212 ~ Ilashan

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Ilashan ne peut s'empêcher de gronder de douleur quand les crocs de Sylath percent la peau de sa gorge. Il se tend par réflexe, dans une réaction défensive face à cette pointe de douleur, mais les doigts frais du vampire retiennent les mouvements malencontreux de son corps.

Il a plus de mal à se détendre que l'autre fois. L'alcool l'avait aidé à passer outre, emportant son esprit dans les délicieux méandres de l'ivresse pour lui éviter de trop penser.

Sa respiration est aussi profonde que saccadée. Entouré par la présence du vampire, par le parfum de sa peau et de sa chevelure si près de son propre visage, il a dû mal à oublier la nervosité qui le ronge.

Jusqu'à ce qu'il entende le son rauque qui s'échappe de la gorge de Sylath.

Au-delà des sensations brutes et de son trouble qui persiste, Ilashan n'a aucun doute sur ce qui a provoqué cette réaction-là, et ça le fait réagir bien plus que tout le reste.

Donner du plaisir à quelqu'un ne laisse jamais indifférent. Et c'est assurément du plaisir que semble prendre le vampire, à cet instant.

Ilashan se mord la lèvre inférieure, sa main se resserrant par réflexe autour de celle de Sylath. Il ressent le besoin primaire de calmer le tumulte de ses pensées par des sensations plus physiques. Pour tenter de dompter le sentiment, pas inédit mais encore nouveau, d'être la source de nourriture d'un vampire.

Ce n'est déjà plus douloureux, et plus si déboussolant. L'acte semble si simple entre les bras de Sylath. Ses lèvres sont tièdes contre sa gorge sensible, ses doigts toujours frais contre sa peau, mais il pourrait presque les sentir se réchauffer à mesure que les battements dans sa poitrine font affluer le sang hors de ses veines.

Et puis la bouche se retire, un coup de langue le fait frissonner jusqu'à la racine de ses cheveux. Ilashan s'humecte les lèvres, réalisant à peine qu'il est en train de haleter. Il relâche le genou de Sylath avant de le broyer, et touche plutôt sa gorge, à l'endroit où il a été mordu, presque étonné de trouver sa peau intacte. Et de ne plus ressentir le baiser grisant du vampire.

— Ça va, dit-il après un instant d'hésitation.

Il lui semble être bien moins étourdi que l'autre fois. Il n'a pourtant pas l'impression que Sylath ait moins bu que ce soir-là. Les effets de la morsure se répandent également en lui, ou plutôt, il les remarque peu à peu à mesure que sa conscience s'élargit, et ne se limite plus seulement à la perception des lèvres pressées contre sa peau.

Le trouble persiste, mais aussi d'autres sensations qu'il n'essaye pas de nommer, de peur d'être pris au dépourvu. La chaleur dans son ventre n'est certainement pas due à la cheminée.

— Mais vous allez vous contenter de ça ?

Il tourne la tête vers Sylath pour chercher à croiser son regard, les sourcils froncés. Au point où il en est, il se soucie peu de la confusion que le vampire pourrait encore lire sur son visage.

— Vous pouvez boire plus. Je ne suis pas fait de verre. Et je ne suis pas non plus du genre à revenir sur ma parole.

Ilashan lui a demandé de ne pas trahir la confiance qu'il venait de lui accorder. Pas de le traiter comme si le moindre geste brusque allait le faire changer d'avis – ou le faire fuir à toute jambe hors de la chambre de son hôte pour se terrer dans les dortoirs avec les autres humains.

Même s'il lui est reconnaissant de chercher à le ménager, et de lui témoigner plus de considération que la plupart des personnes qu'il a croisé durant sa courte vie, Ilashan n'a pas non plus envie d'être traité comme un animal craintif que l'on approche avec prudence. Il sait qu'il aura sûrement d'autres réactions de rejets face à certaines attitudes du vampire. Il ne pourra passer outre de toute une vie passée à fuir les brimades et le danger.

Mais Sylath lui a fait une promesse, lui aussi. Celle de lui accorder une confiance réciproque. Et Ilashan ne voudrait pas être traité avec plus de prudence que nécessaire ; car cela signifierait que Sylath doute encore de lui et de sa volonté.

Il y a un large monde entre être la douceur excessive et les coups de nerfs de bœuf que le vampire lui a infligé. Ilashan ne désire aucun des deux, mais ce qui se trouve au milieu.

Parce que s'il est vraiment possible de vouer une confiance aveugle à quelqu'un, il a l'impression que c'est ici qu'elle repose, entre ces extrêmes.

Peut-être que Sylath ne l'a pas ménagé, et a bu suffisamment pour se rassasier ; mais son engagement est si récent, cette relation si nouvelle, qu'Ilashan ressent le besoin de s'en assurer dès l'instant.

L'astre et le Veilleur - Tome 1 (partie 2) : La forteresse de neigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant