Les Fantômes de Nos Passés

26.Samuel

J'avais juste envie de mourir. Enfin, après ce que je venais de vivre ce n'était peut-être pas le bon choix de mots.

En l'espace d'une heure, j'avais aperçus la mort deux fois. J'avais appris la mort imminente de mon propre frère, et j'avais empêché le suicide de la fille qui prenait de plus en plus d'importance dans ma vie en ce moment. Je rêvais d'un lit et j'avais envie de pleurer pendant des journées entières, mais je ne devais rien montrer. Alors je chantais cette horrible chanson. Et quelque part, entendre l'agacement du géant à bouclettes me rendait extrêmement satisfait.

Je devais faire semblant, et c'était ce que je faisais. Je jetais un coup d'œil à la petite blonde à côté de moi. Elle marchait voutée et se tenait les côtes. Son bras droit retombait mollement le long de son corps.

- Comment t'as fait pour te casser le poignet ?

Elle sembla réfléchir avant de me répondre.

- Je suis tombée.

- Te fous pas de moi.

- C'est la vérité.

- Je viens de te retrouver debout sur la barrière d'un pont prête à mettre fin à tes jours et tu vas me dire que tu t'es cassé le poignet en tombant ? A d'autres peut-être mais pas à moi.

Elle se mordit la lèvre. Bingo ! En plein dans le mille. J'avais touché un point sensible, et elle savait qu'elle ne pouvait plus me mentir.

- Bah alors, dis-moi.

Elle garda le silence.

- Pourquoi tu ne veux pas me le dire ?

- Parce que ça ne te regardes pas.

- Ecoute je comprends que pour l'autre truc tu veuilles le garder secret, mais sérieux, un poignet cassé ?

- On est arrivé, nous signala Noah.

Tient, je l'avais oublié lui. C'était incroyable la capacité qu'il avait à se faire oublier des autres.

Nous entrâmes dans le bâtiment.

Quelques minutes, trois secrétaires, deux étages et une infirmière plus tard, je me retrouvai assis dans une salle d'attente avec les deux autres.

- Pourquoi on attend ?

- Ils veulent que je passe une radio, répondit la blonde.

- Pourquoi faire ? Ça se voit que c'est cassé, ton poignet pend comme le ventre d'un chat trop gras.

- Merci pour la comparaison Samuel...

Je souris.

- Simmon Emma.

Emma se leva et suivit l'infirmière. Je me retrouvai donc seul avec Noah.

Autant dire qu'être en compagnie d'un poisson aurait été la même chose. Il était aussi muet qu'une carpe. Et son regard était si mauvais quand il le posait sur moi que je n'aurai jamais osé faire une blague pour détendre l'atmosphère. Finalement, je n'eus pas besoin de parler, ce fut lui qui engagea la discussion. A mon grand étonnement.

- T'as une idée de pourquoi elle a voulu faire ça ? demanda-t-il.

Je fus surpris du sujet. Quoique, tout bien réfléchis, c'était plutôt évident. J'avais l'impression qu'Emma serait notre seul sujet de discussion à tous les deux.

- Non, pas vraiment et toi ?

- Oui.

Je me tournais vers lui. Comment ça oui ? Il savait ? Ne me dîtes pas qu'Emma lui avait racontée toute sa vie dans les moindres détails parce que sinon j'allais détruire tout ce que je trouvais.