Chapitre 18

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Salvor


Lorys était seule au moment où j'entrais dans sa chambre. Ne pas y trouver mon esclave auprès d'elle causa une sensation bizarre au fond des entrailles. Sensation sur laquelle il n'était pas nécessaire que je m'arrête. Et oui, c'était mon esclave, j'avais décidé ça après notre bagarre dans les bois. 

Feignant d'être absorbée dans la contemplation d'un livre illustré, Lorys assise dans son lit, refusait de m'adresser ne serait-ce un regard. Elle m'en voulait sans doute à cause de ce que j'avais fait à sa servante. Mais ses états d'âmes me passaient par dessus la tête. Cette esclave m'appartenait, bordel de nom. Je devais la marquer. Point. Sinon le premier qui l'aurait trouver sans ma marque n'aurait pas hésiter une seule seconde à se l'approprier. 

Un frisson me secoua de la tête aux pieds rien que d'imaginer ça. Le monstre en moi gronda et s'impatienta. Gesticulant dans tous les sens, il voulait voir ma petite gazelle pour lui faire des méchancetés.

-Père vient d'arriver. Annonçai-je, exerçant contre mon monstre une retenue en ciment armé.

Je savais exactement quoi dire pour sortir ma sœur de son pseudo mutisme.

-Mais il ne devait rentrer qu'à la fin du mois. C'est bien ce que tu avais dit, non? Dit-elle alarmée

Trop fort!

-C'est ce que je croyais aussi préférais-je répondre.

-Fantastique!

Dire que Lorys craignait notre père était un euphémisme. Il la terrorisait, littéralement. Et ce depuis l'enfance. Éprouvant pour elle une sorte de déception profonde associé à de la rancœur et à de la rage sortit de je ne sais où, il passait son temps à la rabaisser, lui hurlant dessus, disant qu'elle était qu'un être égoïste et monstrueux qui lors de sa naissance avait causé tellement de séquelles au corps de notre pauvre mère, qu'il était impossible pour celle-ci d'avoir d'autre enfant par la suite. 

Au cours des années leurs liens s'étaient inévitablement distendus. Ils ne se voyaient qu'en de rares occasions. Je ne savais pas pourquoi notre paternel ressentait une telle aversion pour Lorys. Il n'en avait jamais voulu en parler. Pour ma part, ma sœur était tout le contraire de ce qu'il s'évertuait à déblatérer pour on ne savait quelle raison. Elle était adorable, foncièrement bonne et douce, et elle demeurait la seule personne pour qui j'éprouvais un tant soit peu d'affection, pour autant que je sois capable d'en éprouver.

-De toute manière ce sera comme d'habitude. Je ne le verrais pas jusqu'à ce qu'il reparte en ville. Poursuivit-elle.

Ses paroles sonnèrent si vrai que je ne pris même pas la peine de les contredire.

-Je t'en veux pour ce que tu as fais à Ysaé!

Nous y voilà!

-Shakur lui, n'est pas marqué à ce que je sache!

-Shakur n'est pas marqué parce que chaque foutu habitant de Palanques sait qu'il est mon serviteur et de ce fait personne n'osera me le voler.

-Ce n'était pas à toi de prendre cette décision, continua ma sœur, obstinée. Ysaé est ma servante. Serais-tu content si j'ordonnais au capitaine Hardy de marquer Shakur alors qu'aucun autre esclave de la grande maison n'est marqué?

Je poussai un long soupir de frustration.

-Soyons clair. Ysaé est à moi et je lui permets d'être ta servante. De plus, on sait tous les deux que tu n'es pas en position de donner des ordres à qui que ce soit, alors arrête avec ça!

YsaéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant