Eau de vie (1) ✔

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Chrystal

Samedi 29 Septembre 2018

Lille (France), dans le studio étudiant de Chrys.


Les cheveux encore imbibés de ma précédente douche, je m'active à trouver une tenue adéquate pour la fête de Perrine. Je passe en revue tous les vêtements qui sont suspendus dans ma penderie. Je décroche une longue robe bleue marine pour l'examiner sur toutes les coutures, avant de la remettre à sa place en grimaçant, puis je poursuis ma recherche en essayant d'ignorer la panique qui fait tambouriner mon cœur contre ma cage thoracique. Je n'ai absolument rien à me mettre ! Je ne sais même pas comment je suis censée m'habiller à la fête de Perrine, d'autant plus je dois y être dans une heure pour l'aider à tout préparer avec Adélaïde.

Je suis dans une mouise pas possible. Avec tout le travail que j'ai eu cette semaine, je n'ai pas eu le temps de m'acheter une tenue pour la soirée. Et pourtant, sur Lille, ce ne sont pas les boutiques qui manquent !

Je prends une profonde inspiration pour contrôler mes battements irréguliers. Je stresse pour ce soir. J'angoisse parce que je ne me sens pas du tout à l'aise dans ce genre de soirée. Je m'inquiète à l'idée de revoir Raffael. Je ne sais pas ce qui m'a pris pour accepter de venir à cette fête. D'habitude : je préfère rester chez moi à regarder des séries dans mon lit, mais j'ai craqué. Aussi étonnant que cela puisse paraître, j'ai agi sur un coup de tête. D'une spontanéité absolue. J'ai essayé de résister à cette attraction, de méditer à la perspective d'une soirée tranquille, mais non comme une imbécile, j'ai dit que je venais.

A cause de Raffael.

Il y avait une telle ardeur dans ses yeux. Le noir de ses pupilles avalait pratiquement le bleu de ses iris, n'en laissant qu'un trait fin céruléen. Et puis, il y avait aussi son sourire. Malicieux et enjôleur. Pour la première fois de ma vie, j'ai été hypnotisée par les lèvres d'un garçon. Fines, roses, elles ourlaient pour former ce rictus parfaitement ensorceleur, dévoilant de belles incisives presque translucides. Même ses cernes bleuis lui donnaient un certain charme, contrastant avec sa peau pâle et ses petites taches de rousseur.

En un éclair, j'ai vu son visage angélique se transformer, devenant aussi tentateur que ce maudit Lucifer. Son air juvénile, son attitude décontractée, son tempérament boudeur ont laissé place à quelque chose de plus captivant. Ce soir-là, sur ce canapé, il a changé. Ce que j'ai lu sur son facies m'a laissé sans voix.

Appétence.

Sensualité.

Assurance.

J'ai été troublée. Une immense confusion s'est mêlée dans mon esprit. Un énorme conflit interne entre mes devoirs et mes envies s'est déroulé. Et finalement, ce sont mes velléités qui l'ont remporté. Sur le moment, j'en avais terriblement envie. Je voulais venir à cette fête parce que j'aimais lire cette avidité dans son regard. Je me suis sentie désirée et ce que je souhaitais à cet instant c'était de lui plaire encore et encore, jusqu'à ce qu'il rampe vers moi.

Mais aujourd'hui, je suis en train de pester contre moi-même. Je regrette de ne pas avoir refusé, parce que je ne suis même plus sûre de ressentir ce sentiment à nouveau. Je me dis que je l'ai sûrement imaginé, et que j'ai été sans le moindre d'un doute charmée par ses sourires éloquents et craquants.

J'ai comme l'impression d'avoir été ensorcelée ; et maintenant que je ne suis plus près de lui et de son charme fou, je me rends compte à quel point mon attitude a été ridicule. L'embrasser sur la joue avant de partir ? C'était clairement un délire, une grosse bourde. Je l'ai compris une fois que je me suis trouvée dans cet ascenseur. Au vu de sa réaction pétrifiée, il n'a certainement rien saisi de la situation, et moi non plus d'ailleurs. Adélaïde a vu mon petit numéro de là où elle était, elle n'a pas arrêté de me harceler de questions sur la route, seulement je n'ai pas réussi à lui répondre.

NOUS Au-delà des enviesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant