[À vous de deviner]
Marchant d'un pas rapide, je me dépêchais d'arriver à destination.
Pénétrant dans l'enceinte de l'imposant édifice, j'avançais sans réfléchir, j'avais parcouru ce chemin des centaines de fois et je n'étais pas prêt de m'arrêter à l'emprunter. Mes pas résonnants dans le couloir vide et le silence inquiétant.Je me bloquais devant une grande porte familière et approchais mes yeux du détecteur. En entendant le cliquetis du verrou, je poussais le métal froid puis refermais derrière moi.
Une jeune femme apparut, ses cheveux d'un extrême pureté cachant l'âme -plus si innocente- de sa propriétaire.
- Luc ? C'est toi ?Ses mystérieux yeux s'écarquillèrent lorsqu'elle reconnut la personne se trouvant en face d'elle.
Mais son expression reprit une position neutre bien trop vite, impassible, elle s'étonna tout de même.- Qu'est ce que tu fais ici ? Je pensais que tu n'avais pas le temps de me voir ?
Je soupirais. Je pouvais avouer que depuis la mort de sa mère, je l'avais délaissé, trop occupé par mes fonctions... Et à présent je le regrettais, vivre sans figure paternel l'avait rendu amère et froide. Je m'en voulais terriblement, et j'allais tout faire pour qu'elle revienne à la raison...
Ma précieuse Jasmine... Ma précieuse fille...- Je suis désolé, je t'ai négligé depuis bien trop longtemps, tu ne peux pas savoir comment je m'en repentis...
Elle demeura sans émotions mais le tremblement de ses mains jurait avec le masque qu'elle essayait de placer.
- Il est un peu tard pour t'en rendre compte papa, tu m'a laissé seul sous prétexte que la mort de maman t'avait fortement attristé... Mais c'est toi qui n'avait pas souhaité qu'elle devienne comme toi... Qu'elle reste à tes côtés !
Elle commençait à élever la voix, tandis que des sanglots l'emplissaient, la connaissant, je savais qu'elle finirait par craquer et à se confier à moi, son père.
Malheureusement, elle se reprit et baissa son intonation.- Tout ce que je désirais, c'était que tu nous laisse à nous autres, pauvres mortels, d'avoir la même longévité que toi... Pour que plus personne ne souffre des décès, des disparitions de personnes chères...
Mes pieds ne tenaient pas en place, je commençais à tourner dans la salle en baladant mon regard de partout dans la salle... Sauf sur cette femme figée au milieu.
D'une voix légèrement nerveuse, je me défendais :- Tu sais très bien que c'était une décision commune... Ta mère ne la souhaitait pas, tout autant que moi qui veut m'en débarrasser, cette immortalité est un fléau ! Regarde la vérité en face bon sang !
J'avais une patience limitée, Jasmine le savait très bien, aussi elle ne tiqua pas lorsque je m'énervais.
Elle croisa ses bras sur sa poitrine et me défia du regard.- Elle permettrait que des vies ne soient pas brisés, que les endeuillés ne se retrouvent pas seuls...
- Oui mais elle en détruirait d'autres, répliquais-je, nous en avons déjà parlé ! Elle pourrait créer une surpopulation avec impossibilité de la baisser, bouleverser des vies ! Certains se retrouvent certe endeuillés mais ils feront toujours de nouvelles rencontres, de nouvelles expériences. Peut-être qu'il y en a qui seront seuls jusqu'à la fin de leur vie, mais c'est à nous de remettre un rayon de soleil dans leur vie en leur réinstaurant la joie de vivre. Pas à la bactérie.
Elle me fixa les yeux brillant en continuant ses reproches.
- J'ai certe rencontré Luc, mais maman m'a laissé un vide que je n'arrive pas à reboucher...
- L'immortalité ne t'aidera en rien ma chérie... Il faut que tu te convainque que c'est du passé... Nous ne pouvons plus rien faire pour elle... Mais toi je peux te venir en aide ! Laisse-moi t'épauler, et te permettre d'arrêter de menacer des inconnus.
Elle fut sans voix un instant avant de reprendre ses esprits, elle ne se défendit pas, elle émetta juste une affirmation.
- Ainsi, tu es au courant... Je savais que je ne devais pas faire confiance à ces morveux...
Choqué par l'interpellation, je la réprimandais :
- Fais attention à ce que tu dis, l'un d'eux est tout de même...
- Je sais, je sais... me coupa-t-elle.
Un silence s'installa, on resta là sans bouger ni parler, aucun de nous deux n'osant le briser.
Malgré tout, je décidai de le remplir, je ne devais pas prendre de risques.- Je veux que tu me passe ces télécommandes mortelles.
Son regard haineux me traversa sans me toucher.
- Tu croyais vraiment que je m'étais embêté à mettre en place tout ça ? C'était du bluff, rien que du bluff.
Je soufflais, je la connaissais mieux que quiconque.
- Jasmine... Je sais que tu ne ferais jamais rien sans une roue de secours... Tu t'es toujours organisé pour que rien ne devienne un échec.
"Et ça devient de la manipulation..."
Elle serra le poing rageusement et se pinça les lèvres.
L'ambiance devenait pesante, sombre, une vision s'imposa à moi, c'était comme si un serpent d'obscurité s'enroulait autour de ma chère fille et se resserrait de plus en plus...- Je suppose qu'elles se trouvent dans ta cachette habituelle ? chuchotais-je doucement. Est-ce que je peux les récupérer ?
Elle ne me répondit pas et ne fit aucun geste, je pris ça comme un oui et me dirigeai vers les armes mortelles.
Une fois trouvées et récupérées, je les mettais dans ma poche pour les détruire plus tard.
Je restais un moment à observer les photos encadrées, représentant une fillette souriante et heureuse et un femme l'entourant de ses bras affectueusement, un temps malheureusement révolu...La voix marmonnée de Jasmine me tira de mes douces pensées.
- Tu...m'...
- Que dis-tu ?
Je me rapprochais d'elle et reculais d'un pas en voyant son visage.
Ses yeux étaient assassins et risquaient de me poignarder de reproches.
Toujours crispé à l'extrême, elle articula.
- Tu m'a tout pris... À moi de foutre ta vie en l'air...
Je l'observais sans comprendre.
- Que veut-tu dire ??
- Sors de chez moi immédiatement...
Elle tendit un doigt vers la sortie et s'immobilisa.
- Écoute moi ma chérie...
- Sors de chez moi ! Hurla t-elle cette fois.
Le message était plus que compréhensible, elle m'ordonnait de disparaître.
Je le fis, dépité mais surtout inquiet de ses plans... Que comptait-elle faire ?
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Eternalsleep
Science Fiction"Saisissez le temps présent, profitez-en, de sorte qu'il ne devienne pas une cause de regrets." Louis-Philippe de Ségur J'avais une vie tranquille dans mon petit cocon familial entouré et aimé, mais celui-ci éclata quand mon destin fut bouleversé p...