Jour 632 - 5

280 23 2
                                    

Les cinq détenus avaient pris possession de l'espace en un temps minime dans un silence oppressant, Sylvain lançant de temps à autre un sourire furieux à Vincent pour continuer à lui signifier son désaccord avec la reddition que celui-ci avait tacitement ordonné.

Depuis la petite lucarne laissant filtrer un peu la lumière du jour, ils avaient pu voir la nuit tomber et s'étaient sorti des rations de combat qu'ils avaient mangées chaudes après avoir ouvert le carreau pour laisser la fumée s'échapper, avant de s'emparer de quoi dormir et de s'installer aussi confortablement que possible pour la nuit. Ils étaient là, allongés à même le béton, enroulés dans les draps et les couvertures, dans le noir et le silence, quand un des captifs brisa le silence.

— Orton, sérieusement, au lieux de faire la gueule, tu ne pourrais pas écouter ce que Mordu peut avoir à dire ? Moi qui croyais que tu avais changé...

Piqué au vif, celui-ci marmonna quelque chose avant de se racler la gorge.

— OK, je t'écoute...

Un silence s'installa, et Sylvain reprit.

— Oh, Mordu ? Tu dors ?

— Non...

— Bah alors pourquoi tu ne réponds pas ?

— Tu veux que je réponde quoi ? J'ai fait ce que j'avais à faire. Si on avait repris le combat, on aurait tous fini éliminés par le FARS... Là, on a une chance de s'évader. Même si je ne sais pas encore comment... En tout cas on a un avantage tactique sur eux.

Celui qui avait initié la discussion demanda lequel, et Vincent reprit.

— Ils vont s'attendre à ce que les autres viennent essayer de nous sortir d'ici, donc ils vont rester en alerte et se fatiguer à attendre des gens déjà exfiltrer quand nous, nous allons profiter des rations, de la flotte et du sommeil réparateur. Quand nous choisirons de nous évader, nous serons frais et dispos, alors qu'eux pas. Ça fait une sacrée différence.

— Mais eux auront des armes.

— Et nous leur prendrons. Le plus important reste de tenir le cap lors des interrogatoires. Ce qui devrait être d'autant plus facile qu'ils n'ont pas été assez malins pour nous séparer.

Sylvain se redressa et se saisit d'une des lampes torches qu'ils avaient trouvé pour l'allumer, avant de sortir son paquet de cigarettes et d'en proposer à tout le monde en demandant.

— Il y a des choses qui vous font peur ? Pour les interrogatoires, je veux dire... Moi, ce serait qu'ils s'en prennent à vous. Si j'ai mal, je serre les dents, mais si vous soufrés parce que je refuse de parler... Ça pourrait me faire craquer je crois...

Expirant sa première bouffée, Vincent répondit.

— Ils ne pourront jamais nous mutiler pour de vrai, rassures-toi. Mais je te comprends. Et vous autres.

Leurs trois camarades répondirent, et les réponses furent sensiblement les mêmes, peur de souffrir, d'être mutilé, ou d'être la cause de souffrances et de mutilations chez les autres.

— Et toi Vincent, de quoi t'as peur ?

Le jeune homme prit le temps de fumer puis d'expirer par le nez avant de répondre.

— Me faire crever les yeux...

Devant les regards dubitatifs de ses camarades, il jugea utile de préciser.

— Si nous venions à être capturer, les probabilités de rentrer à la maison existeront toujours, qu'importe qu'elles frôlent le zéro, et même amputés, nous reverrions nos familles. Mais aveugle... Ne pas voir grandir mon fils...

Sylvain opina avant d'ajouter.

— Et puis, difficile de s'évader une fois aveugle...

— Aussi, mais cul-de-jatte aussi ne te facilitera pas la tâche.

Les cinq codétenus rigolèrent avant que Vincent reprenne.

— Vous me prenez tous pour un fou, je le sais bien, mais dites-vous que si j'ai fait en sorte que tout aille si vite, c'est pour rentrer au plus vite voir ceux que j'aime une fois la mission accomplie. Rentrer au bercail pour qu'on retrouve tous nos proches, c'est ma seule et unique motivation. Alors cette nuit, reposons-nous, attendons de voir quel sort nous attend demain, et demain soir nous travaillerons à nous extraire d'ici, ok ?

Les quatre autres prisonniers acquiescèrent avant de tous se rallonger, puis Sylvain éteignit la lumière avant de murmurer à l'intention de Vincent.

— Tu ne vas pas dormir, pas vrai ?

— En effet.

— Tu réfléchis déjà à un plan d'action, c'est ça ?

— En fait, je crois que j'en ai déjà un. On en reparle demain soir, OK ?

— OK. Bonne nuit.

— A toi aussi.



Comment J'Ai Épousé Mon Commandant d'UnitéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant