Chapitre 38

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Je me réveille étonnement de bonne humeur ce matin, alors que ma nuit a été écourtée. En effet, alors que je n'y étais même pas, le rencard d'Isaac et d'Anastasia d'hier soir m'a pourtant bouffé plusieurs heures de sommeil. Mercredi, la blonde a insisté pour que l'on se voie, malgré notre semaine chargée avec les examens, afin de, je cite, "lui trouver une tenue décente". Je lui ai répété que je n'étais pas la bonne personne en matière de relooking mais elle n'a rien voulu entendre et m'a réquisitionné pour l'après-midi. J'étais un peu réticente au départ, puisqu'il nous restait encore trois épreuves à passer, mais je me suis laissée tenter, lassée d'avoir depuis deux semaines la vie d'un étudiant en première année de médecine.

Nous avons donc arpenté les boutiques de la ville, passant par friperies, magasins de chaussures et accessoires en tout genre. J'ai accompagné Ana au coiffeur et n'ai pas pu refuser la manucure qu'elle m'a gentiment offerte, en même temps que la sienne. J'ai finalement été reconnaissante envers elle d'avoir eu l'audace de me sortir de ma grotte. Il y avait bien longtemps que je n'avais pas chanté à tue-tête dans une voiture menant à un grand centre commercial pour y dépenser plus que ce que le raisonnable débourserait. À bien y réfléchir, cela remonte à des mois avec Ani. Ce n'est qu'en rentrant chez moi que j'en ai pris conscience. Ces après midi aux centre villes de Promance alors qu'on sortait du collège étaient étrangement similaires à ma journée d'hier. Je pense beaucoup à elle en ce moment. Du plus petit détail à la plus longue anecdote, elle embaume mes journées sans être physiquement présente. Elle ne devrait pas. J'oublie trop souvent qu'elle aussi, elle m'a abandonnée.

Je m'étire avec la grasse d'un éléphant et sors de mon lit, un sourire collé au visage. Le même que j'arborais la veille. J'ai attendu de pied ferme le message d'Anastasia, m'empêchant de plonger dans les bras de Morphet. J'avais lutté de longues minutes pour qu'elle m'appelle sitôt rentrée, alors je n'allais certainement pas louper son coup de fil.
Comme promis, elle m'a confirmé vers 23h qu'elle était chez elle et j'ai sauté sur le petit symbole "téléphone" qui se dressait à côté de son prénom dans mes contacts. J'avoue m'être montrée très intrusive, lui demandant de tout m'expliquer dans les détails, du prix des cocktails jusqu'à l'issue de leur partie de bowling. Lorsqu'elle m'a assuré que tout s'était merveilleusement bien passé, un poids s'est envolé sous ma poitrine et j'ai pu souffler. Ce sont mes enfants. 

Ana n'a pas voulu raccrocher trop tard, souhaitant tout de même une bonne nuit de sommeil avec notre dernière épreuve du lendemain. Je l'ai donc laissé alors que minuit n'avait pas encore sonné. J'aurais moi aussi voulu m'endormir, mais c'était sans compter la boule d'excitation qui a vu le jour au creux de mon ventre. Le soulagement du rendez-vous, la fin des examens mélangés à la soirée chez Suzanne m'ont empêché de fermer l'œil. J'ai vite compris que ce n'était pas en me retournant dans tous les sens que j'allais trouver le sommeil, alors j'ai attrapé une nouvelle fois mon téléphone et ai défilé ma liste de contact. Je n'ai pas eu à attendre très longtemps, je savais qu'il ne dormait probablement pas. Au bout de deux sonneries, Isaac a répondu et nous avons passé les deux heures suivantes à parler, tantôt de lui, tantôt de moi, laissant libre au cours aux confessions que seule la nuit est capable d'avouer.

Je descends les marches quatre à quatre d'un pas léger et salue mes parents, me focalisant tout de même sur ma dernière épreuve d'histoire. Je ne suis pas une lumière dans cette matière mais je me débrouille toujours pour avoir la moyenne, alors honnêtement, je le sens bien. Un pain au chocolat et une bonne douche plus tard, je sors de ma maison les écouteurs vissés aux oreilles, au son de beige de yoke lore.

***

-Tu vas nous mettre en retard !

Je m'applique illico presto une couche de mascara et attrape un rouge à lèvres rouge vif. Ce n'est pas une couleur que je porte habituellement, mais elle s'accorde merveilleusement bien avec le petit crop top de la même teinte que j'ai sur le dos. Je cale mon téléphone dans mon décolleté, ayant toujours horreur des pochettes et rejoins mes parents dans l'entrée au pas de course.
Pour une fois, ce n'est pas à Sam ou Isaac de jouer le rôle du chauffeur. Mes parents vont dîner en ville avec leurs nouveaux amis. J'en ai donc profité pour leur demander de m'amener. Je peux enfin souffler lorsque j'entre dans la voiture. Il est 20h40 et mes parents ont rendez-vous dans vingt minutes, ce qui nous laisse que très peu de temps pour traverser une ville en pleine effervescence.

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