Le grand départ (2)

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Média : Paramore - Sunday Bloody Sunday

Maman,

Je ne sais pas si tu m'entends, de là où tu es, mais j'aimerais que tu saches à quel point tu vas énormément me manquer. Tu as toujours été là pour moi, tu t'es toujours battue pour moi. Tu nous as supportés, moi et mes crises, moi et mes frères, et tu nous as amenés dans le droit chemin d'une facilité déconcertante et aussi d'une grande dextérité. Tu as eu tellement de force et de courage tout le long de ta vie que je m'en suis inspirée pour en tracer la mienne.

Tu n'as jamais baissé les bras, tu n'as jamais montré ta souffrance, quoi qu'il t'en coûte. Tu n'as jamais voulu qu'on s'occupe de toi pour la simple raison que ta maladie te tuait à petit feu.

Pour ça, je t'en ai voulue, c'est vrai. J'aurais aimé que tu me dises à quel point tu avais mal, à quel point tu avais peur de partir, mais tu ne l'as pas fait. Jamais.

Mais, à présent, je comprends mieux pourquoi.

Ce n'était pas de la fierté, ce n'était pas un simple courage. Non rien de tout cela. C'était de l'amour.

Tu ne voulais qu'on s'inquiète pour toi parce que tu nous aimais. Tu ne souhaitais pas nous confier au sujet de ta peine et de ta peur parce que tu nous chérissais, beaucoup plus que toi-même. Tu tenais absolument à ce qu'on poursuive notre destiné loin de toi parce que le plus important pour une mère est que son enfant connaisse le bonheur. Plus que tout au monde.

Un amour si désintéressé que le tien fait de toi la meilleure mère qui n'ait jamais existé. La femme la plus merveilleuse et courageuse que j'ai connue.

Et je suis heureuse d'avoir pu te connaitre, d'avoir pu être ta fille et en être ta plus grande fierté, tout comme mes frères et mon père que j'aime plus que tout. Mais, je suis triste, maman, parce que tu ne me serreras plus jamais dans tes bras, parce que je n'entendrai plus jamais le son de ta voix. Désormais, la seule chose que j'ai de toi, ce sont mes souvenirs, et j'ai tellement de choses à regretter que ce discours durerait des années !

Mais...

Je ne veux pas te dire adieu, maman. Je n'en ai pas la moindre envie. Je sais que tu seras toujours là, dans mon cœur, et j'écouterai toujours ce que tu as à me dire.

Tu me manques, maman, mais je t'aime très fort. Et même si tu es partie rejoindre mes arrière-grands-parents dans l'Au-delà, je ne cesserai jamais de t'aimer et de prendre exemple sur toi.

J'espère que de là-haut, tu me vois.

J'espère que je te rendrais toujours fière, comme moi je l'ai été envers toi.

Le discours que j'ai prononcé à la fin de la cérémonie reste profondément ancré dans ma mémoire. J'aurais aimé lui en dire plus, j'aurais aimé la savoir près de moi pendant que j'étais positionnée devant l'autel, seule face à tout ce monde. Mon monologue était parfois ponctué par mes pleurs et ma respiration tremblotante. Néanmoins, l'essentiel, c'est que je suis parvenue jusqu'au bout de ma lettre.

Une lettre que j'aurais tant aimé qu'elle lise avant de partir.

J'y ai mis toute mon âme en dépit de cette angoisse d'être écoutée de tous, sauf de la principale concernée. J'ai pensé à maman de toutes mes forces, et par moment, j'ai eu cette sensation qu'elle se tenait à mes côtés, le sourire aux lèvres. Un semblant d'espoir s'est accroché dans mes mots, même si au fond je suis toujours autant désespérée d'avoir perdu ma mère.

Elle me manquera tous les jours, même lorsque je deviendrai mère à mon tour.

J'observe cette photo d'elle parmi tous ces chandelles et ces bouquets de fleurs. Elle a été soigneusement encadrée et déposée sur cette table de recueillement ; quelques mots ont été griffonnés sur ce calepin qui nous ait destinés et nous sommes loin des simples condoléances dont j'ai eu le droit tout à l'heure, juste après la cérémonie et aussi lorsqu'on déposait son cercueil dans cette pierre tombale, ornée de fleurs orangées devant cet écriteau qu'on lui a fait graver. Rien que pour elle.

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