Sentiments contraires (1)

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Raffael

Mardi 13 Novembre 2018.

Lille (France), chez Adélaïde.

Je finis par lâcher Chrystal, le sourire aux lèvres. Je suis content de la revoir, surtout après ces jours qui m'ont paru interminables. Comme toutes ces nuits où je n'ai absolument pas dormi. J'ai essayé de m'en faire une raison, mais sans ma petite étoile, j'ai échoué. A chaque fois que je fermais les yeux, je la revoyais en pleurs et ça me tuait. Le fait de revoir Chrystal me fait un bien fou. Je ne pensais pas qu'elle allait me prendre dans ses bras, mais dans un sens, ça ne me surprend pas.

Avec la gueule de con que je me trimbale, j'ai dû lui faire pitié. Je sais qu'elle a agi par pure compassion, c'est Chrys, elle est comme ça avec tout le monde. Elle ne peut pas s'empêcher de réconforter les âmes perdues telles que moi, de les aider quoi qu'il lui en coûte, de se perdre elle-même dans notre douleur. Elle compatit si intensément qu'elle ne se rend pas compte qu'elle peut chuter, elle aussi. Pour cette raison, j'aurais voulu la repousser. Je ne mérite même pas toute sa dévotion, mais j'en avais terriblement besoin. Alors, je me suis laissé envahir par sa chaleur.

Ma mélancolie, ma culpabilité et mes inquiétudes se sont envolées, laissant place à une profonde sérénité et plénitude. Et même de l'entrain. Je ne me suis jamais senti aussi bien dans les bras de quelqu'un, même Emie ne parvient pas à tout m'arracher. Pas tout à la fois. Je ne sais pas comment Chrystal a fait, son câlin m'a en quelque sorte mis un baume au cœur. Je lui ai donc rendu la pareille. J'étais tellement reconnaissant envers elle que je lui ai fait un bisou sur le front, aussi simplement que cela. J'espère ne pas avoir trop enfreint ses règles vu sa surprise, mais au final elle ne m'a rien dit, donc j'imagine que ça passe. Même le fait que je lui avoué qu'elle m'a manqué, parce que c'est vrai : ça m'a fait bizarre de ne pas la voir ces trois derniers jours.

Chrystal me lance un drôle de regard alors que je me sépare d'elle, mais mon sourire semble l'adoucir.

- Tu vas bien ?

- Bien sûr, Raff, mais c'est à moi de poser la question.

Elle me jette un regard inquiet, je lâche un rire amer. J'ai vraiment une tronche de cake, aujourd'hui, mes insomnies comme mes cours n'arrangent en rien mes traits tirés par la fatigue. Je sens que mon corps n'en peut plus de mes agitations, celles qui m'empêchent de fermer l'œil au moins une seule fois et malgré mes paupières lourdes, j'arrive à les garder ouverts.

Ce qui est un grand exploit.

- Ne t'en fais pas pour moi, je viens de sortir des cours donc forcément, je suis crevé. Mais à part ça, tout va bien.

Elle pousse un long soupir et secoue la tête.

- Arrête de me mentir, je vois bien que tu n'as pas le moral. Rien qu'à ta tête, on arrive à le deviner. De plus qu'Emie m'a tout raconté pour samedi donc je t'en prie, ne me prends pas pour une idiote. Est-ce que tu dors au moins ?

Je grimace en voyant qu'elle a tout compris. En même temps, je ne peux plus me cacher avec toute cette merde qui me colle à la peau. Je lui avoue alors :

- Pas vraiment, mais j'ai l'habitude en ce moment.

- Raffael...

- On peut rentrer ? Je commence à me les geler dehors, pas toi ?

Je l'encourage d'un petit sourire auquel elle me répond en un clin d'œil. Je rentre dans la demeure de sa copine, la chaleur du foyer me réchauffe immédiatement les pattes. Quelle idée d'être sorti avec mon vieux sweat avec une fraicheur pareille, sérieux ? Je dois avoir les oreilles et le nez rouge avec mes conneries. Je souffle un peu sur mes mains avant de les frictionner entre elles, j'enlève mon sac pour le poser contre le mur et regarde l'entrée d'un œil distrait. Je repère plusieurs cadres accrochés sur le mur, reconnaît le visage d'Adélaïde parmi l'une d'entre elles mais je bute sur celui d'une fille qui ressemble trait pour trait à la grande amie de Chrystal. Je n'ai pas le temps de m'interroger sur le lien qui unie les deux femmes puisque ma petite louve répond à ma place :

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