[Point de vue de Brian]
Je dérivais, je voguais dans les limbes de mon esprit.
Égaré et désorienté, je voyais arriver les déferlantes vagues de souvenirs.Les reliques du passé s'échouaient sous mes yeux, et dans cette mer de vestiges, je pouvais me perdre dans la symphonie des rires perdus depuis longtemps.
Et dans cette cacophonie résonnait inlassablement ces mots :
"Il a volontairement abandonné ta mère, il a volontairement abandonné ta mère..."
Je me pris la tête entre les mains et m'accoudais à mes genoux. J'étais dans un état second, comme hypnotisé. Je ne me rendis pas compte que Ryan essayait d'attirer mon attention depuis dix bonnes minutes.
- Eh oh ! Brian ! Y a un rhinocéros juste derrière toi !
Je revins enfin à la réalité et analysais difficilement ses paroles.
Lorsque l'information arriva finalement à mon cerveau, je pus réagir comme il se doit.- Attends, quoi ? Paniquais- je.
Je me retournais vivement et ne vis personne. Attends un instant... Un rhinocéros ? Je crois que je me suis fais avoir...
Mon meilleur ami ricana tandis que je pivotai vers lui.- C'était très amusant, ironisais-je, tu es fait pour être humoriste.
Il continua à rire à s'en tenir les côtes en prononçant avec difficulté :
- Tu aurais voir ta tête quand tu as paniqué ! La plus drôle est celle où tu as compris que ce n'était pas possible !
Je l'observai alors que le tremblement de ses épaules s'interrompait peu à peu.
Quand celui-ci s'arrêta définitivement, je réagis :
- C'est bon tu as fini ?
J'aurais dû me taire, au lieu de se tarir, son hilarité avait repris de plus belle.
En le voyant là, si décontracté et serein, la réalité me frappa de plein fouet.Avec son tempérament comique, Ryan m'avait toujours aidé avec ses blagues débiles et son rire tant chaleureux.
Même maintenant je ne pouvais m'empêcher de sourire en le constatant si heureux.
- Merci... Chuchotais-je.
Il se bloqua net et me fixa, surpris.
- Pour quoi ?
Les coins de mes lèvres se retroussèrent alors que je m'expliquais :
- Merci pour tout, merci pour ton amitié et ton aide.
Il me frappa amicalement dans le dos, me coupant la respiration sur le coup. Il n'arrivait jamais à contrôler sa force.
- De rien ! Tu sais que je suis là pour ça ! Je suis ton associé de conneries préféré !
J'étais à présent joyeux grâce à lui, il ne me manquait plus qu'à régler mes problèmes, mais ça, je peux m'en occuper plus tard.
*
Mon sac à dos s'était déchiré à plusieurs endroits, j'avais dû le recoudre avec de l'herbe qui m'avait semblé solide et une aiguille métallique qu'avait emmenée une personne.
Il était en mauvais état mais restait tout de même opérationnel, il avait donc été bourré de choses que l'accident n'avait pas réussi à détruire.
Tout le monde était à présent regroupés, le camp avait été levé et les bagages rangés. Nous n'attendions plus que le signal des dirigeants pour partir.
Je regardais à droite à gauche, à la recherche d'une certaine brune de ma connaissance. Au moment où je la vis, je soufflais, soulagé je ne sais pas pourquoi. Elle riait et plaisantait tranquillement avec des femmes qui semblaient apprécier sa compagnie.
Malheureusement, mon soulagement se dissipa quand je remarquais des yeux améthystes dans le petit clan.
Elle était partout ma parole ! À croire que son objectif premier était de me pourrir la vie ! Ce que je ne comprenais pas, c'était : pourquoi elle restait constamment avec Lyra ? Elle était pourtant ennemie un mois plus tôt ! Peut-être souhaitait- elle profiter de sa faiblesse pour la manipuler ?
Aussitôt le lien entre elle son père me remit en rage. Les révélations de tout à l'heure me revinrent en mémoire, j'haïssais cette homme, j'haïssais sa fille, j'haïssais tout ce qui ce rapportait à eux.
Je serrais les dents et me détournais de cette vision irritante. Je devais rendre ses souvenirs à Lyra, il fallait qu'elle sache combien cette femme était une peste, une personne non-recommandable.
Alors que je ruminais, éloigné des autres, j'entendis l'appel signalant le départ. Un long sifflement me perça les tympans, impossible de le rater.
Je pris sur moi, bloquant ma colère et rejoignis Ryan. On se mit tous en marche lentement mais sûrement. On nous prévint que nous nous arrêterons à la tombée de la nuit et que nous serions normalement arrivé dans ma ville natale.
J'attendais ce moment avec impatience et appréhension, j'avais peur de ce que j'allais voir, de ce que je n'arrivais toujours pas à imaginer.
Mais, j'avais plus que tout envie de revoir mon passé pour pouvoir tourner la page sur mon malheur et, enfin me sentir totalement bien dans ce nouveau monde.
Autant dire que le trajet me parût long, très long. J'en avais profité pour demander à mon blondinet préféré comment allait sa jambe et pour parler vaguement avec la jeune asiatique.
Néanmoins, le soleil tapait fort ce qui rendait compliqué la petite randonnée. On avait tous chaud et soif mais nous avions dû éviter de trop nous désaltérer à cause de nos maigres réserves.
On nous affirmait que là où nous arriverons, il y aura forcément de l'eau. On essayait de s'en convaincre sans vraiment savoir si c'était vrai ou pas, on espérait juste que ce serait le cas.
Le paysage désertique et la forêt inexistante me faisait penser au Sahara. Je ne reconnaissais pas la France et elle non plus ne m'identifait pas, elle s'efforçait de me rendre la vie dure et y arrivait très bien.
Nous étions tous à bout de force quand nous vîmes des bâtiments au loin. Abandonné, la ville était décorée de verdure et je pouvais apercevoir le goudron fondu par la chaleur de toutes ces années. Malgré tout, elle était relativement resté dans un état correct.
"C'est Villers-les-Nancy ? Mais comment se fait-il que la ville soit encore debout alors que nous n'avons pas croisé une seule cité sur le chemin ? "
Ayant sûrement constaté ma mine ébahi, un homme intervint et révéla :
- Suite à l'explosion, la ville s'est retrouvée comme figée dans le temps. Personne n'avait osé toucher à ne serait-ce qu'à un de ses immeubles. Tu vas la revoir exactement comme elle était lorsque tu t'es endormi il y a bien des années.
VOUS LISEZ
Eternalsleep
Science Fiction"Saisissez le temps présent, profitez-en, de sorte qu'il ne devienne pas une cause de regrets." Louis-Philippe de Ségur J'avais une vie tranquille dans mon petit cocon familial entouré et aimé, mais celui-ci éclata quand mon destin fut bouleversé p...