Les Fantômes de Nos Passés

24.Samuel

« Merci »

Voilà le message que j'avais reçu une heure auparavant.

Sans savoir pourquoi, j'avais eu l'intime certitude que ce message venait d'elle.

Je savais, que ce n'était pas un truc de malade, mais il venait d'Emma. Et Emma ne m'avait jamais dit merci. Donc si, c'était un truc de malade ! Et c'était bizarre aussi.

Pourquoi une fille que je ne connaissais que depuis une semaine et qui n'avait été jusqu'à aujourd'hui qu'un bloc de glace, m'envoyait-elle un message ?

Je ne saurai pas dire pourquoi, mais ça m'avait inquiété. Un merci sans contexte, dans les films, ce n'était jamais bon signe. Alors je m'étais mis à courir.

J'avais couru sans vraiment savoir vers où, accompagné de l'infâme certitude que quelque chose de grave allait se passer. Mes jambes m'avaient fait mal après à peine cinq minutes de courses et mes poumons étaient devenus brûlants au bout de cinq-cents mètres. J'avais continué à courir.

Mes pas m'avaient mené ici, sur un pont, sûrement le seul pont de Chattam, et l'attroupement de gens qui s'y trouvait m'avait poussé à continuer. J'avais accéléré jusqu'à arriver à leur niveau. Poussant mon corps à la limite de ses capacités sportives.

- EMMA NON !

C'était cette phrase qui m'avait fait agir. Je m'étais frayé un passage entre les gens et en voyant une jeune fille blonde debout sur la rambarde, j'avais foncé sans réfléchir.

Je l'enlaçai et la tirai violemment en arrière.

On tombait tous les deux sur le sol, j'amortie sa chute, et je le sentis passé, mais en me relevant et en voyant son visage plein de larmes, la douleur laissa rapidement place à la colère. Une colère brulante qui carbonisa mon cœur.

Je lui agrippai les épaules et fixai mon regard au sien.

- MAIS QU'EST-CE QUE TU FOUS BORDEL ! T'AS RIEN DANS LA TÊTE OU QUOI ?!

Elle me regardait en pleurant, le visage affolé, comme si elle venait de se rendre compte de ce qu'elle avait failli faire.

- Emma putain mais pourquoi ?!

- Je, j'ai...

Ses larmes redoublèrent en intensité, ses yeux étaient rouges et elle se mordait tellement fort la lèvre qu'elle saignait.

- Chut, ne dis rien. Je ne sais pas ce qui t'as poussé à faire ça, et tu n'es pas obligée de me le raconter, même si j'aimerais beaucoup savoir. Mais dans tous les cas et même avec toutes les raisons du mondes, c'était loin, très loin d'être une bonne idée !

Je repris mon souffle et posai mes mains sur ses joues trempées pour essuyer ses larmes.

- J'ai reçu ce message Emma. Cette photo. Je n'ai rien compris et je n'en ai pas cru un traître mot, mais si c'est cette photo et le fait que la personne, qui que ce soit, l'ait certainement envoyée à tout le lycée, qui t'as poussée à faire cette chose insensée, soit sûre que je vais aller lui défoncer la tronche bien proprement, crachai-je. On ne se connaît pas très bien et pas depuis longtemps, mais je me suis attachée à toi et à ton caractère de merde. Je te considère comme une amie d'accord ? Tes sourires sont rares et ils me sont devenus chers alors te voir pleurer me fait atrocement souffrir et ce que tu viens d'essayer de faire est une chose terrible. Sache que si j'étais arrivé trop tard et que tu avais sauté je ne m'en serais jamais remis, soufflai-je. J'ai perdu Martin, tu es la seule personne à qui je n'en ai jamais parlé et j'ai bien l'intention de faire de toi mon nouveau Martin. Perdre un meilleur ami m'a coûté deux ans de ma vie, alors te perdre toi, une amie, je suis quasi sûr que je ne m'en serai pas remis !