Chapitre 3

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Je ne pars pas en courant, au contraire, je pénètre dans un couloir. L'architecture est luxueuse et la décoration formelle, fort loin de ma petite école de musique plus toute jeune et au cachet incomparable. Bordel, arrête de penser à ça. 
Je n'écoute pas les signaux d'alerte de ma conscience et continue mon chemin, me baladant de classes en classes dans ce long couloir. Peu ont la porte ouverte, mis à part celle au bout. J'y vois la silhouette d'une jeune fille prête à jouer se dessiner. Mon visage blêmit en apercevant le bout de bois qu'elle tient dans les mains. Les miennes deviennent moites. 

-Intéressée ? me demande alors une dame passant par là le sourire aux lèvres. 

Cependant je suis incapable d'aligner le moindre mot alors que ce violon de malheur me perce les tympans. L'air devient étouffant. La mélodie s'accélère en même temps que mon rythme cardiaque. C'est un peu trop pour moi aujourd'hui. Alors je décide de faire ce que je fais le mieux, fuir, laissant un plan la pauvre dame.

***

J'arrive devant ma maison à dix-huit heures passée et m'apprête à ouvrir la porte lorsque j'entends une voix au loin. Je me retourne et plisse les yeux dans l'obscurité. J'aperçois à la lueur des réverbères, une silhouette traverser la rue. Cette dernière est au téléphone et parle horriblement fort. Je distingue à la tonalité de sa voix que c'est un garçon. Je l'observe s'énerver. Je ne réalise mon comportement de psychopathe que lorsqu'il atteint la maison et capte mon regard. Prise la main dans le sac. Je m'empresse d'enfoncer ma clé dans la serrure et pénètre à l'intérieur de la maison précipitamment en priant pour qu'il ne m'ait pas vu. 

-Enfin te voilà, tu en as mis du temps !

J'ai écoulé le reste de mon après-midi en écoutant les vagues s'écraser sur le sable froid et en jouissant des derniers rayons de soleil qui peu à peu ont laissé place à un sublime crépuscule orangé. J'en suis sortie calmée et plus sereine.

-Hey, contente de te revoir aussi maman.

Je prends soin d'enlever mes chaussures afin de ne pas salir la maison, et de donner une raison supplémentaire à ma mère de m'assassiner.

-Je n'arrive pas à croire que je suis assez vieille pour pouvoir dire ça, mais de mon temps, j'aurai adoré avoir un téléphone portable pour prévenir mes parents lorsque je rentrais tard. 

Je murmure de plates excuses et m'empresse de changer de sujet. Lorsque je monte dans ma chambre pour préparer mes affaires pour demain, je ne suis pas étonnée de voir ma mère se glisser dans la pièce Je milite pour trouver une tenue qui lui convienne et qui "fait assez habillée pour une rentrée". Je lui dis plusieurs fois que j'ai l'impression d'avoir de nouveau huit ans, mais elle ne cède pas et tient à rester avec moi pour faire mon sac.

-Tu devrais peut-être prendre de l'eau ? Imagine s'il n'y a pas de distributeur ou de fontaine. Tu devrais même en prendre plusieurs bouteilles, s'inquiète-t-elle en accourant déjà vers la cuisine

-Maman, je suis persuadée qu'ils ne laissent pas leurs élèves mourir de soif. T'en fais pas, tout se passera bien.

Je ne sais pas si c'est elle ou moi que j'essaye de convaincre. Elle me sourit, m'embrasse le haut du crâne et me souhaite bonne nuit.

***

La sonnerie de mon réveil me fait l'effet d'un coup de massue en pleine tête ce matin. J'ai mit un paquet de temps à chasser la boule d'anxiété au creux de mon ventre et à m'endormir. Je suis épuisée. Mes paupières se ferment toutes seules et je décide finalement d'éteindre cet appareil de malheur afin de dormir encore un peu.
Grave erreur.
Lorsque je rouvre les yeux, je m'aperçois que j'ai accumulé plus de vingt minutes de retard. Je bondis de mon lit et file à toute allure dans la salle de bain. Je me résigne à sauter le petit déjeuner et enfile à toute vitesse mes vêtements en me brossant les dents. En me coiffant, remarque que ma bosse a doublé de volume et est devenue toute rouge. Je n'ai pas le temps de rectifier tout ça avec du correcteur ou je ne sais quoi d'autre et me vois donc obliger de rester comme ça toute la journée. Je ne jette même pas un regard à ma trousse de maquillage et dévale les escaliers à toute vitesse mon bonnet, ma veste, et mon sac dans les mains. Mes parents sont déjà tous les deux attablés et m'observent attentivement débouler dans le séjour.

-Je suis à la bourre.

-Mange un petit truc avant de partir quand même.

- Pas le temps, bisous bonne journée ! Criais-je avant de claquer la porte.

Je cours dans la rue en priant pour que le bus ne soit pas en avance.
Par je ne sais quelle chance, ce dernier n'est pas encore parti lorsque je tourne dans la rue. Je m'affale sur le premier siège que je trouve et me glisse du côté fenêtre, essoufflée.
J'ai un rendez-vous avec la principale pendant ma première heure et je croise les doigts pour ne pas être en retard. Je n'ai pas le temps de regarder les maisons défiler que le bus s'arrête déjà. Je me faufile à l'extérieur et me fraye un chemin parmi la foule d'étudiants qui pénètrent dans le lycée. Columbia High School me voilà. 

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