211 ~ Sylath

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Ilashan propose des contre arguments et formule ses doutes, qui restent les mêmes : la crainte d'être trahi, d'être surpassé par la force de l'immortel, et d'autres craintes plus sourdes, plus intimes, qu'il ne dit pas, mais qui restent en suspens entre eux. Le vampire se prépare à l'écouter dire qu'il ne peut pas lui faire confiance, que c'est au-dessus de ses forces...

Et alors qu'il s'y attend le moins, tout bascule. Ilashan soupire, ferme les yeux brièvement comme s'il ne croyait pas lui-même à ce qu'il était en train de faire, et se tourne pour lui présenter sa nuque. Après une imitation ratée de son habituel air menaçant, l'humain lui ordonne de boire sur le champ, et il n'échappe pas à Sylath qu'il a choisi volontairement de se placer dos à lui, dans une position où il ne peut pas se défendre et où il est obligé de lui faire confiance pour ne pas lui prendre trop de sang.

Il repousse son col, la chaîne de son médaillon et penche la tête pour lui offrir sa nuque. Sylath n'en revient pas. Ilashan le prend au dépourvu à chaque fois, et il peine à comprendre ses revirements intérieurs. D'ailleurs, le mercenaire aussi doit peiner à se comprendre, parce que son cœur s'affole, son souffle s'amplifie et ses épaules se tendent.

Le vampire se mord la lèvre. Ilashan est trop nerveux. Avec un autre humain, il aurait pris le temps d'être rassurant et doux, jusqu'à ce que le mortel se détende, mais Ilashan est celui qui décide de quand et comment les choses se produisent, et s'il ne saisit pas l'instant, il ne se reproduira plus jamais.

Alors, pour ne pas prolonger l'appréhension d'Ilashan, il pose rapidement une main sur son épaule ; plus il attendra pour le toucher, plus le jeune homme sera tendu.

Il glisse d'abord jusqu'à la zone de peau dénudée, et s'installe derrière lui plus confortablement. Il ouvre les jambes et en passe une de chaque côté du corps d'Ilashan, puis il prend ses poignets et les guides pour que le mercenaire pose les mains sur ses genoux comme sur des accoudoirs. Dans cette position, il sera un peu plus détendu.

Sa main retrouve sa place sur la nuque d'Ilashan et en quelques caresses, il trouve les zones où la peau est la plus fine et où la morsure lui fera le moins mal. Le meilleur endroit est dans le creux du cou, sous l'oreille. Il repère une veine qui pulse fort et approche son visage.

— Comme la dernière fois, Ila, lui rappelle-t-il. Seule la morsure est douloureuse, ce sera bon si tu te détends.

Le vampire écarté une mèche de cheveux et avertit l'humain.

— Je te mords à la prochaine expiration, souffle-t-il tout près de son oreille.

Sylath glisse ses doigts contre la gorge d'Ilashan, par mesure de sécurité, pour éviter qu'il se blesse s'il fait un geste brusque. Il noue son autre main aux doigts d'Ilashan dans un geste réconfortant. Puis lorsque le mercenaire souffle et que ses épaules se détendent très légèrement, l'immortel ouvre la bouche, presse ses crocs contre la veine et appuie très progressivement.

Il mord de plus en plus fort, jusqu'à sentir la peau céder, puis la chair, et enfin, la membrane de la veine qui résiste un peu. Le moment le plus désagréable est passé et il dégage délicatement ses crocs des deux petites plaies.

Il était tellement concentré sur la nervosité et les réactions d'Ilashan, sur son confort, qu'il en a oublié sa propre soif, le besoin qu'il avait de le sentir contre lui, le plaisir d'inspirer son odeur, de boire à sa veine.

Mais quand le sang envahit sa bouche au rythme des battements de cœur un peu saccadés, Sylath ferme les yeux, presque douloureusement et étouffe un grognement de plaisir. Il avait oublié que c'était aussi fort.

Le cœur d'Ilashan est puissant et son sang a un goût riche, étourdissant, le vampire doit lutter pour ne pas aspirer de grandes gorgées du nectar vermeil, pour le laisser venir à lui.

Il reste suspendu aux petites blessures, la sensation intime de ses lèvres sur la peau du mercenaire est affolante et il se fond tout entier dans cette sensation de soulagement.

L'immortel avale cinq gorgées, en prenant son temps, puis il mord sa propre langue et lèche consciencieusement les deux plaies qui se referment lentement au contact de son sang.

Il a pris très peu, mais il sent déjà les effets sur son corps, la chaleur qui monte, le sentiment de paix et de bien-être, la sensation de satiété qu'il éprouve si rarement...

— Merci Ila, souffle-t-il près de son oreille. Est-ce que ça va ?

L'astre et le Veilleur - Tome 1 (partie 2) : La forteresse de neigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant