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Raffael

Dimanche 21 Octobre 2018

Lille (France), à la gare Lille-Europe.


Je repense à mon séjour. A cette misérable insomnie qui m'a parcouru la nuit passée. J'ai tout fait pour éviter ma chambre, ces deux derniers jours, mais je n'ai pas pu le faire à l'heure du coucher. Alors je n'ai pas dormi, laissant mes pensées divaguer tout autour de moi. Dans le noir absolu, je n'ai pas su retenir mes idées noires, encore moins son fantôme planer au-dessus de ma tête. J'ai songé à bouger les meubles de place, histoire de me recréer de nouveaux souvenirs. Mais rien n'y fait.

Quand je vois ma chambre d'adolescent, je le revois lui.

J'avais beau me retourner dans tous les sens, je le revoyais sans cesse. A côté, telle une ombre, me guettant dans les moindres recoins. Elle se déplaçait à chacun de mes mouvements, réapparaissait sous mes paupières, jusqu'à m'en faire perdre la raison. Chaque perception dans le noir me donnait des sueurs froides, me comprimait atrocement la cage thoracique. J'ai eu du mal à respirer tellement je m'asphyxiais. J'ai même cru que j'allais céder à la panique, mais tout ça, c'était dans ma tête. Uniquement dans ma tête, même si j'ai eu mal. Très mal. Mais j'ai tenu bon, ou presque.

Je déteste ma chambre, à ce qu'il en a fait. Ça a beau être de magnifiques souvenirs, seulement aujourd'hui quand j'y repense, mon cœur se met à l'envers, si bien que ça me donne la nausée. J'ai cru que l'obscurité me faisait perdre la boule alors j'ai allumé la lumière, mais même avec une once de lueur, je n'étais pas tranquille. Je ne l'ai jamais été de toute façon.

Pourtant, j'ai passé un agréable séjour en compagnie de ma mère et de ma sœur, mais il a fallu que mes démons gâchent tout. Encore une fois. J'ai beau dire avoir tout oublié, ce mensonge se voit tellement sur mes mots qu'il s'en imprègne jusque dans ma peau. A m'en brûler tout entier, au plus profond de moi-même. Se répercutant jusqu'à mon âme, perdue qui plus est. Et cruellement vide, si vide !

C'est dur de faire semblant, alors que ça va toujours aussi mal.

Je soupire en fermant les yeux. Tout ça est derrière moi à présent, je dois apprendre à vivre avec. A essayer d'effacer ce qui ne peut être oublié. A dire « tout va bien » alors que tout s'effondre autour de moi. A ne pas songer à tout ce qui pourrait me tuer. Sourire alors qu'intérieurement je chiale. Rester immobile, indifférent, tandis que je tremble comme une feuille. Faire comme si j'étais fort, alors qu'en réalité je suis faible.

C'est dur de faire semblant, mais à force, on s'y fait.

Les mains moites, je sélectionne un titre des The Black Keys pour me remettre d'aplomb. La mélodie énergisante me fait automatiquement dresser les poils sur ma nuque, comme à chaque fois que je distingue le son amplifié d'une guitare électrique. Un léger sourire ourle mes lèvres au moment du refrain, bercé par la voix rauque du chanteur et de ses paroles encourageantes. Je souffle de bien-être en laissant cette chanson envahir mon crâne, l'air se propage dans tout mon corps, me hérisse les poils de mes bras et me fait pianoter les doigts contre mes cuisses, suivant le rythme qu'elle m'impose. Je me sens mieux. Beaucoup mieux.

La musique est le seul moyen de me redonner un coup de pouce. Mon unique thérapie qui fait retomber la pression. Si j'écris autant que je compose, c'est pour me libérer. De me livrer par des sons mélancoliques, par des mots traduisant mes maux. Ma main me démange depuis ce week-end. J'ai envie de me poser sur mon lit, de gratter les cordes sensible de la vieille guitare de mon paternel, et de produire des notes, celles qui interprètent mon humeur de l'instant présent. Solitude, dépression, découragement mais aussi motivation, joie et amusement. Tout y passe, une fois que je me noie dans ma passion.

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