Chapitre 71

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Ysaé


Je débarrassai rapidement Mlle de sa chemise de nuit.

Sortant l'éponge de la bassine posée à coté de moi, je frottai délicatement son corps disgracieux. Elle huma avec délectation l'eau qui sentait bon la rose et la lavande. J'avais ajouté quelques gouttes d'essences de fleurs dans l'eau pour parfumer sa toilette.

Je séchai méticuleusement ma maîtresse puis la revêtis d'une robe légère après lui avoir fait enfiler des sous vêtements en soie.

Je rapprochai sa chaise roulante de son lit, l'aidai à s'y asseoir et la positionnai devant sa coiffeuse où je desserrai ses cheveux dans l'intention de les brosser.

-Ça ne va pas mieux. Demanda t-elle doucement en m'observant à travers le miroir.

Terrassée par le chagrin, je fis non de la tête en guise de réponse. Mlle Lorys ne dit plus rien, se contentant de m'étudier en silence. Il me fallu longtemps pour tirer ses mèches indisciplinées en une énorme tresse lâche dans laquelle j'y tordais quelques fleurs d'oranger. Après quoi, j'allai lui préparer son petit déjeuner. Arrivée dans la cuisine, la grosse Betsy ne m'adressa pas un regard. Ce qui me confirma que Ma avait du lui raconter ce qu'il s'était passé. Son indifférence me broya le cœur. Je préférais et de loin, lorsqu'elle me criait dessus pour rien.


Après que ma maîtresse eut petit-déjeuner, je lui demandai quel était le programme de la journée car j'avais grande envie de m'évader loin de la pesante atmosphère du domaine.

-Nous n'irons nulle part, me dit-elle. Pas avant que tu ne m'aie expliquer ce qu'il se passe.

Au ton sérieux qu'elle employa, je su que je n'y couperais pas.

Qu'allais je bien pouvoir dire à Mademoiselle?

Que son frère me faisait des choses la nuit dans son lit, que par dessus le marché j'appréciais?

Hors de question!

Que Shakur était amoureux de moi, au point de s'en prendre à son frère à cause de ce que celui-ci me faisait la nuit dans son lit?

Deux fois hors de question!

Que Ma me détestait à cause des deux première raisons.

Trois fois hors de question!

-Qu'est-ce qui ne va pas Ysaé, continua t-elle en m'invitant à m'asseoir sur son lit. Hier tu n'as pas voulu me dire pourquoi tu pleurais et aujourd'hui je te trouve encore au bord des larmes.

J'avalai l'excès de salive qui engluait ma langue.

-Nous sommes amies n'est-ce pas? Alors tu peux tout me dire. Je peux tout entendre.

Je te le déconseille! Cria ma première meilleure amie dans ma tête.

-Procédons par étape, poursuivit Mlle. Commence par me dire pourquoi tu étais si bouleversée hier.

Dis lui que la musique qu'elle jouait t'a fait penser à tes parents. En plus ce ne serait pas un mensonge, pas vrai?

Trop de pensées parasitant mon esprit, je pris le parti de m'en remettre entièrement à mon amie de calvaire, qui jamais ne m'avait fait défaut. Respirant un grand coup, je me lançai en tentant d'ignorer l'énorme nœud qui se formait dans mon estomac.

-La musique que vous avez jouer m'a toucher et m'a fait penser à mes parents. Répétai je comme un automate.

Bien.

-Je croyais que c'était à cause de ce que Ma t'a dit. Elle avait l'air pas très commode lorsqu'elle t'a demandé de la rejoindre dans la dépendance.

Dis lui que ce n'est pas à cause de Ma.

-Ce n'est pas à cause de Ma.

-Je suis désolée si ma musique t'a fait penser à tes parents, alors.

Dis lui qu'elle n'a pas à être désolée car cela t'a quand même fait du bien de penser à eux.

-Ne soyez pas désoler car cela m'a quand même fait du bien de penser à eux.

Super, continue comme ça.

-Tu as l'air bizarre. Dit Mlle en plissant les yeux.

Dis lui que tu n'es pas bizarre.

-Je ne suis pas bizarre.

Mlle me scrutait si intensément que je du me pincer la cuisse pour ne pas céder à l'envie de craquer.

-Bref. Que t'arrive t-il aujourd'hui, alors. Et ne crois pas que je n'ai pas remarqué les marques dans ton cou.

Je suis fichue, pensai-je.

Non tu n'es pas fichue. Dis lui....dis lui qu'un moustique t'a piqué et que tu t'es gratter. NON! Attends. Dis lui plutôt qu'une des plantes médicinale de Ma, t'a donné des démangeaisons. Oui, je crois que ça va passer.

-Une des plantes médicinale de Ma m'a donné des démangeaisons. Oui je crois que ça va pas...Je crois que ça va arrêter de...de me démanger...oui, je crois bien.

Les yeux bleus de Mlle étincelaient. A croire qu'elle tentait de sonder mon âme à nue. Une âme déjà sacrément amochée.

-Un jour quelqu'un m'a dit que si l'on partage un fardeau il sera moins lourd à porter, lâcha t-elle tristement. Même si je suis une pauvre fille en chaise roulante je peux t'aider à porter le tien, tu sais. Parce que nous sommes meilleures amie et que...

Et le soir arriva.

Le soir arriva sans que je ne m'en rende compte.

J'étais allongée dans mon lit. Cela faisait maintenant des heures que ma maîtresse s'était endormie et cela faisait maintenant des heures que j'étais sensé me trouver dans un autre lit que le mien. 

Mais je m'en fichais éperdument. La façon sournoise d'agir de Mr Salvor me troublait, me révoltait.

Comment aurais je pu le rejoindre après le coup bas qu'il avait orchestré contre Shakur?

Le long de mon échine une coulée de froid s'insinua. Car je guettais le moindre bruit. La moindre variation de changement d'air. Me demandant quand il viendrait. Et ce qu'il ferait, car il avait exigé ce matin encore avant que je m'en aille,

Je te veux dorénavant dans mon lit.

Et le matin arriva.

Le matin arriva et je m'en suis rendu compte car je n'avais pas fermer les yeux de la nuit. J'étais toujours allongée dans mon lit.

Il n'était pas venu.

Rien ne s'était passé.

Pourtant la coulée de froid qui s'était insinué dans mon échine était toujours là. Traînant comme un mauvais présage.

YsaéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant