L'amour de la pizza (1) ✔

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Raffael

Mardi 25 Septembre 2018

Lille (France), dans l'appartement des garçons.


Un soupir s'échappe de mes lèvres alors que je pousse la porte d'entrée avec mes pieds. Je la brutalise d'un coup sec et gonfle les joues pour retenir une grossièreté. Cette dernière s'entrechoque dans ma tête, elle hurle dans mes oreilles, mais se bloque dans mes cordes vocales. Je suis énervé, terriblement. Je viens de passer une journée de merde, si bien que j'ai envie de me recoucher pour tout oublier, là tout de suite.

Je laisse tomber mon sac près du porte-manteau et accroche le mien sur ce dernier. Mon ventre grogne tout comme ma conscience. Il se contracte, tout comme le peu de muscles que je possède, et me fait grincer des dents. C'est douloureux. Vraiment. Je pose une main contre mon estomac pendant qu'il continue de grouiller, il râle parce que je n'ai rien avalé depuis hier. Mais ce n'est pas ma faute. Enfin si dans un sens, ou alors c'est cette misérable loi de Murphy qui n'a cessé de me poursuivre toute la sainte journée.

Pour commencer, je n'aurais jamais dû me réveiller ce matin. Je regrette d'être venu en cours aujourd'hui. J'aurais dû rester enroulé dans mes draps, dans mon nuage. Et pour cause, chaque minute de cette putain de journée a été un véritable enfer, j'aurais préféré m'enterrer six pieds sous terre plutôt que de la vivre.

Premièrement : je me suis réveillé en retard. Ô joie ! Mon téléphone n'a pas sonné à l'heure souhaitée. J'appuie souvent sur Snooze pour reposer encore mes yeux mais là, il n'a même pas fonctionné. Je me suis levé alors en sursaut, et me suis dirigé en vitesse vers mon armoire. Dans mon chemin, je me suis cogné le petit orteil contre le coin de mon lit. Douleur absolue. J'ai cru que j'allais pleurer tellement j'avais mal, mais j'ai continué ma petite route en clopinant jusqu'à ma penderie. J'ai attrapé des vêtements au hasard dans le noir, je me suis fringué tellement vite que je n'ai pas vu que j'ai mis le mauvais caleçon, celui qui me tire les poils de l'entrejambe en fin de journée. Evidemment, je m'en suis uniquement rendu compte en cours quand ça a commencé à me gratter. Je ne sais même pas pourquoi je ne l'ai pas jeté.

Deuxièmement, j'ai filé sans prendre de petit-déjeuner. Grossière erreur. Parce que d'un : mon ventre n'a pas cessé de gronder en amphi, ce qui a attiré l'attention sur moi, et de deux : j'ai oublié mon portefeuille comme un gros con. Ce même portefeuille que j'ai laissé sur mon bureau, celui même où se trouve mes sous et ma carte étudiante. Je n'ai donc pas pu manger au restaurant universitaire, ni à la boulangerie du coin pour me rassasier. Je n'ai pas non plus pu retourner chez moi comme je n'avais qu'une heure de pause déjeuner, ni appeler à la rescousse Maxim puisque ce veinard n'avait pas cours ce matin. J'ai donc passé mes quatre heures de management avec un estomac vide, et n'avais qu'une seule hâte : que cette journée se termine une bonne fois pour toutes.

Et pour finir, quand j'ai pris le métro tout à l'heure, j'ai failli m'embrouiller avec un mec qui faisait chier tout le monde avec son accordéon. J'étais tellement de mauvais poil que j'ai eu envie de lui faire bouffer son instrument de musique. Ce qui est plutôt étonnant de ma part puisque je suis de nature pacifiste, un artiste dans l'âme qui plus est, mais il faut dire qu'entre mes boules qui me grattent et mon ventre qui crie famine, je n'étais guère enclin à être gentil. J'ai dû prendre sur moi pendant tout le trajet en le fixant méchamment.

C'est donc plus en colère que jamais que je décide de prendre une douche bien chaude. Lorsque l'eau tiède entre en contact avec mes muscles endoloris, je me détends enfin. Je soupire d'aise en rejetant ma tête en arrière, humidifiant par ce biais mon visage fatigué.

Un peu plus détendu, je sors de la douche, enveloppé d'une serviette à la taille et marque un arrêt devant le miroir pour m'examiner amplement. Je ressemble à un zombi.

NOUS Au-delà des enviesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant