Chapitre 55 - Au plus profond des ténèbres lumineuses

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        À son réveil, Lenwë vit d'abord très flou. C'est à peine si il pouvait distinguer ne serait-ce que les couleurs. En clignant des yeux, il finit par apercevoir comme des feux follets virevolter au dessus de lui. Des petites lumières jaunâtres luisaient et dansaient au dessus de son visage, c'était tout ce qu'il pouvait voir pour le moment. Il tenta de se relever, mais sa tête tournait autant qu'une toupie. Il se redressa un peu cependant, et se mit en position assise, avant d'être soudain prit d'une nausée fulgurante. Il s'empressa de mettre la main devant sa bouche, et toussa violemment, et en retirant sa main une fois la crise passée, il remarqua quelques petites gouttes de sang.

« Super...mais qu'est-ce qu'il se passe ? Quel est cet endroit... ? » Se demanda-t-il.

En regardant autours de lui, tandis qu'il voyait enfin normalement, il vit alors de nouveau ces espèces de petits feu follets. Mais ce n'était pas des esprits. Juste des petites boules lumineuses qui volaient au gré d'aucun vent. Il alla poser sa main sur le sol, mais une petite lumière attira son attention, et il baissa la tête.

« Des plantes ? »

Mais ces plantes aussi étaient étranges. C'était juste quelques tiges fine mais à l'apparence robuste poussant au creux de deux grandes feuilles, et la fleur n'était qu'une grosse boule blanche surplombant alors la tige, d'où partaient d'autres départs de fleurs. Lenwë mit son doigt dessus, et la sensation était un peu étrange, elle aussi. C'était comme si il ne touchait rien. Il voyait qu'il touchait la plante, et qu'elle pliait sous son doigt, mais il ne sentait pas la matière contre sa peau. D'un coup, il vit la fleur en question briller légèrement, plus de plus en plus. Une aura jaunâtre naissait autours de la fleur, et une boule de la même couleur s'envola alors au dessus de lui, rejoignant les autres. Lenwë comprit donc que ce qu'il avait prit pour des feux follets n'étaient autres que l'œuvre de cette plante. Mais en regardant plus loin, il vit qu'il était dans une immense plaine qui semble infinie, et qu'au sol, il y avait beaucoup de ces plantes, chacune étant écartée des autres. Le sol semble pourtant aussi sec qu'en plein désert. C'était juste de la roche, jonchée de quelques cailloux par-ci par là, d'une couleur à la fois verdâtre et jaunâtre.

« Bon sang...mais quel est cet endroit ? Comment suis-je arrivé là ?

Puis il se redressa d'un bond, venant de se souvenir des derniers mots qu'il avait entendu. Ceux du mage, pendant le rituel.

« Bon voyage dans le monde spirituel » avait-il dit.

Il est vrai qu'après ces mots, il ne se souvenait plus de rien. Que s'était-il passé ensuite ? Il tentait de se remémorer la chose, mais il ne voyait que du noir. Puis dans un sursaut, il regarda expressément autours de lui.

« Gïlraen ! Gïlraen, tu es là ? »

Il appela un moment, mais aucune réponse ne lui parvint. Puis, il tenta d'appeler Dark. Mais là aussi, il n'avait aucune réponse. Pour la première fois depuis longtemps, il sentit l'angoisse de la solitude resserrer son emprise sur sa gorge qui se nouait lentement. Il tenta de mettre machinalement sa main sur le pommeau de son épée, mais à sa grande surprise, il n'avait même pas son arme sur lui. Ni non arme. Il était dans sa tenue de bretteur. En même temps, si ce mage fou disait vrai, il n'est désormais qu'un esprit errant. Et il n'avait encore jamais vu d'esprit avec une arme. Et de toutes manières, elles avaient été confisquées.

Nerveusement, il se surprit à esquisser un sourire devant l'ironie de la situation. Il avait la capacité de sentir les esprits, de voir les âmes, et voilà qu'à présent, il est lui même l'un d'entre eux. Et visiblement, il ne peut que errer, effectivement. Devant lui comme derrière lui s'étendait la plaine jonchée des fleurs qui lâchaient inlassablement leurs lumières dans les ténèbres qu'était cet endroit. Il leva la tête, et regarda le ciel. Il n'avait jamais vu de voûte aussi vide et triste. Le ciel était certes dégagé, mais il n'y avait même pas d'étoiles, et il était d'un bleu assez indéfinissable. Les nombreuses lumières des plantes virevoltaient dans le ciel, presque en guise d'étoile dans ce ciel vide. Mais cela ne pouvait cacher le vide complet qui régnait dans cet endroit. Comme si la vie n'avait pas sa place en ce lieu. Et comment peut-il se définir à présent, n'était ni mort ni vivant ? Il n'est plus rien qu'un reste de celui qu'il était, une ombre, lui aussi. Et si il n'est qu'un esprit, alors il a été arraché de son corps. Et où est-il ? Sûrement encore dans le monde des vivants, dans cette caverne où Gïlraen doit entre être retenue par ces monstres avides de sang et de souffrances. Mais quand il regarda ses mains plus attentivement, il ne vit pas de différence entre sa condition actuelle, et celle de quand il était vivant.

Le dernier elfe noirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant