Chapitre 74.

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Valentine avançait doucement, bras ballants et yeux écarquillés, elle s'installa sur le fauteuil gris face au canapé où Azzedine se trouvait et entreprit de tracer des cercles imaginaires sur l'accoudoir, sortant peu à peu de sa stupeur, Valentine ouvrit la bouche face à Azzedine qui lui continuait de la fixer.

Valentine : - Qu'est ce que tu fais là ? Tu es venu tirer un trait définitif sur notre histoire, c'est ça ? Pourquoi le faire de visu ? Tu sais, je suis de celle qui préfère les appels, les sms ou même les mails de ruptures, faire ça de loin, parce que la distance, elle nous préserve des maux au final. Et puis ensuite ? Quand tu m'auras avoué que tu ne peux pas me pardonner, il se passera quoi ? Je ferais appel à un déménageur qui videra ton appartement de toute trace de moi ? Qui le videra de moi. Et puis on se reverra au boulot. On se fera la bise comme deux connaissances. On discutera à la machine à café, on parlera de banalités. Et puis je regagnerais mon bureau. Je bosserais comme une forcenée pour ne pas avoir à penser. Pour ne pas me rendre compte que mon monde s'écroule. Et puis on pourra observer les gens autour de nous, les voir vivre, continuer d'être heureux ou non, d'aimer, de se déchirer, de se désirer. On assistera à tout ça d'un œil extérieur et peut être que parfois, on pensera à l'autre. Et puis un jour, on se séparera, on prendra des routes différentes et on se dira « au revoir ». Et ce sera notre dernier mensonge.

Azzedine : - Tu avais appris ça ?

Valentine : - J'ai vécu cette scène mille fois dans le métro, alors... Oui.

Azzedine : - Tu n'as pas imaginé un instant que je pourrais vouloir te retrouver ? Que tu puisses me manquer ?

Valentine : - Non.

Azzedine : - Pourquoi ?

Valentine : - Parce que tu m'as blessé. Je ne suis pas ton jouet ou ton pantin Azzedine.

Azzedine : - Ça tombe bien, je n'y ai jamais songé.

Valentine : - Tu ne peux pas me prendre et me jeter comme bon te semble. Tu n'as pas le droit de faire ça, tu ne sais pas communiquer.

Azzedine : - Tu peux peut-être comprendre que j'ai été blessé que tu ne m'en parles pas. Que tu prennes tes décisions toute seule, c'était quelque chose d'important et si tu m'avais expliqué ce qu'il se passait et ce que tu ressentais, je t'aurais épaulé dans l'épreuve. Ce n'est pas moi qui ai un manque de communication Val, c'est toi.

Valentine soupira et Azzedine se leva et déposa un genou au sol entrelaçant ses doigts et fixant la jeune femme dans les yeux.


Ava poussa la porte de l'appartement de Ken et le trouva assis sur le canapé couvrant des pages entières de son carnet, elle s'appuya contre l'encadrement de la porte fascinée par ce spectacle qui se déroulait devant ses yeux et auquel elle assistait au premier rang.

Ken : - Tu es là ?

Ava : - Non, c'est mon double maléfique... T'es con ou quoi.

Ken : - Tu m'admire ? Pourtant, tu n'aimes pas ma musique en solo.

Ava s'approcha et déposa sa tête sur le torse du jeune homme, ce dernier passa délicatement la main dans les cheveux de l'Argentine.

Ken : - Qu'est ce qui ne va pas ?

Ava : - Rien. Tout est cool.

Ken : - Ava !

La jeune femme haussa les épaules attrapant au passage le stylo noir du rappeur qu'elle fit tourner entre ses doigts.

Ken : - Des copines, j'en ai eu quelques-unes, mais des comme toi jamais.

Ava : - Qu'est ce que tu sous-entends par là ?

Ken : - Tu ne communiques pas, c'est chaud ! On dirait qu'il faut pénétrer dans ton cerveau pour voir ce qu'il s'y passe, mais tu ne laisses rien transparaître.

Ava : - C'est pour qu'il y ait plus de piment.

Ken : - Va ! Tu es sûre que tu ne veux pas m'en parler ? Je suis là pour ça aussi, je veux dire un couple ce ne sont pas seulement deux personnes qui couchent ensemble, qui vont voir des expos ou qui s'endorment main dans la main. Un couple, c'est aussi de la communication, parler de ce qui va et ce qui ne va pas tout ça.

Ava : - D'accord, mais j'éteins la lumière.

Ken : - Pourquoi ?

Ava : - Je te connais, si tu vois mon visage, tu vas chercher à sonder chacune de mes expressions, c'est vraiment trop impudique pour moi.

La reporter se leva appuya sur l'interrupteur, se cogna dans un mur, un sac à dos puis la table basse. Elle retrouva ensuite les bras du rappeur et débuta son récit, plus elle avançait, plus elle se libérait. La jeune femme découvrait une nouvelle facette d'elle-même, son côté sensible. Trop souvent enfouis.


Valentine : - Qu'est ce que tu fou Azz ! Tu ne vas pas me demander en mariage quand même !

Azzedine : - Quoi ? Mais t'es malade ! C'est juste que cette position est plus confortable, c'est tout.

Valentine soupira de soulagement et son corps commença à se relâcher.

Azzedine : - Non, je veux t'expliquer, il y a des choses que tu ne comprends pas, je t'aime Val, sincèrement, et chaque étape qu'on a passé ensemble n'est en rien une erreur pour moi. Mais j'aurais voulu que tu m'en parles et pas que tu prennes la fuite, et la fuite ce n'est pas dans ton caractère. Je ne comprends pas pourquoi tu as préféré y aller avec ta copine plutôt qu'avec moi. C'était ma place, c'est moi qui devais caresser tes mains, te parler doucement, te faire rire. C'était mon rôle et j'ai l'impression que tu l'as attribué à quelqu'un d'autre. Que tu ne veuilles pas d'enfant, c'est quelque chose qui peut s'entendre, mais que tu m'évince comme ça de quelque chose qui concerne notre couple et seulement notre couple pour moi, c'est inconcevable. Tu dis que tu n'es pas mon pantin, mais ça marche dans les deux sens, tu ne peux pas être avec moi dans les bons moments et m'oublier dans les mauvais. On est ensembles, quoi qu'il arrive et on bravera les tempêtes, ensembles, main dans la main. On peut tout affronter parce qu'on est plus fort que le reste du monde. Parce qu'il y a cette chose précieuse entre nous. Parce que je t'aime et parce que tu m'aimes.

Valentine : - Ça veut dire quoi ?

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