Un gémissement inopiné trouble le silence de mes songes. Une fois, deux fois puis une troisième fois. Je lutte contre le sommeil. Mon étrange rêve se floute à ces sons plaintifs. Je quitte la prairie lumineuse où je pique-niquais avec ma famille pour me réveiller seule dans l'obscurité. Mon cœur se met à battre rapidement contre ma cage thoracique. Ai-je bien entendu ? C'étaient si brefs que je me demande si je ne les ai pas imaginés. C'est mon rêve. C'est sûrement ça.
Je me redresse d'un coude et attrape mon téléphone pour m'informer de l'horaire. Dix heures vingt-deux. C'est le matin et je n'ai dormi que quatre heures. Ce n'est pas assez. Je repose ma tête sur l'oreiller et ferme les paupières encore lourdes de sommeil. Mon corps s'engourdit à nouveau jusqu'à ce qu'une autre plainte retentisse dans mon dos. J'ouvre les yeux, paniquée, je me dégage soudainement des draps pour me tourner vers Raffael.
Ce dernier s'enroule péniblement dans la couverture, il donne quelques coups de pieds dans le vide et son visage endormi se tord dans une peine inconnue. Il fait un mauvais rêve, pas de doute là-dessus. Je ne réfléchis pas, je marche à quatre pattes sur le lit et monte à califourchon sur lui. Il s'agite toujours lorsque je plaque mes mains sur ses joues :
- Raffael ! je lui chuchote, réveille-toi !
Il gémit une nouvelle fois. Je pose alors mes doigts sur sa poitrine suintante pour le secouer. Il a le sommeil lourd. Très lourd. Si bien que mes secousses, aussi grandes soient-elles, ne suffisent pas à l'éveiller de sa torpeur. Il finit tout de même par ouvrir les yeux après plusieurs tentatives, je n'attends pas à ce qu'il angoisse en me dévisageant, je décide de le prendre directement dans mes bras. Il se met à hoqueter sous son souffle irrégulier pendant que je le berce contre moi.
Comme une maman poule, oui.
- Tu as fait un cauchemar, ce n'est rien. Calme-toi.
Je sens ses bras se refermer dans mon dos et sa tête s'enfouir entre mes seins. Je le laisse reprendre ses esprits, tout juste sorti de sa terreur nocturne. Je m'attends à ce qu'il pleure, comme me l'a averti Emilie au sujet des effets secondaires de la MDMA, mais il n'en est rien. Il tremble juste dans la panique. Je glisse mes doigts dans ses cheveux trempés de sueur et lui murmure à l'oreille :
- Chut, tout va bien. Tu es dans ton lit, chez toi, nulle part ailleurs.
Il se tranquillise au bout de plusieurs minutes. Sa respiration se régule, ses mains s'agrippent moins sur le tee-shirt que j'ai mis avant de dormir, mais il continue de se nicher sur ma poitrine, comme s'il s'en servait comme un oreiller. Ce constat me fait rire, il n'est en rien différent des hommes que j'ai connus mais de sa part, je trouve ça vraiment adorable. Je continue de caresser son cuir chevelu, j'ai l'impression qu'il n'y a que ça qui le détend, il a l'air d'aimer qu'on lui touche les cheveux. Il soupire. Son souffle chaud se répercute contre moi. Je frissonne. Il lève la tête vers moi pour me dévisager, j'en fais de même en abaissant le cou.
Je le vois très mal dans la pénombre de sa chambre. Malgré tout, un minuscule rayon de soleil est parvenu à s'infiltrer à un cran de ses rideaux, ce qui me permet de distinguer ses traits bien familiers. Il ne sourit pas, il ne pleure pas, il ne panique pas. Non, il ne fait que me regarder. Ça me déstabilise parce qu'il ne dit rien, comme s'il était devenu soudainement muet. Mais, au bout du compte, il n'a peut-être pas envie de parler, ou plutôt de m'en parler. Ça ne fait rien, je laisse couler. Ce n'est pas dans sa nature de se confier, Emilie me l'a dit, et je l'ai de maintes et maintes fois constaté.
Sans un mot, je m'écarte doucement de lui pour me coucher sur le dos. Il roule sur le côté pour me faire face et m'interroge du regard. Il veut encore un câlin. Je hoche à la tête à sa question muette et il se blottit contre moi. Il appuie sa tête sur mon sein droit et m'enroule la taille de son bras libre. Il remue la tête pour m'inciter à enfouir mes doigts dans sa tignasse, je m'exécute dans un petit sourire. Au bout de quelques minutes, je le sens s'endormir contre moi. Sa respiration régulière m'apaise, je suis épuisée, je finis aussi par m'assoupir.
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NOUS Au-delà des envies
RomanceLorsque les envies se mêlent à la passion. Raffael, chanteur d'un groupe de Rock amateur, va faire une rencontre étonnante qui va bouleverser son existence. Au même moment, Chrystal, étudiante en école de danse, ne se doute pas un seul instant que s...