244 ~ Ilashan

2.2K 237 5
                                    

C'est plutôt amusant de découvrir que Sylath n'est pas du matin -ou plutôt, de l'après-midi. C'est du moins ce que Ilashan en conclu en voyant le vampire émerger du sommeil, et exprimer une multitude de chose à travers son attitude, sans pourtant autant décrocher la mâchoire. Comme s'il avait bien trop de mal à sortir du sommeil pour avoir la force de dire le moindre mot.

Il gronde brièvement quand Sylath l'enlace comme une chatte étreindrait son petit, mais ne fait aucun commentaire et se lève aussitôt après pour se préparer à son tour.

Ilashan aime se promener à cette heure dans les couloirs, quand les couleurs des vitraux illuminent la pierre grise. Cela lui rappelle son pays. L'odeur de la salle d'arme est encore plus plaisante, et il est plus que satisfait de pouvoir enfin manier une lame, même s'il ne s'agit que d'une épée d'entraînement.

Son estomac est vide, mais la faim ne le tenaille pas encore et il n'en est que plus léger. Il porte la bonne tenue, cette fois, et plus l'inconfortable tunique des novices qu'il avait sur le dos lorsque Sylath lui avait offert une nouvelle arme. Il est aussi en bien meilleure forme, reposé et pratiquement en paix avec lui-même. L'exercice physique l'aidera à tenir éloigné les pensées inconfortables qui le guettent encore.

Cela fait longtemps qu'il ne s'est pas senti aussi complet. C'est peut-être la première fois depuis son arrivée à la Forteresse.

S'il est un brin frustrant de ne pas pouvoir vraiment croiser le fer avec Sylath, Ilashan apprécie son choix des épées en bois, et n'aurait pas proposé autre chose pour commencer. Même si vampire contrôle sa force, Ilashan a vu suffisamment d'entraînement mal tourner pour savoir qu'il n'est pas à l'abri d'un coup accidentel. Avec une arme en bois, à moins qu'elle ne se brise, il ne risque rien de plus que quelques bleus.

Les os cassés se ressoudent. Les membres tranchés, eux, ne repoussent pas.

La puissance et la rapidité de son adversaire lui offrent un avantage indéniable, mais la force pure n'a jamais suffi à faire un bon épéiste. Sylath a sûrement été formé à l'escrime, même s'il n'a peut-être jamais pratiqué que dans la sécurité d'une salle d'arme, et pas dans la confusion brute d'un champ de bataille.

— Où est-ce que vous avez appris à vous battre ? demande-t-il à Sylath en se remettant en garde. Ici, avec les autres immortels ?

Ilashan ne retient pas sa propre force, à mesure que son propre corps se réchauffe et retrouve ses réflexes trop longtemps ménagés. Si le combat est perdu d'avance, il a le mérite de lui permettre de jeter toute son énergie dans l'affrontement. Il reste un peu de frustration dans son cœur, de la rage et de la hargne contenues, dont il n'avait pas vraiment conscience lui-même avant de pouvoir enfin les libérer.

Il n'a aucune raison de les brider encore.

Les passes échangées, d'abord incertaines, deviennent de plus en plus précises et affirmées. Ilashan n'a aucune envie qu'on le traite avec précaution, saisissant la moindre ouverture que lui laisse le vampire, et lui offrant autant d'occasion d'attaquer pour l'inciter à ne pas se retenir plus que nécessaire. Il encaisse en serrant les dents, comme s'il trouvait dans la douleur le même exécutoire que dans chaque assaut porté.

Dans un combat, la souffrance est son alliée. Tant qu'elle n'obscurcit pas ses autres sens, c'est elle qui le maintien vivant et qui le pousse à se dépasser. Alors il est presque ravi de pouvoir enfin la retrouver.

L'astre et le Veilleur - Tome 1 (partie 2) : La forteresse de neigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant