Jour 629 - 1

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Le lundi matin, les élèves des deux pelotons embarquèrent sans armes dans des bus après s'être fait bander les yeux, et malgré leurs questions, aucunes réponses ne leurs furent données. Ils roulèrent ainsi un long moment dans un silence relatif jusqu'à ce que les véhicules s'immobilisent et coupent leurs moteurs. Les voix des deux chefs de pelotons se firent alors entendre pour toner à l'unisson.

— Vous pouvez retirer vos bandeaux !

Vincent porta les mains au nœud à l'arrière de sa tête et le défi avant de murmurer.

— Bordel de merde... Mais on est où, là ?

L'Adjudant Coller lui lança un sourire compatissant avant de répondre.

— Tu le sauras bien assez vite...

— Votre tête n'est pas de bon augure, Mon Adjudant...

— Je confirme...

Tournant la tête vers son voisin, le jeune homme vit Ramon aussi surpris que lui.

— On n'est pas loin de Rennes...

La bouche de Vincent s'entrouvrit, mais il ne trouva rien à répondre, et quand Ramon le secoua, le ramenant à la réalité, il se leva lentement de sa place pour descendre du véhicule. A l'extérieur, tous s'étaient rassemblés et spéculaient sur la tournure des évènements quand une berline vint rejoindre les autres véhicules. Le conducteur coupa le moteur puis alla ouvrir la porte arrière pour en laisser descendre le Général Drancy, souriante au possible, tandis que le Lieutenant Petit mettait tout le monde au garde-à-vous. Une fois qu'elle eut reçu le commandement et mis tout le monde au repos, elle prit la parole avec un ton d'amusement dans la voix.

— Ne soyez pas si décontenancez, jeune gens. Vous savez bien qu'une mission ne se déroule jamais comme prévu. En l'occurrence, la variable du scénario que vous ignoriez est que vos avions ont été attaqués avant d'avoir atteint le point de parachutage, vous obligeant accessoirement à devoir sauter bien avant le lieu prévu... C'est donc pour des raisons de sécurité que vous n'avez pas vos armes FARS avec vous. Elles vous seront donnés à un checkpoint sur les nouvelles cartes que vous allez recevoir.

Orton leva la main et la Générale lui donna la parole.

— D'autres éléments ont-ils changés, Générale ?

Un sourire énigmatique aux lèvres, celle-ci répondit évasivement.

— Peut-être... Vous le découvrirez à l'usage... En attendant, certains d'entre vous sont considérez comme morts avant, pendant ou après le saut, et d'autres prisonniers. Ceux-ci seront ramenés au camps et mis en détention. Libre aux valides d'essayer de les libérer pendant leur infiltration. Les morts compenseront par des tests écrits et de brèves évaluations pratiques.

Terrifié, Vincent leva la main à son tour.

— Oui Mordu ?

— Comment saurons-nous qui est mort ou blessé ?

L'idée qu'il ait été intentionnellement sorti de l'exercice venait de lui traverser l'esprit et le terrifiait.

— Par tirage au sort.

Le jeune homme serra les dents. Cette réponse ne valait pas mieux. Chaque membre du personnel tendit un sac en tissu noir devant lui tandis que l'Officier Général reprenait.

— Nous avons là assez de boules pour chacun de vous. Les rouges sont prisonniers. Si un R orne la boule en plus, il est blessé. Une boule noire signifie que vous êtes mort, et une boule blanche que vous avez encore la possibilité d'exécuter la mission. Je juge utile et pertinent de préciser que ce sont vos concurrents directs qui ont choisi combien il y aurait de blessés, de morts et de captifs parmi vous... Maintenant, venez piocher !

Les deux pelotons se mirent spontanément à faire la queue pour aller piocher, révélant au fur et à mesure leurs statuts, et Vincent glissa une main tremblante dans le sac qui lui était présenté. Fermant les yeux en retenant sa respiration, il remonta la boule, tourna la main vers le haut, écarta les doigts puis ouvrit de nouveaux les yeux avant de soupirer de soulagement. Il avait tiré une boule blanche et savait maintenant que tout ce qu'il avait préparé ne tomberait pas à l'eau. Il partit ensuite rejoindre ses camarades pour faire le point de la situation jusqu'à ce que le dernier ait pioché. Le verdict était sans appel, seul un tiers des personnels étaient encore en état de mener la mission à son terme. Par chance, sa « garde royale » était de la partie. Manque de chance, Sylvain Orton aussi.

— Je vous laisse une heure pour réévaluer les paquetages de tout un chacun et vous sauver. D'ici-là, une patrouille viendra embarquer les boules rouges et noires, et raflera toutes les boules blanches restantes. Top chrono.

Vincent attrapa Orton et cria à la cantonade.

— Souvenez-vous de la liste A que nous vous avons transmis. Récupérez-en autant que possible, dans cinquante minutes on décolle. Toi, viens avec moi !

Les deux hommes s'éloignèrent de plus de dix mètres avant qu'Orton ne l'oblige à le lâcher.

— Qu'est-ce que tu me veux ?

— Ta collaboration pleine et entière !

— Je m'y suis déjà engagé.

— Engages-toi y de nouveau alors !

Orton le fusilla du regard avant de répondre.

— Mon avenir me semble plus important que la rivalité non-constructive, ça te va comme réponse ? Et pour ne pas me saborder moi-même, je dois m'assurer que tout le monde réussisse l'examen, même toi.

— Bien, alors je suis rassuré. J'ai un plan, et toi ?

— Moi aussi.

— Super, alors nous pourrons en parler en chemin pour tout faire coïncider, qu'en penses-tu ?

Sylvain grinça des dents.

— Il se peut qu'il y ait du bon des deux côtés...

Vincent lui sourit avant de répondre.

— Je sais que ça te coute alors...

Il tendit sa main devant lui et ajouta.

— Amis ?

Orton observa la main avant de fusiller Mordu du regard.

— Associés.

— Ca me va.

Sans un mot, Sylvain serra la main tendu avant de reprendre.

— Maintenant, occupons-nous de nos sacs !

Moins d'une heure plus tard et en possession de cartes mises à jour pour les ravitaillements en vivres et en armement, équipés pour certains de pistolets automatiques de sécurité et de transmissions, les « survivants » prirent la route en courant tandis qu'au loin les véhicules de la patrouille militaire se devinaient en approche rapide.


Comment J'Ai Épousé Mon Commandant d'UnitéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant