Toxique (1)

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Raffael.

Dans le passé.

Je n'ai pas toujours été un lâche, c'est un fait. Il y a eu un moment dans ma vie où je me suis battu. Longuement, férocement. J'étais prêt à tout, j'étais prêt à me perdre définitivement pour son amour. Je l'aimais tellement, c'était fou. Le regard qu'il portait sur moi me rendait à chaque fois nerveux, je me sentais redevable vis-à-vis de lui. Il était si important pour moi que j'ai fini par m'oublier. A oublier ce que j'étais et qui j'étais, à oublier ce qui me faisait vibrer. Tout.

Son jugement m'importait. Son éloquence me passionnait. Sa façon de penser, sa manière d'envisager les choses étaient cruellement capitales pour moi. Je me sentais mal dès qu'il me faisait des reproches, alors je faisais tout pour changer. Pour lui, pour qu'il sache à quel point j'étais fou amoureux de lui. Parce que si je le perdais, je me perdais, moi aussi.

Mais, ce n'est pas ça l'amour, si ? On ne change pas pour l'autre, on ne doit surtout pas s'aliéner, encore moins s'aveugler au nom de ce sentiment intense.

Non, je ne l'ai compris que plus tard. Alex était toxique pour moi. Notre relation devenait toxique. Pourtant, ça n'a pas toujours été comme ça. Du moins, elle ne m'a pas tout de suite grignoté jusqu'à la moelle. Corps et âme.

Au début, il attirait juste ma curiosité, puis ça a été bien plus fort que ça. Plus qu'un simple désir d'être proche de lui.

Comment a-t-elle commencé, alors ?

Elle a démarré bien avant notre histoire, bien avant que je comprenne ma bisexualité.

J'ai rencontré Alex à l'approche de mes quinze ans, par le biais de Maxim. Il l'a connu à l'une de ses colonies de vacances, ils ont vite sympathisé, même après la fin de l'été. Ils ont continué de discuter par texto, ils se voyaient quelquefois le week-end, mais à l'époque j'en entendais juste parler. Je ne savais même pas qu'il habitait dans le coin, à quelques lieux de mon village. Je n'ai pu que mettre un visage sur cette personne à l'anniversaire de mon meilleur ami.

Alex est apparu comme une fleur, alors même qu'on dégustait le gâteau. La mère de Max est venue l'ouvrir et il est entré dans un accoutrement pour le moins surprenant. Jeans noir, tee-shirt basané, veste en cuir, tout était sombre chez ce type. Mais ce n'était pas tout : il avait un piercing accroché à son arcade sourcilière, un autre sur sa lèvre inférieure et quelques trous sur ses oreilles. De l'encre noire apparaissait même sur son cou, si grosse qu'il ne pouvait pas la dissimuler. Son tatouage représentait un faucon qui déployait ses ailes, le détail de ses plumes était tantôt prodigieux, tantôt ahurissant. Tout l'espace qu'il prenait, toute cette peau sur lequel le dessin était étalé, m'impressionnait quelque part. Il a dû vraiment en chier pour avoir un résultat aussi joli sur son cou, comme toutes les autres esquisses sur le reste de sa chair.

Je suis resté à le regarder, à la fois surpris et admiratif. Alex était un homme incroyablement beau, il était même plus âgé que nous, trois ans de plus pour être exact, ce qui ne faisait qu'attiser cette étrange curiosité à son égard. Qui était vraiment cette personne dont me parlait à tout bout de champ mon meilleur ami ?

J'étais décidé d'apprendre à le connaitre.

Quand il est arrivé à ma hauteur, je me suis levé pour échanger une poignée de main, mais il a préféré me faire la bise. Sa proximité m'a vraiment chamboulé, son contact m'a limite électrifié. Je suis resté à le dévisager d'un air perdu alors que Max faisait les présentations, le sourire aux lèvres :

- Alex, Raffael. Ralf, Alexandre.

- Je préfère Alex, le coupa ce dernier avant de se justifier sous mon regard penaud. J'ai horreur de mon prénom, en revanche, j'aime bien le tien. Ça me fait penser à l'archange. Le guérisseur, je crois.

NOUS Au-delà des enviesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant