Les bourgeons

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Le 6 juin 1987, Londres
... dans une ruelle sombre, un petit appartement... simple chambre sous les toits...
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Elle chantait, tenant les mains d'un garçon de six ans, qui n'avait pas le choix que de suivre le mouvement. Ses cheveux autrefois soyeux, toujours parfaitement coiffés étaient à présent sales et emmêlés. Ses yeux verts étaient inexpressifs, comme si son âme avait disparu. Elle chantait une chanson d'amour. Le garçon avait mal aux mains mais il n'osait se plaindre. Il aimait sa mère lorsqu'elle ne laissait pas surgir le monstre en elle. Il devait alors fuir, se cacher dans l'unique coffre de la pièce où ils vivaient. Plus que quelques jours à espérer que le monstre ne contrôle pas sa mère et il la reverrait : sa lumière.

La ronde folle de la mère continuait, encore et encore. Le garçon tenait les yeux fixés sur son sourire. Il aimait sa mère même si on la disait folle. Combien de fois son grand-père les avait séparés après que le monstre était apparue à nouveau ? Le petit ne comptait plus. Il profitait de ce week-end avec elle avant de rentrer chez lui, chez elle. Il aimait passer ses semaines là bas, loin de sa mère qui était dans son monde.

Baudoin était un beau petit garçon et sa mère le lui répétait à chaque fois qu'elle le revoyait, se trompant parfois sur son prénom, l'appelant Evan.

Son père.

Baudoin connaissait l'histoire de son père grâce à celle qu'il appelait parfois mère ou tante. Ça dépendait devant qui. Devant sa mère biologique, il devait faire attention à ce qu'il disait. Il évitait depuis qu'il avait compris la haine de sa mère contre sa tante de parler trop de ses activités chez elle. Chez elles.

Eve et Circé.

Eve la cousine de son père, comme une sœur, était aussi malade, mais elle, c'était une toux qui ne la quittait pas. Elle avait souffert dans une prison avec des gardiens terrifiants. Elle en faisait encore parfois des cauchemars et parfois pleurait même. Seuls Baudoin, Circé et le grand-père le savaient. Le grand-père était celui de Circé mais Baudoin l'aimait autant que son vrai grand-père qui venait souvent le chercher pour ses leçons avec des précepteurs. Circé, sa cousine apprenait avec sa mère et son grand-père. Elle avait tellement de chances. C'était si ennuyeux avec les vieux mages.

Circé devait sûrement depuis son départ comptait les heures de son retour et avec bientôt l'été, Baudoin profiterait encore plus d'elle. Plus de classe.

Sa mère fredonnait encore, tournant avec lui sur un vieux tapis limé et fatigué de ces rondes incessantes. Le parquet craquait par endroit, toujours aux mêmes, à chaque passage chronométré.

— Chante avec moi, dit-elle d'un coup. Chante !

Baudoin murmura les paroles. Il n'aimait pas les ordres de sa mère. Il ne voulait pas chanter pour elle. Il était fatigué par la ronde qui n'en finissait pas. Sa tête tournait, ses pas étaient moins sûr.

— Plus fort ! Cria sa mère. Plus fort ! Encore !

Baudoin se tut alors que le monstre commençait à prendre possession de sa mère. Il était toujours tenu par elle et il avait peur de se prendre un coup lorsqu'elle perdrait le contrôle, que le monstre se déchaînerait alors. Elle n'avait plus le droit à avoir une baguette magique et heureusement. Baudoin la voyait trembler et bientôt les larmes allaient sortir. Elle hurla alors contre lui qui ne faisait aucun effort. Elle serrait fort ses mains et il grimaça. Il savait ce qu'il fallait faire. Eve lui avait appris un très bon moyen. Personne ne le saurait ici.

Sur ses paumes des épines surgirent et piquèrent les doigts de sa mère qui le lâcha d'un coup en criant de douleur. Baudoin s'échappa alors et courut jusqu'à un coffre. Il l'ouvrit et s'y glissa. Il referma le couvercle et comme à chaque fois qu'il le voulait, il entendit le déclic de la serrure mais aussi les cris du monstre que sa mère laissait sortir.

Les Roses NoiresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant