NOUS Au-delà des envies

Les liens du sang (1) ✔

Chrystal.

Lundi 22 Octobre 2018

Lille (France), dans le studio étudiant de Chrys.

Je profite du jet d'eau chaude pour apaiser la tension que j'ai ressenti plus tôt dans la matinée.

Je me suis réveillée avec une drôle de sensation dans le ventre, mais pas uniquement. Je ressens encore ses bras chauds autour de moi, son corps nu pressé contre le mien, son début d'érection contre l'arrière de ma cuisse, mais surtout sa façon de se blottir contre moi. Dans une confiance absolue. Ça m'a mis un coup au cœur. Je ne m'attendais pas à m'endormir dans ses bras, ni qu'il me câline dans son sommeil. C'était si réconfortant que ça m'a effrayée sur le coup. Parce que ça s'est fait naturellement, sans qu'on ne puisse y faire grand-chose.

On dit souvent que ce qu'on fait inconsciemment n'est que l'expression de nos désirs les plus secrets. Les plus enfouis. Mais ce n'est pas le pire. Le fait d'avoir dormi l'un contre l'autre a créé un autre lien, beaucoup plus profond que notre relation actuelle, et c'est bien ce qui m'inquiète.

Je coupe l'eau quand j'ai fini de me rincer, et sors de la douche en enfilant mon peignoir. Seulement, un bruit assourdissant dans le couloir me fait tiquer. Je me demande ce que Raffael fabrique dans ma chambre. Ce n'est pas trop le moment de faire autant de vacarme chez moi, mes voisins dorment sûrement à cette heure-ci. D'un soupir, j'enroule mes cheveux dans une serviette propre, puis je m'empresse de me diriger vers la sortie pour supplier Raffael de faire moins de bruit, mais je ne m'attendais pas à voir mon frère dans le couloir. Absolument pas. Mais qu'est-ce qu'il fiche ici ?

Il est censé venir me chercher aux alentours de neuf heures pour qu'on aille ensuite rendre visite à ma mère à l'hôpital. Je ne saisis pas pour quelle raison il s'est ramené plus tôt que prévu, peut-être une sorte d'empressement. Toutefois, je comprends mieux pourquoi il y a autant de raffuts dans mon studio.

Medhi et Raffael dans la même pièce, ça ne fait pas bon ménage. Pas vraiment non. Et connaissant les deux hommes, ça risque d'exploser. Plus que ça ne l'est déjà.

Je demeure interdite pendant que je fixe le dos robuste de Medhi. Il tremble d'une colère noire et les muscles de ses bras découverts sont contractés. Il dévisage méchamment Raffael, qui est complètement tétanisé face à la rage incompréhensible de mon frère. Ce dernier recule en montrant ses mains, signe qu'il n'a pas la moindre envie de se battre.

Je saisis vite la situation en deux-trois coups d'œil : Raff a ouvert Medhi sans savoir qui se cachait derrière, et mon frère ne s'attendait pas à voir un garçon répondre à ma place. Tout ce que je ne voulais pas est sur le point d'arriver. Je vais devoir régler ce problème au plus vite avant que ça ne dégénère, d'autant plus que Raffael vient de me remarquer et qu'il me lance un regard de détresse. Je m'écrie alors :

— Medhi ! Tu arrêtes ça tout de suite !

Je lui attrape le bras pour le tirer vers moi, mais il se raffermit à mon geste.

— Putain, c'est qui ce mec, Chrys ?! Je vais lui casser la gueule !

Il fait un pas vers Raffael pour mettre en action ses paroles, seulement ce dernier se réfugie dans la cuisine comme s'il avait le feu aux fesses. Enervée par l'attitude de mon frère, je le retiens de nouveau par le bras, cette fois-ci beaucoup plus fermement que mon ancienne prise. Il grommelle dans sa barbe alors que je plante mes ongles dans sa chair comme pour le faire réagir. Il sait très bien que j'ai horreur lorsqu'il joue les grands-frères protecteurs avec moi, je ne suis plus une petite fille. Et ça, je crois qu'il ne l'a pas encore assimilé.