Chapitre 53 - Retour dans l'obscurité

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        La journée arrivait à son terme, le soleil arrivait de l'autre côté de la chaîne des Monts du Dragon. Dans le cratère, Lenwë était toujours attaché à l'arbre mort. Il ne bougeait plus, ne réagissait plus à la lumière qui virait au rouge, toujours juste tenu par les chaînes retenant ses mains. Il n'avait plus aucune voix. Sa gorge le brûlait trop, et elle était douloureuse, sèche, et gonflée. Rien que déglutir le peu de salive qu'il avait était horriblement douloureux. Et il avait soif. Tellement soif. Et envie de fraîcheur. Il ne sentait même pas le sang chaud couler sur son corps meurtri. Il était cependant toujours conscient, ressentant cette douleur si horrible qui le paralysait et qui l'avait tant épuisé. C'est alors que le ciel se voila, un épais nuage passant et cachant le soleil. Il entendit alors des pas venir précipitamment vers lui, une voix qui semblait tellement lointaine qu'elle semblait portée par le vent. Il entendit les bruits de chaînes, sans comprendre qu'on le détachait, et il ne se sentit même pas tomber, soulevant un nuage de poussière. Et rapidement, ce ne fut plus qu'une obscurité salvatrice. Ce qu'il attendait tant. L'inconscience.

Gïlraen était toujours dans sa prison, attendant impatiemment. Cela faisait plusieurs heures qu'elle n'avait plus entendu les hurlements de Lenwë. Elle ne savait ce qu'il était advenu de lui, depuis qu'il fut emmené. Elle ne savait pas quel supplice lui était réservé. Mais les cris la hantait. Pourquoi hurlait-il ainsi, combien de temps cela avait-il duré ? Elle ne pourrait même pas dire depuis combien de temps elle restait dans le silence. Ce silence qui allait la rendre folle. Elle entendit alors des pas pressés venir vers sa cellule, et des ombres avancer dans le couloir, une lumière avançant dans l'obscurité. Son cœur se mit à battre à un tel rythme qu'elle se sentait mal à l'aise, et elle haletait. Le brasero dans sa cellule s'était éteint, par manque de combustible, et elle restait plongée dans le noir depuis longtemps déjà. C'est alors qu'elle entendit la grille s'ouvrir, voyant des massives silhouettes noires devant elle, et elle vit alors quelque chose être lancé. Elle entendit alors le bruit d'un corps tomber, le souffle coupé, ainsi qu'un gémissement coincé. Une des silhouettes s'approcha pour raviver le brasero, et dès que la torche qu'elle tenait raviva la flamme, son cœur s'arrêta de battre brutalement. Lenwë était étendu devant elle, le corps complètement meurtri, et il semblait évanouit. Elle reconnut alors les arghols qui refermaient la grille, et qui partaient, un rire grave résonnant dans les couloirs. Elle resta figée pendant un certain temps, avant de se jeter sur Lenwë en criant son nom, mais à peine avait-elle effleuré son corps qu'elle retira subitement sa main. Elle était pleine de sang. Ses yeux ne s'étaient pas encore tout à fait habitués à la lumière qui était revenue, mais elle vit alors l'état de son ami, et elle se sentit tomber à la renverse. Son corps entier, dos, thorax, bras, visage...tout était entièrement brûlé. La peau n'était plus, le peu qu'il restait était cloqué, elle avait comme fondu. Les brûlures étaient d'une profondeur qu'elle n'aurait jamais soupçonnée, et elle devina alors que même ses muscles et ses os avaient souffert. Elle peinait à respirer, et elle sentit alors l'odeur de la chair brûlée se propager. Elle se mit la main sur le nez, en fermant les yeux afin de refouler les larmes et les nombreux sentiments qui se bousculaient en elle. Tristesse, peine, haine et colère...ce mélange lui donnait mal au crâne et son estomac se nouait d'un seul coup. Elle s'approcha à nouveau de lui à quatre patte, l'interpellant. Elle n'entendait même pas de souffle venant de lui, ou même plus de gémissements. Il était immobile. Et alors qu'elle s'apprêtait à lui toucher les cheveux, une voix l'interrompit.

« Ne fais pas ça ! Recule. »

Elle n'eut pas le temps de réagir, elle vit une ombre se ruer sur lui pour ensuite se faufiler dans celle de Lenwë, et une lueur rougeâtre recouvrit alors son corps. Dark était de nouveau en train de tenter de le soigner. Elle resta silencieuse, la main toujours tendue au dessus du vide, observant les plaies. Sa vue était alors totalement habituée au retour de la lumière du feu, et elle vit alors la chair de Lenwë être comme noire, carbonisée. Elle eut un relent de l'odeur de la chair brûlée, qui la fit se reculer. Dark finit alors par ressortir de l'ombre, l'air choqué.

Le dernier elfe noirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant