261 ~ Sylath

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Sylath laisse au mercenaire le temps de se décider. Il sent sa tension au ton de sa voix et devine que cet endroit lui rappelle de mauvais souvenirs. Ils ne se connaissaient pas alors depuis longtemps et il ne pouvait pas savoir que le vampire ne l'aurait jamais laissé se noyer.

Il repère le tuyau et s'en approche à pas prudents dans l'eau chaude pour y découvrir deux grosses lianes entrelacées qui disparaissent dans les profondeurs. Elles devaient être toutes fines la dernière fois qu'ils sont venus, et elles ont échappé à la vigilance de Sylath. Mais ayant par la suite obtenu toute la place de s'enfouir dans le conduit — ce que ces lianes cherchent manifestement toujours à faire — elles avaient grossi à une vitesse prodigieuse.

Sylath songe que depuis les siècles qu'il se charge de cet entretien, il est forcé de constater qu'il y a une évolution notable dans l'accroissement des lianes : elles semblent de plus en plus nombreuses, ce qui devient bien gênant.

Il essaye de trancher d'un coup d'épée les lianes responsables de la baisse de pression mais doit s'y reprendre à plusieurs fois car elles sont si bien enroulées l'une autour de l'autre qu'elles se renforcent mutuellement. Au moment où il commence à trancher, elles se débattent comme deux serpents furieux et le vampire a besoin d'un certain temps et de beaucoup d'adresse pour finalement les rompre complètement. Une fois que c'est fait, il saisit les lianes coupées et entreprend d'extraire toute la longueur de la plante qui a progressé dans le conduit afin de le dégager véritablement

Par-dessus son épaule, il jette un coup d'œil à Ilashan qui est en proie à de nombreuses lianes mais semble concentré et gère cela avec calme et efficacité.

Sylath termine donc de remonter les deux lianes. Le mercenaire est une aide précieuse. Sa présence attire toutes les attaques potentielles et a laissé le champ libre au vampire. Il faudra le remercier comme il se doit, une fois qu'ils seront remontés, se dit Sylath.

Soudain la voix d'Ilashan lui parvient, faible, plus faible que sa détermination des derniers instants l'aurait laissé penser. Le vampire vient de terminer d'extraire les lianes du tuyau et se retourne vers l'humain, inquiet.

— Ne bouge pas, j'arrive, lui-dit assez fort pour qu'il l'entendre malgré les clapotis de l'eau.

Mais alors qu'il s'approche, Ilashan occupé à trancher plusieurs lianes avec une lenteur étrange essaye de se dégager de celles qui se sont enroulées autour de ses cuisses. Et dans un mouvement pour s'en dépêtrer, est entravé par l'une d'elle et tombe à la renverse.

Sylath rengaine son épée et court presque. A l'endroit où les lianes l'ont renversé, Ilashan a la tête hors de l'eau et ne risque pas de se noyer, mais les yeux du vampire voient dans les ténèbres et ce qu'il aperçoit l'effraie. L'eau sombre est pour lui aussi transparente que du cristal et elle lui révèle un réseau dense de lianes qui s'emparent de l'humain comme une dizaine de longs doigts avides.

— Tout va bien, je suis là, dit le vampire en atteignant Ilashan avant qu'il ne soit entraîné jusqu'à une zone plus profonde.

Il se laisse tomber dans l'eau juste au-dessus de lui, enroule ses bras autour de sa taille et tente de le sortir du lac. Les lianes résistent et de peur de blesser Ilashan, Sylath n'insiste pas. Il glisse alors ses mains entre le corps du mercenaire et un membre végétal enroulé autour de sa poitrine et tire sur la liane pour la faire céder. Mais avant de craquer, toutes les lianes enroulées autour de l'humain se resserrent sur leur proie, comprimant sa poitrine et ses membres.

Ilashan a le souffle coupé un instant, puis halète et le vampire arrête immédiatement de tirer. Il pousse un juron nordique exceptionnellement grossier. Il va devoir les trancher une par une. Le mercenaire a la peau brûlante, le regard un peu trouble et son cœur tambourine avec fougue.

— Je vais te libérer, promet Sylath d'une voix qui ne trahit aucune panique. Détends-toi pour qu'elles desserrent leur prise sur toi, je te tiens, elles ne peuvent pas t'emmener. On s'en débarrasse et on sort d'ici, tu m'as fourni le temps nécessaire à terminer ce que j'avais à faire, merci pour ton aide.

Accroché à la taille de l'humain, le vampire trouve une dague dont il s'empare, elle sera plus pratique que son épée dans ces circonstances. Il tranche net deux lianes assez fines enroulées autour de la poitrine et de la taille d'Ilashan, avant de découvrir avec horreur qu'il y en a d'autres qui se sont faufilées sournoisement sous sa tunique légère.

— Je sais que cette fois encore j'ai l'air d'avoir trouvé un prétexte pour te toucher, mais je te promets que ce n'est pas le cas, assure le vampire avec un sourire crispé. Ne bouge pas.

Il glisse sa lame entre la tunique et la gorge d'Ilashan et tire vers lui pour déchirer le col. Cela demande beaucoup de confiance mais il sait qu'Ilashan en a assez pour lui tendre sa gorge sans crainte, il l'a déjà fait.

Il déchire ensuite le tissu d'un seul geste et en dégage le mercenaire. Dès lors qu'elles sont exposées, les lianes deviennent faciles à trancher et le torse de l'humain se retrouve bientôt libre, lui permettant de respirer normalement.

Mais alors qu'il baisse les yeux sur les cuisses et les avant-bras du mercenaire, Sylath en découvre une bonne vingtaine, enroulées autour de son corps et cherchant le contact de sa peau sous le tissu de son pantalon. Ilashan n'est pas en danger, mais le dégager de cet enchevêtrement va prendre du temps et le vampire déteste le savoir à la merci de l'avidité de ces créatures et se fustige intérieurement pour son manque de prudence.

— Je vais faire aussi vite que possible, et après, je te promets que je ne t'emmène plus jamais ici, grogne Sylath entre ses dents serrées, en colère contre lui-même parce que son plan a bien mieux marché qu'il l'aurait cru, et que ce succès se révèle très déplaisant.

L'astre et le Veilleur - Tome 1 (partie 2) : La forteresse de neigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant