Ysaé

Chapitre 31

Salvor

Je fus surpris que nous parvenions à Debourg à peine la nuit tombée. 

Gaven, l'aubergiste des Trois Frères nous attendait sur le seuil de la porte. L'accueil chaleureux de ce dernier n'estompa pas ma mauvaise humeur qui en enflant à mesure que les kilomètres défilaient, s'était transformé en une rage latente.

-Bienvenu Monsieur De brym.

-Bonsoir.

-Nous pensions vous voir plus tôt.

-Je suis là n'est-ce pas l'essentiel?!

-Euh...Oui monsieur.

-Mes exigences ont-elles été respectées? Crachai-je.

-C'est à dire?

-C'est à dire, dis-je, la moutarde me montant carrément au cerveau. Que tout était écrit sur le billet que je vous ai fait parvenir tantôt.

-Oh excusez moi monsieur De brym, où avais-je la tête, dit Gaven confus. Il en va de soi que vos exigences ont été respectées. Le lit d'appoint pour la servante de votre sœur à été installé dans la suite de mademoiselle. Et mon frère Haven à préparé de l'avoine de la meilleur qualité pour vos chevaux et une place dans la grange pour remiser votre carriole.

-Bien.

-J'espère que votre séjour chez nous vous sera des plus agréable, Mr Salvor.

-Je l'espère aussi sans quoi vous en entendrez parler!

-Si vous voulez bien me suivre.

-N'est-ce pas ce que je suis déjà entrain de faire!

Je laissai Shakur s'occuper des chevaux et de la carriole tandis que je portais Lorys à bout de bras jusque dans ses appartements. L'esclave sur mes talons se dépêtrait avec la chaise roulante dans les escaliers. Déposant délicatement ma sœur sur le plus grand des lits, j'arrangeai les coussins pour qu'elle s'y sente plus à l'aise.

C'était la première fois que je m'occupais de Lorys de la sorte. Et aussi bizarre que cela puisse paraître, je ne trouvai pas cela désagréable du tout.

L'auberge des Trois Frères où nous étions descendus était une grande bâtisse luxueuse composée à l'étage de six suites avec leurs commodités qui disposaient d'une vue imprenable sur les jardins du domaine dans lequel elle était implantée. Au rez-de-chaussée, un sublime restaurant dont l'intérieur grandiose constitué de dorures, de toiles peintes, de tables majestueusement décorées et de chaises rembourrées, offrait à sa clientèle haut de gamme, une cuisine des plus raffinée. A l'arrière du restaurant se trouvait une autre pièce qui servait d'office et de dortoir aux esclaves des clients. Réputée meilleur hôtellerie de Debourg, l'auberge était dirigée par les trois frères Vince: Gaven, Haven et Javen. Et pour y avoir passer de nombreux de séjours, je pouvais sans conteste dire que j'y avais mes petites habitudes. En effet, j'étais l'un des rare client que les propriétaires, particulièrement à cheval sur les principes, permettaient l'excentricité. Comme par exemple autoriser mon esclave, qui n'était pas une humaine à part entière, à dormir dans la même pièce que sa maîtresse.

L'aubergiste toquant à la porte pour remettre les bagages de ma sœur, je profitai pour l'intercepter.

-Gaven! Ou était-ce Haven? Peut-être Javen alors? M'interrogeai-je. Bref! De toute façon il y avait longtemps que j'avais abandonné la folie de chercher à les différencier en les appelant tous Gaven. Gaven, repris-je, il est tard, nous dînerons donc dans nos chambres respectives.

-Bien Monsieur De Brym! Répondit «Gaven» avec allez savoir pourquoi une pointe d'irritation dans la voix.

Me tournant vers l'esclave, je tendis le sac de voyage récupérer des mains de l'aubergiste.

-Merci maître.

Refusant de lâcher les brides, je restai là à fixer son regard aussi intense que la nuit. Et le foutu temps s'arrêta. Mon cœur se mit à palpiter bizarrement et lorsque enfin je relâchai ses foutues brides, tout ce qui s'était passé durant le trajet ne compta plus.

Toute l'irritation accumulé à son encontre ainsi que les œillades énamourées que Shakur lui avait envoyé tout au long du trajet, furent oubliés. 

Instantanément.

Alors avant de faire quelque chose de complètement stupide, comme de mettre ma langue dans sa bouche à nouveau, j'optai pour un repli stratégique en quittant précipitamment les appartements de ma sœur.