Twins

Chapitre 7

-Allo?

-Hey comment tu vas ?

Entendre la voix d'Ani à travers le combiné me fait le plus grand bien. Je n'arrive toujours pas à réaliser que nous habitons maintenant à plus de 500 bornes de distances l'une de l'autre. J'ai encore l'impression qu'elle pourrait débarquer à tout moment, par la fenêtre de ma chambre.

-Et bien, je n'ai pas déménagé il y a quatre jours donc j'imagine que tout va pour le mieux, et toi ?

J'arrive à entendre le vent qui souffle à travers le micro du téléphone, signe qu'elle est dehors, comme à son habitude.

-Ça va, ça va, répondis-je brièvement en m'installant sur mon lit.

-Tu transpires la joie de vivre.

Je ricane et plonge ma tête sur mon oreiller.

-C'est juste complètement différent, j'ai un peu de mal à m'y faire, je crois.

-Tu m'étonnes, soupire-t-elle alors qu'un bruit de klaxon me viole les tympans.

-Où tu es au juste ?

-Je sors du lycée.

J'aimerais la féliciter pour y être allée, car je sais qu'elle n'a que sport et math le mercredi, et que par conséquent, elle ne s'y pointe pas souvent. Cependant elle ne me laisse pas le temps de lui répondre.

-D'ailleurs, si tu pouvais m'expliquer ce que tu as dit à Eleonor le dernier, je pourrai comprendre pourquoi elle me lance des regards lugubres dès que je la croise. 

-ça ne change pas tellement de d'habitude. 

Eleonor est depuis le collège aussi agréable qu'un pot de chambre. Ses regards noirs sont sa manière à elle de dire bonjour. 

Je lui raconte brièvement notre interaction, qui n'en fut pas vraiment une puisqu'elle a été la seule à parler. Puis change rapidement de sujet. J'ai décidé de couper un maximum les ponts avec ma vie d'avant, et Eleonor ne fait pas partie de ce qui me retient ou de ce que j'ai envie de me souvenir. 

Ani est un vrai moulin à paroles. Sa vie est un feuilleton télévisé, chose qu'on ne pourrait imaginer au vue de l'endroit où elle habite. Et pourtant, elle arrive à me tenir le crachoir pendant près de deux heures. J'ai toujours pris un plaisir fou à l'écouter. Ma vie plate tranchait avec la sienne, et j'aimais me projeter dans quelque chose d'autre, quelque chose de différent et bien plus interessant. 

***

Hier, je n'ai pas pris la peine de parler d'Isaac ou de Sam à Ani. Certes, ils s'étaient montrés d'une grande bienveillance en mangeant avec moi le premier jour. Mais c'était uniquement pour mon premier jour. Je ne m'attendais pas à ce qu'ils se placent devant moi en cours ou s'assaillent une nouvelle fois à ma table. Je n'ai rien à leur apporter, ma présence est silencieuse, ma compagnie peu agréable. Si Sam souhaitait se trouver une amie confidente qui l'accompagnerai en soirée et draguerai au centre commercial avec elle, ce n'était certainement pas moi. 

Et pourtant. 

Et pourtant ils ont agis à l'exact opposé de ce à quoi je m'attendais, me laissant désarmée.

-Celui avec les lunettes de soleil là-bas, c'est Peter Stone. Il est réputé pour ses soirées démesurées. Sa baraque fait trois fois la taille de la mienne, en même temps, ses parents sont les avocats les plus renommés de la ville. Tu es à côté de sa sœur en math, Emma.

Midi a sonné depuis une bonne demi-heure lorsque je finis mon assiette et attaque ma mousse au chocolat. Je n'aurai pas du être étonnée lorsqu'ils se sont installés à côté de moi pour manger puisqu'ils se sont assis au près de moi au chaque cours de la matinée. Or je peine encore à y croire . Est ce que c'est moi l'insociable ou les gens d'ici sont juste bien veillants ?