Chapitre 30

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Chris n'a pas oublié ce qu'il m'avait dit deux semaines plus tôt, au pied de ma porte d'entrée. En ce dernier jour de mars, l'insolent m'a prévenu il y a à peine une heure, qu'aujourd'hui se déroulerait notre première séance de sport. Il m'a informé qu'il serait à quinze heures précise devant chez moi, et m'a apporté pour seul argument que la brèche qu'annonce la météo entre cette dernière semaine de précipitation, et celle qui est à venir, est pour aujourd'hui. Je devrais le blâmer pour n'avoir, à aucun moment, demandé mon avis. Or je me tais puisqu'il n'a pas eu réellement à me convaincre, j'ai accepté presque immédiatement.

Mon désintérêt pour la longue après-midi monotone que je comptais passer enfermée chez moi, ainsi que ma minuscule envie de le voir, me poussent donc à être dehors, assise sur les quelques marches de mon perron, en tenue de sport. Bien que la pluie se soit arrêtée miraculeusement aujourd'hui, le vent frais, l'air lourd et le ciel gris ne donnent pas plus envie de sortir. Je descends mon bonnet sur mes oreilles, et me promets que s'il n'arrive pas dans cinq minutes, je l'étranglerai de mes propres mains. La facilité voudrait que je rentre au chaud et que j'attende qu'il toque à ma porte, mais cette dernière ne prend pas en compte le facteur parents indiscrets. De ce fait, le froid m'est préférable.

Une silhouette tout de noir vêtu se dessine au bout de la rue, et je souffle de soulagement. Chris traverse les derniers mètres qui nous séparent en courant. Je manque de m'évanouir en découvrant ses jambes et ses bras nus. Ce mec connait il le froid ?
Il n'est vêtu que d'un simple short et d'un tee-shirt moulant, un peu trop moulant. Je détourne le regard, les joues en feu, puis me pince les lèvres. Je me redresse, descends les petites marches sur lesquelles j'étais assise et le rejoint sur le trottoir. Ses cheveux noirs de jais, accordés au reste de sa tenue, lui tombent devant les yeux et il doit les relever pour me faire la bise. Lorsque je m'écarte, son regard se pose sur moi et m'analyse de haut en bas, sceptique.

—Il y a un problème ? 

—Nan c'est juste que... tu n'es pas un peu trop, disons, habillée ?

Je baisse les yeux sur mon legging, mon coupe-vent, mon sweat chaud, mon t-shirt à manches longues isotherme par dessous, mes chaussettes molletonnées, mes grosses chaussures de running, mon bonnet et mes gants. Juste le nécessaire en définitive.

—J'ai froid, moi.

Au bout d'un nombre incalculable de supplications, Chris réussit à me faire enlever mon coupe-vent, mon pull ainsi que mes gants. Je le menace de le tuer si j'attrape froid et il me reproche d'en être incapable. J'ai l'impression d'avoir émis beaucoup de menaces de mort depuis que j'ai emménagé ici, mais toutes se sont soldés par un simple constat de ma force de moineau et de mon incapacité à menacer qui que ce soit. C'est triste.

Ne sachant pas si nous allons discuter en courant ou non, j'ai emporté mes écouteurs et mon téléphone. Je les lui confie donc, afin d'enlever mon pull. Alors que je passe ma tête dans le coton, je l'entends rigoler. 

-Est ce que tu sais faire autre chose que de te foutre de ma gueule ?

Justin Bieber. 

Je comprends mieux.

-Ma sœur a la même playlist, et elle a huit ans.

Je lui arrache mes affaires des mains en grognant. J'inspecte mon cellulaire et constate que ma musique en cours est en effet Trust de Justin Bieber.

—Dommage que toi tu n'aies pas hérité d'un tant soit peu de goût musicaux.

—Elle écoute en boucle son vieux cd de la reine des neiges. J'estime valoir mieux que ça.

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