La Dernière Étoile - Tome 2 : Chute

1. La fin de tout

Les étoiles défilaient paresseusement sur le large écran tenant lieu de fenêtre à ma cabine. Ces constellation... Ça faisait si longtemps.

Mon corps et mon esprit avaient souffert dans le panoptique, atteignant un point de rupture. Mais j'étais enfin de retour. C'est tout ce qui comptait.

La porte de ma cabine s'ouvrit. C'est à peine si je regardait la femme qui entra, un soldat. Un officier peut-être. Difficile à dire, puisque sa tenue noire ne portait sans grade.

Elle avait l'air en colère et ne salua pas. Qu'importe. J'avais plus urgent à gérer que la discipline à bord. Le vaisseau appartenant bien à ma flotte, son personnel ne pouvait que m'obéir sans discussion.

-Nous n'avons plus rien à faire ici, décrétais-je en me tournant vers elle. Planifiez un saut vers Nirauran et...

-Je crois que vous ne saisissez pas la situation, coupa-t-elle sèchement. Ce n'est pas vous qui commandez ici, c'est moi. Ce vaisseau ne se mettra en route que quand je le déciderais.

Je la fixais de mes yeux rouges dans une mise en garde silencieuse. Sans résultat.

-Qui êtes-vous? demandais-je finalement.

-C'est moi qui devrait vous poser cette question. Vous ressemblez au grand amiral Thrawn, mais il est mort lors de la bataille de Terranie, il y a des mois. J'y étais.

Des mois? Si elle savait combien de temps s'est écoulé pour moi...

-Et bien, comme vous voyez je suis bien vivant, et vous avez mes remerciements. Maintenant, mettez le cap sur Nirauran. Et ouvrez moi un accès au réseau impérial, je dois évaluer la situation. 

Qui sait quels dommages mon absence avait pu causer; mais au lieu d'obéir, elle croisa les bras, affichant une moue méprisante.

-Oh, je peux vous épargner cette peine "votre seigneurie". La guerre est finie, et on l'a perdue. Vos ennemis n'ont même pas estimé utile d'achever le travail. Le conseil impérial a nommé Varig Atorias pour vous succéder, puis Nina Septime l'a tué pour prendre le pouvoir. Je l'ai éliminée avant qu'elle ne déclenche une guerre civile, et c'est maintenant au régent Vao de nettoyer le merdier que vous avez laissé. Pour autant qu'on puisse juger, il fait un meilleur boulot que vous à diriger l'Empire. Plus de BSI. Plus de guerre.

Elle me haissait, je pouvais le lire dans ses yeux. Le fait qu'elle vienne de dégainer son pistolet pour le pointer vers moi était aussi un bon indicateur d'une certaine hostilité.

-Que vous soyez le vrai Thrawn, une sorte de clone ou d'anomalie, je m'en fout en fait, poursuivit-elle. Au mieux, vous ramener sur Nirauran reviendrait à rétablir l'ancien Empire, la tyrannie et les guerres absurdes aux quatre coins d'Androméda. Au pire, la guerre civile... Pas question. Sous vos ordres, j'ai tué des tas de gens pour de moins bonnes raisons.

Voulait-elle seulement attendre que j'ai repris conscience pour me tuer en face? Non, c'était autre chose. Elle se justifiait. Son doigt caressait la détente, mais ne la pressait pas.

Elle hésitait.

Je la reconnus, et je compris d'un coup. Mon esprit épuisé trouva la force de saisir l'opportunité que je venais de saisir.

-Vous êtes Caldred D'Arca, la compagne de Varig Atorias, affirmais-je. Vous dites qu'il a été tué, mais je suis la preuve vivante qu'il n'est pas mort.

Elle hésita, puis baissa légèrement son arme, à mon grand soulagement. 

Mon séjour dans le panoptique n'avait pas seulement drainé mes forces; il m'avait arraché mes pouvoirs. Les capacités que j'avais possédé n'existaient plus et j'étais suis plus vulnérable et vivant que jamais. Une simple balle de pistolet signerait ma fin, et vu ce qu'elle disait, trop de candidats pourraient se proposer de la tirer.

-Expliquez vous, exigea Red.

-C'est un peu compliqué à exposer clairement.

Elle agita son pistolet.

-Faites comme si j'allais vous tirer dessus en cas d'échec.

Motivant. Je soupirais. Autant commencer au début.

-Durant la bataille de Terranie, j'ai fait face à Hadès, un des dirigeants de la secte TTC, qui a m'a enfermé dans une dimension parallèle, une prison hors de notre espace-temps appelée Panoptique. C'est sans doute dur à croire... 

-Si je n'y étais pas allée, je ne vous croirais pas, rétorqua Red. Quel rapport avec Varig?

Elle masquait mal son jeu. Varig, c'est tout ce à quoi elle s'accrochait. Ça expliquait ma survie.

J'aurais pu lui dire la vérité. Que le temps s'écoulait différemment dans le Panoptique et que j'avais erré durant des années, croisant la route d'entités emprisonnées depuis des éternités. Qu'une de ces entités avait su utiliser le lien psychique que je partageais avec Varig pour créer une faille dans la frontière séparant Andromeda et le Panoptique, brèche qui s'était effondrée dès que Red m'avait arraché à ma prison.

Une prouesse qui signifiait que le tissu même d'Andromeda faiblissent, comme l'avaient prédit les TTC. 

L'apocalypse était inévitable, j'avais finit par le comprendre en errant dans le Panoptique. Chercher à l'empêcher était voué à l'échec. Cela ne voulait pas dire non plus qu'il n'y avait plus rien à faire...

Mais annoncer la fin du monde à quelqu'un qui agitait un pistolet ne me semblait pas être une bonne stratégie de survie.

-Varig et moi partageons un lien psychique, affirmais-je à la place. C'est ce qui vous a permis de trouver ma prison, c'est ce qui me dit qu'il est encore en vie. Tuez-moi et vous perdrez votre meilleure chance de le retrouver.

-Comment? finit-elle par demander en rangeant son arme. Comment vous allez le trouver?

Je souris. Je venais de gagner un répit.