Une fois chez elle, Jane esquiva volontairement sa tante et sa cousine. Elle engloutit son dîner rapidement et se réfugia dans le bureau de son oncle. Elle s'installa à son bureau, s'enfonçant dans le grand fauteuil sur lequel il s'asseyait avant pour soigner ses patients, une vague de nostalgie l'envahit à cette pensée, et son regard vagabonda sur les étagères tapissées de livres de médecine et d'atlas. Un souvenir surgit alors : Jane se revit alors qu'elle devait tout juste avoir huit ans en train de feuilleter ces ouvrages d'érudition, elle lisait sans comprendre les noms latins, regardait sans vraiment reconnaître les dessins à l'aquarelle des os, des organes de notre si mystérieux et fascinant corps. Son oncle la couvrait d'un regard amusé et tendre, observant sa curieuse petite nièce fascinée par ce qu'elle tenait entre les mains.
Elle se leva et choisit un livre au hasard dans la bibliothèque d'oncle Henry, la reliure du livre était usée et lorsqu'elle l'ouvrit une odeur de vieux papier assaillit ses narine, elle feuilleta le manuel qui décrivait le protocole d'une dissection post-mortem quand ses pensées s'en allèrent vers l'affaire du meurtrier de Whitechapel.
L'élément qui paraissait indubitablement primordial c'était la correspondance retrouvée au domicile de Judy Browler, puis elle repensa à ce que lui avait suggéré Will : il fallait qu'elle se rapproche de prostituées, c'était incontestable, ainsi elle pourrait en apprendre plus sur Judy. Et peut-être même sur ces lettres. C'était un bon point de départ, elle n'avait plus qu'à espérer que son arrogante trouvaille se montre à la hauteur de ce qu'il promettait.
« Will... » Pensa-t-elle. Quel étrange personnage... Qui était-il vraiment ? Un homme dérangé à n'en point douter, il semblait être de ces êtres duplices, insaisissable tant sa nature se soustrayait à toute analyse de la part de ceux qui essayaient d'en percer le mystère, défiant toute logique, ce qu'il était vraiment échappait aux uns et aux autres. À ce genre d'homme pour qui la traîtrise et la folie sont de vieilles amies, on ne peut lui faire confiance. Pourtant elle voulait croire qu'il serait un homme bon et qu'il respecterait sa promesse. Naïveté ou refus de voir la vérité en face ? Seul l'avenir le lui dirait.
Elle quitta le bureau et regagna sa chambre pensive ; alors qu'elle rangeait ses notes dans un tiroir de sa commode, Julie entra dans sa chambre comme une tornade.
– Jane !
Surprise elle referma en vitesse son tiroir dans lequel elle coinça ses doigts. Elle étouffa un petit cri et n'eut le temps de souffler que Julie la prit par la main et l'entraîna sur son lit avec elle.
– Jane, nos robes arrivent demain matin juste avant notre soirée au théâtre ! Et la pièce que nous allons voir promet d'être fabuleuse ! continua-t-elle. Tu veux savoir de quoi il s'agit ? Bien sûr que tu veux, c'est une œuvre française de Molière me semble-t-il ? Peu importe, cela s'appelle L'amour médecin. C'est une histoire d'amour évidemment et je suis tellement fière que mère l'ait choisie pour nous.
– Une histoire d'amour, vraiment ? maugréa Jane visiblement peu emballée par cette idée. Et en français en plus ? Tu sais bien que j'ai des lacunes en ce qui concerne cette langue.
– Oh ! Jane fais un effort ! Si tu ne comprends rien au français tu ne peux t'en prendre qu'à toi-même. Tu n'avais qu'à assister aux cours comme moi ! Et puis une histoire d'amour en présence de beaux jeunes hommes, c'est tellement romantique ! Mère ne pouvait faire mieux.
– Ce n'est pas de ma faute si notre précepteur était inintéressant et peu intéressé par ce qu'il enseignait. Avec un peu plus de passion, j'aurai sans doute trouvé au fond de moi l'envie de participer à ses leçons. Force est de constater l'échec ! En présence de baux jeunes hommes ? Laisse-moi rire, ne me dit pas que tu parles des Carroll ?
VOUS LISEZ
Les Chroniques Infernales- Le réveil du Léviathan
Historical FictionAngleterre, Londres 1888. De nombreux meurtres étranges se succèdent dans les ruelles sombres de Whitechapel. Les victimes sont toutes des prostituées, assassinées puis mutilées dans une barbarie extrême. Les médias s'enflamment et surnomment l'assa...