Chapitre 76

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Ysaé


Je m'acquittai de mes taches de la journée, recru de fatigue. Mais la rage que j'éprouvais à l'encontre de Mr Salvor pour ce qu'il nous avait fait à Shakur et à moi, enflait à mesure que le temps passait. 

Je le détestait. 

S'il croyait qu'en m'enfermant dans le mausolée je lui obéirais au doigt et à l'œil, il était mal barré. J'avais été capturée, maltraitée, fouettée, privée de nourriture, forcée de dormir à la belle étoile, réveillée transie de froid et marquée au fer rouge. Ce ne serait certainement pas ses misérables menaces qui me feraient plier.

Je n'irais pas le rejoindre dans sa chambre!

J'avais survécu à une nuit dans le mausolée, j'en survivrais à beaucoup d'autres. Le feu de la rébellion qui se répandait par vagues successives dans mes veines, me portait, me consumait. A tel point que je me fichais éperdument de ce qui pouvait bien m'arriver. 

La nuit tomba. Après  avoir coucher ma maîtresse je me mis au lit. La rage qui tantôt avait remplacer la peur, fourrageait toujours mon ventre. Une heure plus tard, alors que je m'apprêtais à fermer les yeux, la porte de ma chambre grinça. En l'entendant, j'ouvris les paupières et me rassis instantanément sur mon lit, observant, sur la défensive, Mr Salvor approcher. 

Il avait le visage pale et les yeux cernés. Toute les fibres de son corps tremblaient de fébrilité sous sa respiration abrupte. Je reconnu sur le champ le mal qui le rongeait. Ses cauchemars et une fureur empirique en étaient la cause. Il resta planter là, à me fixer, les lèvres pincées, la mâchoire serrée.

-Non. Soufflai je, alors qu'il s'apprêtait à ouvrir la bouche.

Je savais ce qu'il voulait. Il voulait que j'aille dans son lit pour que je dorme avec lui afin que ses cauchemars cessent de le tourmenter. Mais je ne le ferais pas. Je ne le soulagerais pas. 

Prenant mon courage à deux mains et malgré la menace qui planait au-dessus de ma tête, je déclarais avec aplomb:

-Je ne dormirais pas avec toi!

Il plissa les yeux et resta immobile un instant, encaissant lentement mes paroles. Aucun esclave, sans doute ne lui avait jamais tenu tête de la sorte. Il prit du temps pour emmagasiner que j'étais sérieuse. Durant quelques secondes sous son regard enflammé, la panique voulant supplanter la rébellion, planta ses griffes acérées dans mon cœur mais aussitôt la colère se ré emparant de moi, toute la fureur que j'avais refoulée depuis ma capture et toute l'injustice dont Shakur avait fait l'objet de par lui, s'exacerba.

-Je ne dormirais pas avec toi! Criai je en sourdine de crainte de réveiller Mlle.

-Ne me force pas à t'y contraindre, lâcha t-il, en serrant les dents.

Je le défiai du regard.

-Ça suffit! Balança t-il, le visage rougit par la colère, tous les muscles de son corps bandés.

Je m'apprêtais à l'esquiver au moment où il s'approcha de moi, toutefois, devinant ma manœuvre il emprisonna mes poignets dans ses mains. Je me débattis comme une folle pour me libérer de son piège, donnant des coups de pieds, griffant, tentant de mordre. Il me serra dans ses bras, entourant ma taille de ses mains. Là je ne pouvais pas me dégager, sa poigne était beaucoup trop forte pour moi.  En désespoir de cause je frappai ses avant-bras qui m'enserraient comme un étau. Cela n'eut aucun effet, j'étais comme une musaraigne s'attaquant à un éléphant. 

Il me laissa faire jusqu'à ce que je me fatigue et m'affaisse comme une poupée de chiffon dans ses bras. J'éclatai en gros sanglots de rage. Il me serra encore plus fort contre lui tandis qu'il m'emportait hors de ma chambre.

-Chuuut, dit-il en effleurant mon front de ses lèvres. Tu vas réveiller Lorys.

-Je te déteste, réussis je à dire entre deux sanglots étouffés.

-Je sais. Répondit il.


Lorsque nous pénétrâmes dans son repaire, il me déposa sur son lit. Et dans un geste qui me surpris, s'accroupit devant moi tout en me regardant intensément. 

Une étrange sensation flotta entre nous. Une tension, qui échauffa ma peau. Quelque chose dans son attitude avait changé, mais j'ignorais quoi.

-Je n'aurais jamais du t'enfermer dans le mausolée comme je l'ai fait.

Je battis frénétiquement des cils pour chasser les gouttelettes salées qui menaçaient de s'échapper de nouveau de mes yeux.

Était-ce des excuses? Son attitude était incompréhensible. Je ne l'avais jamais vu comme cela. Ses paroles, son aspect. Tout était si intense. Presque irréel. Il semblait désolé. J'étais tellement habituée à son air autoritaire, que de le voir ainsi me fit un choc.

-Cela ne se reproduira plus. Continua t-il, son pouce effleurant ma mains de légers mouvements circulaires. Mais ne va pas t'imaginer pour autant que tu pourras me désobéir. impunément, poursuivit il. Que tu dormes avec moi est le seul moyen de...

-Je ne suis pas un animal de compagnie! Croassais je, ma voix se brisant.

Il serra les dents quand je l'interrompis et prit plusieurs inspirations comme si il attendait de retrouver son calme avant de continuer à parler.

-Tu es mon esclave! Dit-il lentement. Et la seule raison pour laquelle j'accepte que tu te comportes comme tu le fais en ce moment est...

-Je suis l'esclave de ta sœur! Le coupais je délibérément, pour le provoquer.

Ses pupilles fixées aux miennes s'enflammèrent.

-Tu es mon esclave, répéta t-il. Et la seule raison pour laquelle j'accepte que tu te comportes comme tu le fais en ce moment est que...parce que...bordel! Lâcha t-il incapable de continuer.

Je m'empourprai devant sa tirade. Et mon cœur battit la chamade dans ma cage thoracique quand j'entraperçus la teneur de ce qu'il faillit avouer.

-Tu me hantes en permanence. Il est donc légitime je te rende la pareille, poursuivit il. Un jour tu finiras par admettre que tu m'appartiens. Tu portes mon sceau sur ton épaule. Et quand bien même il te prendrais la fantaisie de vouloir me fuir, quiconque te trouvera te ramènera à moi. Tu es ma possession. Tu ne peux rien contre cela de toute façon. Donc arrête de te battre contre l'inévitable! Arrête de me désobéir!

Mon visage se décomposa en entendant ses paroles. Un épais sentiment de crainte s'installa dans mon ventre. J'étais prise dans le piège de Mr Salvor. Je ne pouvais pas l'affronter physiquement il était trop fort pour moi et il était clair que toutes tentatives de fuites de ma part se solderaient par des échecs. 

Des larmes remplirent mes yeux devant la situation intolérable dans laquelle je me trouvais. Ma lèvre inférieure se mit à trembler mais je la retins in extremis entre mes dents pour éviter qu'elle ne trahisse ma faiblesse. Il se pencha vers moi et j'eus l'impression d'être aimanté par lui malgré toutes les horreurs qu'il venait de débiter. Ses lèvres s'imposant sur ma joue, me caressèrent d'un léger baiser. Leste comme un chat il se leva, se glissa derrière moi et d'autorité, nous allongea sur son lit. La sensation de son corps lorsqu'il se colla contre mon dos me perturba. C'était mal.

A tellement d'égards! 

Jamais je n'aurais du être perturber à ce point. Alors reportant mon attention sur tout autre chose que son écrasante présence, j'essayais mentalement de penser à autre chose. 

A peine m'eut-il caler contre son ventre, qu'il s'endormit en quelques secondes, son membre niché dans mes reins, son souffle voyageant sur ma nuque.

YsaéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant