Un voyage sans retour

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[Point de vue de Brian]

- Je suis désolé, je ne m'en souvenais plus.

Sous l'effet du choc, mes yeux s'agrandirent de stupeur devant les sanglots de mon amie.
Les larmes coulaient sur sa peau lisse, et, à son passage, laissaient sur ses joues roses une trace humide.

Les yeux dans les yeux, on se sondaient mutuellement, hypnotisés par les émotions traversant tour à tour nos visages. Nous étions si proches que j'arrivais à distinguer un minuscule grain de beauté au coin de son oeil droit, qui ajoutait un certain charme à son regard pénétrant.

Du pouce, j'essuyai les perles gouttant sur ses longs cils et regardai intensément l'ex-amnésique.

Soudainement, ses pommettes se colorèrent légèrement de rouge, et son regard devint fuyant, cherchant absolument à se détourner de moi sans que je sache pourquoi.

Seulement, la raison me vint en un éclair lorsque Lyra, les yeux fixant à présent le chêne me dit :

- On devrait peut-être... Se relever ?

Je constatai notre proximité, certe un chouïa embarrassante mais pas désagréable. Je me remis debout sur le champ et tendis une main à Lyra pour l'aider.

Une fois sur pied, nous évitâmes soigneusement de nous regarder en face dans un silence gêné.

En fin de compte, Lyra osa braver sa timidité en première. Je sentis ses mains se poser sur mes épaules et avant que puisse savoir ce qui m'arrive, je me fis encercler par des bras musclés qui me serrèrent délicatement.

Je me laissai aller à cette étreinte apaisante, j'espérais que cette "résurrection" ne soit pas de courte durée et qu'un problème n'allait pas encore pointer le bout de son nez.

C'est avec regret que je quittai son cocon protecteur et cramponnai mon regard au sien.

Nous nous étions enfin retrouvé.

*

- Nous avons tout de même un problème, comment devrions-nous retourner à Elbayorcini ? Nous n'avons aucun moyen de rentrer !

Dean, l'homme qui m'avait serré dans ses bras était à présent inquiet, je l'entendais parler de son angoisse avec ses collègues sur la planification à venir.

- Peut-être pourrions-nous établir un contact avec Elbayorcni en trafiquant l'un de nos Earnano ? Suggéra l'un de ses camarades.

Dean contesta aussitôt l'idée.

- La portée de ces appareils n'est pas assez puissante pour atteindre là-haut, nous risquons surtout d'enclencher par mégarde un mécanisme qui ne nous serait pas bénéfique.

Un autre chercheur proposa une solution que je n'entendis pas lorsque je me relevai pour me diriger vers eux, j'avais oublié de les informer de la bonne nouvelle.

Le petit groupe était tellement concentré sur sa tâche qu'il ne me vit pas m'approcher, aussi tous sursautèrent quand je pris la parole.

- Nous avons un moyen qui nous est offert par la compagnie Victor.

Ils se retournèrent d'un même geste et affichèrent un air des plus surpris.

- Que voulez-vous dire Mr Jian ?

Je grimaçai à cette nomination. Cela ne me rajeunissait pas. Néanmoins, je ne laissai rien paraître et expliquai.

- Il se trouve que Victor et sa femme gardaient depuis des années dans un lieu bien gardé, un avion en parfait état de marche et...

- C'est impossible ! Me coupa l'un des hommes avec une moue dédaigneuse. Comment auraient-ils pu le maintenir ainsi ? Et puis, nous sommes incapables de le piloter, à moins que eux ne le sachent, ce dont je doute fort. Nous sommes donc toujours coincés ici !

Je soupirai sans discrétion, décidément, cet homme se croyait tout permis et supérieur à la "jeunesse".

- Si vous m'aviez laissé finir de parler, vous auriez déjà eu les réponses à vos questions.

Je foudroyai du regard l'égocentrique savant et reprit là où je m'étais arrêté.

- Je disais donc qu'ils avaient un avion fonctionnel et qu'ils avaient accepté de nous le donner, si on les emmenait avec eux. Il n'y aurait aucun problème concernant la navigation car l'appareil dispose d'un pilote automatique qui peut s'occuper de tout, du décollage à l'atterrissage.

Dean acquiesca vigoureusement et rassembla une espèce de conseil pour décider de ce qu'il allait faire. Je m'aperçu que visiblement, Dean était le seul à me faire un minimum confiance.

Je les vis débattre entre eux tandis que je fulminais intérieurement.

"Vous n'avez pas d'autre choix ! On n'a pas besoin de perdre du temps à papoter ! "

Après ce qui me parut être une éternité passée, la réunion improvisée se finit enfin, dispersant en demi-cercle les membres de la secte.

- Nous ne sommes pas très ravis à la perpective de devoir utiliser une machine inconnue mais étant donné que nous n'avons pas d'autre solution alors... Nous acceptons même si nous sommes assez sceptiques...

"Ben voyons, ce n'est que quand ça vous arrange que vous êtes d'accord."

Je levai les yeux au ciel, mais me passai de commentaires désobligeants. Je n'avais pas envie de démarrer une querelle inutile, aussi je me tus et me contentai d'hocher de la tête.

On me congédia avec froideur tandis qu'ils commencèrent avec hâte à mettre en place les préparatifs d'un retour dont ils ne voulaient pas il y a à peine deux minutes.

Mes dents se serrèrent, contractant douloureusement ma mâchoire, je dus produire un effort surhumain pour éviter de me jeter au cou de ces petits prétentieux.

Je tapai rageusement dans un caillou qui valsa plus loin, et tapa dans la jambe de Lyra. Celle-ci discutait tranquillement avec des jeunes femmes et se tourna vivement vers moi en sentant le projectile la toucher.

Elle constata immédiatement mon expression maussade et fronça les sourcils.

Qu'est-ce qu'il y a ?

Ses yeux me sondaient et tentaient de voir ce qui rendait mon humeur si massacrante. Elle quitta la troupe d'amies en s'excusant avant de me rejoindre.

Arrivée à la hauteur, elle passa ses yeux de moi et remarqua le groupe de vieux schnoks qui me fixait sans gêne et parlait dans mon dos.

Sa perspicacité m'étonnera toujours, elle fit instantanément le lien et me réconforta :

- Ne fais pas attention aux Vieux, ils se croient tout puissant avec leur immortalité, ils font parti de ceux qui considère l'éternité comme un objet de supériorité. Ils ne sont pas méchants, juste un peu usés par la vie.

Un faible sourire se dessina sur ses lèvres et fit rayonner son visage.
Je le lui rendis sans grande conviction, néanmoins ma colère resta entièrement conservée, il fallait vraiment qu'on remette en place ces personnes.

EternalsleepOù les histoires vivent. Découvrez maintenant