que l'argent et le pouvoir.
Moi je n'aime que ma Lolita.
— Je sais que tu penses encore à moi bébé, mais concentre toi.
Je toise salement Juan qui m'adresse un regard désespéré, il essaie de me changer les idées, il croit que je ne m'en rends pas compte mais il n'a jamais été aussi collant que ces derniers mois.
Il ne s'est toujours pas remis de la mort de Karina, en fait je crois qu'il traverse une phase de profond déni, tout comme Carlos, et je sais que le jour où la réalité leur explosera en plein visage ce ne sera que trop douloureux.
Parfois il me parle d'elle comme si elle était toujours là, à faire claquer ses talons dans toute la baraque, ou à laisser traîner ces cheveux blonds platine dans la salle de bain. Il évoque sa mort parfois, avec un tel détachement qu'on pourrait croire que ça ne l'affecte pas vraiment. Et puis parfois, je le surprends à craquer, seul dans un coin. Alors c'est moi qui me met en tête de lui changer les idées en me transformant en clown, mais mon aigreur refait surface et c'est finalement ça qui le fait rire.
Il m'arrive de regretter d'avoir été un tel connard avec elle, j'aurais dû agir différemment.
Mais maintenant elle est morte, c'est trop tard pour regretter.
— A moi aussi elle me manque tu sais, j'espère que je lui manque aussi. Prononce t'il en faisant référence à Lolita.
— Tu lui manques sûrement plus que moi. Je rétorque, dépité, en passant la serviette sur ma nuque.
Il plisse les lèvres l'air de dire : "C'est sûr.", alors je lui met une tape derrière la tête, il pouffe de rire avant de reprendre son air sérieux:
— Sérieux, je sens qu'on va vite la retrouver. Tu le sais pas encore mais j'ai un don de voyance. M'annonce t'il.
— Arrête tes conneries.
La vérité c'est que je commence à profondément perdre espoir. Même si je la retrouvais un jour, dans cinq ans, dans dix ans, rien ne me garantit qu'elle m'aimera encore, ou qu'elle accepterait de venir avec moi. Alors je deviendrais un aspect de sa vie qu'elle s'efforcera juste d'oublier, elle épousera un homme normal, fondera une famille et vivra heureuse jusqu'à la fin de ces jours. Peut être que c'est ce qui serait le mieux pour elle.
Pourtant je ne suis pas encore prêt à renoncer à elle.
Nous tournons la tête simultanément vers la porte qui s'ouvre brusquement sur Caleb, qui apparaît, essoufflé, mais lorsque j'aperçois ce minuscule sourire étirer ses lèvres, je me lève avec hâte, comme pour l'intimer de parler maintenant :
— Diego, je l'ai trouvé.
Je tourne la tête vers Juan qui me regarde, aussi choqué que moi. La bouche ouverte par le choc, il se met à sourire de toutes ses dents.
— J'ai un putain de don de voyance !!
J'ai l'impression que le monde a arrêté de tourner, j'attends ce moment depuis si longtemps que je n'arrive pas à croire qu'il est enfin arrivé.
Mon cœur bat si fort dans ma cage thoracique que je ne sens plus que la manière dont il n'a pas cessé de battre pour elle ces derniers 120 jours, je ne vois plus qu'elle dans mon esprit. Elle et la promesse que je ferais tout mon possible pour que se soit moi, le meilleur pour elle.
***

VOUS LISEZ
Lolita
RomanceSa plus grande erreur : Être la fille du chef de cartel le plus puissant du Mexique. Après une série d'évènements tragiques qui ont bouleversé sa vie, Lolita n'aspire qu'à avoir une seconde chance dans l'espoir de retrouver une vie normale. Mais e...