CHAPITRE XV.

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               REVANCHE.

     Elliott conduisait la voiture emmenant Wendy à l'usine. Silencieuse, elle feuilletait des brochures configurant des meubles modernes très design. Fan du nouveau insolite et de la créativité rebelle, elle suivait toutes les tendances des meubles. Le défi pour elle consistait à demeurer fidèle au travail du bois tout en cherchant à suivre la tendance révolutionnaire adoptée par le plastique, le bronze, l'aluminum, le fer et autres. Prenant notes et traçant même quelques ébauches d'idées, elle évoluait dans sa magique bulle personnelle. Toutefois, de temps en temps, elle entendait le téléphone d'Elliott sonner et ce dernier refuser la communication. A la longue, elle se sentit intriguée par une telle attitude et finit par lui demander :

   - Est-ce un correspondant indésirable ou est-ce un choix délibéré de ne pas répondre pendant le service à des appels personnels ?

   - Désolé mademoiselle si les sonneries vous ont dérangée. Vous paraissiez plongée dans votre dimension et coupée du monde extérieur.

   - Aucun problème. Cela ne me dérange guère. Répondre au téléphone n'est pas un crime.

   - C'est ma sœur qui me sonne depuis onze heures et je lui ai dit que je ne pouvais pas me libérer mais elle insiste.  

    - Votre soeur ? Vous avez une sœur et vous la laissez vous supplier !?

   - J'en ai trois et je les aime beaucoup. D'ailleurs nous nous entendons très bien, mais je ne comprends rien aux affaires des filles et elle me demande de trouver un cadeau pour notre soeur qui fête son anniversaire.

   - Pourquoi ne pas le faire elle-même ?

   - Trop occupée avec les préparatifs et nous avons l'habitude d'offrir un cadeau collectif. Un de la part des parents et l'autre du frère et des sœurs ou des sœurs quand c'est le mien.

  - Alors, où est le problème ?

  - Je n'en ai pas le temps.

  - Mais si, mais si ! Qu'est-ce qu'elle aime ?

  - La fine lingerie.

   - De soie ?

   - Surtout.

   - Elle a quel âge ?

   - Elle fêtera ses vingt ans.

   - Une grande occasion ! Je pense pouvoir vous aider. Je vais vous indiquer le chemin. Nous irons faire les boutiques ensemble.

   - Vraiment !? Et votre travail à l'usine ?

   - Une heure de plus ou de moins ne fera pas une grande différence. Par ailleurs, je ferai aussi un peu de shopping et je donnerai une petite leçon à une certaine petite... vendeuse trop prétentieuse ! Vous devez d'ailleurs connaître l'adresse. Si j'ai bien compris c'est la boutique de prédilection de votre ancienne patronne....

  Ainsi les projets se virent  modifiés en un clin d'œil. Elliott découvrait chaque jour un trait de caractère chez Wendy qui la lui rendait de plus en plus chère. D'une simplicité déconcertante dans son comportement avec lui, il ne pouvait que louer son initiative d'avoir osé lui répondre de façon franche, sans détour. Si son employeuse était encore "Madame Mieux Que Moi Ça N'existe Pas", il se serait vu rabroué à cause des sonneries dérangeantes. Elle n'aurait pas manqué l'occasion de l'écraser de sa supériorité, ni de l'agonir de remarques dédaigneuses. Que de différences ! Elliott ne pouvait pas encore trancher quant à la caste sociale de Wendy. Travaillait-elle par besoin ou par envie ? Ce qui était sûr est que ses bonnes manières et sa classe dénotaient d'une appartenance haut-standing. Ce qui prouve que l'argent ne fait pas l'être humain. C'est l'humain qui fait l'argent.

UNE FILLE PAS COMME LES AUTRES. TOME I. (TERMINÉ). Où les histoires vivent. Découvrez maintenant