D. Saut dans l'inconnu - troisième partie

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Durant les semaines de voyage à travers les systèmes stellaires, la flottille thrawnienne était sous la menace constante d'un ennemi insidieux: l'ennui.


Les scientifiques étaient pratiquement les seuls à y échapper, échangeant des données et des hypothèses sur l'étoile massive découverte lors du premier saut.

Tous les autres se contentaient d'expédier leurs tâches quotidiennes avant de tuer le temps en attendant que la flotte se traîne à travers l'immensité de systèmes stellaires désertiques, au minimum de sa vitesse pour économiser le carburant.


Heureusement le commandant Nile avait l'habitude de ce genre de situation. Au bout de quelques jours, il conseilla d'imposer des exercices d'entraînement, afin d'éviter que le désœuvrement ne génère de la négligence ou des bagarres.

Ce regain d'activité était bienvenu, d'autant que les simulations permettaient à Varig d'apprendre à mieux manœuvrer la flotte. Les conseils de Nile et d'Arius l'aidaient à progresser rapidement, et en à peine trois semaines son taux d'efficacité grimpa spectaculairement.


La navigation réelle était devenue une morne routine; sortir de l'hyperespace, scanner le puits de gravité puis planifier la meilleure route jusqu'au point de saut suivant.


La découverte d'une forme de vie intelligente juste après le cinquième saut provoqua donc une certaine surprise.


Varig se plongea aussitôt dans les données affichées sur son terminal.


Le système dans lequel ils se trouvaient possédait une étoile naine autour de laquelle gravitait un vaste champ d'astéroïdes ainsi que quatre planètes, dont aucune ne semblait habitable. Pourtant les scanners détectaient bien de vastes cités sur la plus proche de son soleil, ainsi que des émissions énergétiques et radio.


-On a également repéré une station spatiale dans la ceinture de débris, précisa un opérateur.


Si on en jugeait par les relevés, la structure avait été bâtie en agglomérant artificiellement plusieurs gros astéroïdes. D'importantes signatures énergétiques suggérait qu'elle était le théâtre d'une activité intense, mais la roche empêchait d'en discerner les détails.


Aucune expédition thrawnienne, triplicienne ou peut-être même aucune tout court n'avait traversé ce système avant eux. Ils n'avaient donc aucune donnée sur ses habitants. Varig prit une grande inspiration. Ils avaient étudié cette situation seulement quelques jours plus tôt lors d'un des exercices de simulation.


-Protocole de premier contact, ordonna-t-il. Que la flotte se prépare au combat mais garde sa position; envoyez des sondes vers la station et la planète. Émettez les messages standard de contact pacifique sur toutes les fréquences.


Le chevalier vit les sondes jaillir des entrailles de "l'Inspiré", qui croisait non loin du Spectre. Elles réduisaient leur vitesse, pour éviter de renseigner un éventuel ennemi comme pour ne pas effrayer leurs objectifs. Leurs trajectoires contournaient largement la planète et la station, pour bien montrer qu'elles n'étaient pas hostiles.


-Aucune réponse à nos messages, signala un opérateur radio. On ne parvient pas non plus à comprendre leurs signaux.

-Capitaine, on a du mouvement du côté de la station. On dirait qu'elle a allumé des réacteurs.

-Donc ce truc est un vaisseau, pas une station. Hostile? demanda Arius.

-Difficile à dire, mais d'après nos sondes les niveaux d'énergie montent en flèche, indiqua l'opérateur après une courte hésitation. C'est ce qui se passerait s'ils activaient des armes et des boucliers.


Le chevalier décida de contacter le commandant Nile avant de donner ses ordres, profitant de l'avis du plus expérimenté de tous sur les contacts avec d'autres cultures.


-Commandant j'ai peu de temps pour décider quoi faire. Quel est votre avis sur la situation? demanda-t-il.

-Leur vaisseau géant se prépare manifestement au combat, indiqua l'officier. Mais on en ferait autant si une flotte inconnue débarquait armée jusqu'aux dents au milieu d'un de nos systèmes. Ce truc est gros, et sûrement bien armé. Évitons surtout...

-Amiral, la station abat nos sondes!

-... De les provoquer, termina Nile.


Varig pianota sur son terminal pour afficher le combat. Tout en pivotant, l'énorme structure avait tiré une bordée de "missiles" sur les sondes, qui avaient proprement pulvérisé les fragiles engins automatisés.


Il effectua une rapide simulation des capacités de propulsion qu'ils observaient.


-Cette chose a une puissance de feu énorme, mais elle est très lente. On ne va pas l'affronter; préparez la flotte à exécuter une manœuvre évasive pour rejoindre l'autre bout du système, décida-t-il.

-Amiral, nos stocks de carburants sont déjà très bas, indiqua Arius. Si on manœuvre à pleine vitesse on sera à sec avant même d'avoir traversé ce système, sans parler de rentrer dans l'espace connu.


Le chevalier serra le poing. L'officier avait raison, inutile de tenter de simuler des solutions dont l'issue était inévitable. Si la flotte tentait de traverser le système, sa faible vitesse rendait le combat avec le vaisseau inconnu inévitable. Un combat qu'ils risquaient de ne pas remporter vu leur faible nombre de vaisseaux dont ils disposaient face à un monstre presque aussi gros qu'une EDLM.


Mais s'ils accéléraient pour fuir, ils brûleraient toute les réserves de deutérium qu'il leur restait et ne pourraient même pas atteindre le point de saut. Comment se sortir de cette impasse?


Tandis qu'il hésitait, le vaisseau inconnu avait poussé ses propulseurs. Le système afficha sa course prévue, une large ellipse vers la planète qui les menait droit sur les intrus. Ainsi qu'un délais; dans dix minutes maximum ils se trouveraient à portée de tir. Des missiles assez précis pour abattre une sonde en vol ne manqueraient pas une flotte qui se traînait à 10% de ses capacités de propulsion.


Varig devait trouver une solution, et vite.

La Dernière Étoile - Tome 2 : ChuteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant