Descente aux enfers (3)

1.1K 82 278
                                    

Média : Kygo - Stargazing

Je tape dans les mains d'Owen après avoir fini de chanter. Il éclate d'un grand rire alors que notre public nous acclame, puis il me prend directement dans ses bras. Heureusement que j'ai pensé à reposer ma guitare sur son socle avant d'aller le voir, sinon il l'aurait écrasé sur le coup. Je rigole tandis qu'il m'étouffe dans son étreinte, mais je suis content : notre compère a adoré la surprise que nous lui avons préparé, si bien que lorsque nous lui avons demandé de nous rejoindre sur scène après le premier morceau, il n'a pas du tout rechigné. Il est monté sous les ovations et a pris place devant son clavier, qu'il maîtrise beaucoup plus que moi.

Il faut dire que nous n'avons pas lésiné sur notre choix, optant pour les titres de l'un de ses DJ préférés, Kygo, que nous avons revisité à notre sauce, dans un mélange d'électro et de rock. Il a donc été extrêmement touché, pire que ça, il a failli pleurer comme un bébé devant Coline, son crush du moment, dès que j'ai chanté le refrain de Stargazing.

Et je serais toujours là, regardant les étoiles,

Je chercherai toujours, chercherai,

Chercherai l'amour.

J'arbore un énorme sourire quand il me lâche enfin. Ses yeux brillent de ces fameuses étoiles, il est à deux doigts de craquer sur scène, mais je ne lui tiens pas rigueur. Après tout, je suis bien placé pour concevoir qu'un homme ait tout à fait le droit de chialer sans pour autant passer pour un faible. On a beau dire qu'un mec ne pleure pas, il pleure autant qu'une femme. Parce qu'on est humain, parce qu'on est sensible, parce qu'on a tous des émotions, et qu'un jour ou l'autre, ces derniers doivent sortir, quelle que soit la manière.

Plus d'une fois, j'ai bien failli y passer. Je n'ai honte de dire que je sanglote jusqu'à ne plus avoir une seule goutte d'eau dans mon organisme, mais je déteste qu'on me voie dans cet état.

Comme tout le monde, d'ailleurs.

N'abandonne pas, pour moi.

Ne tombe pas, n'abandonne pas, pour l'amour.

Pour cacher ses larmes, Owen se jette dans les bras de Maxim. Ils s'esclaffent tous les deux avant qu'Enzo ne vienne les rejoindre. Je me tourne alors vers la salle que nous avons chauffée, de ces paroles qui n'étaient même pas les nôtres, de cette mélodie qui ne nous appartenait pas. Mais parfois, c'est bon de reprendre les chansons qui nous font vibrer, pour nous prouver à quel point nous n'avons pas encore dépassé nos limites, que nous sommes encore que des amateurs, que malgré nos propres musiques, nous aimons encore remettre quelques morceaux à notre goût. Nous sommes avant tout des fans, bien avant d'être des musiciens. Et c'est tout ce qui compte.

Je salue la foule qui continue de nous applaudir et de nous siffler. Les gens sont si déchaînés que je n'ai pas l'impression d'être dans un simple bar, nous sommes si nombreux que nous avons du mal à respirer et à y voir clair, et les lumières nous illuminent tellement qu'on se croirait dans une discothèque. J'ai du mal à croire que de simples reprises puissent faire autant de bruits, mais face à eux, face à ceux qui croient en moi, je me sens vivant. Heureux et passionné. Comme toujours lorsque je suis sous les projecteurs.

Et lorsque je les regarde, je sais alors pourquoi je me bats. Pour être moi, enfin moi. De laisser ces épreuves passées dans mon ombre et suivre cette lumière jusqu'au bout du tunnel, pour ensuite sortir de ce fossé que je me suis moi-même creusé. En émerger pour enfin respirer, et tracer mon propre chemin.

NOUS Au-delà des enviesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant