L'astre et le Veilleur - Tome 1 (partie 2) : La forteresse de neige

214 ~ Ilashan

           

Ilashan est soulagé que le vampire ne prenne pas mal sa requête. Il n'aurait pas su comment réagir s'il l'avait encore ménagé, ou s'il s'était trompé sur ses intentions.

Ce qui ne l'empêche pas d'éprouver comme une étincelle de regret lorsqu'un bras possessif l'attire en arrière, pour le jucher sur les cuisses fermes de Sylath.

Il n'a que le temps d'un battement de cil pour comprendre ce qui l'attend, le regard écarquillé de surprise et le souffle suspendu. L'instant d'après, la bouche redoutable du vampire s'empare de la sienne, aussi gourmande que possessive.

Ilashan gronde de contrariété, se retenant de justesse de le mordre à son tour. Il pose les bras sur ses épaules pour prendre appui contre lui, sentant une main empressée froisser le bas de sa tunique.

Il l'affronte du regard lorsque le baiser s'arrête, le regardant saisir son bras pour l'attirer vers ses crocs, mais ne fait rien pour l'en empêcher. Sa respiration est restée captive des lèvres de Sylath.

Il exhale bruyamment quand sa chair est à nouveau percée.

Sa mâchoire se crispe un bref instant. Si elle est largement supportable, la douleur reste ce qu'elle est. Ilashan est surpris de voir le vampire écarter son visage, de distinguer pour la première fois les deux plaies laissées par ses crocs. C'est encore plus petit que ce qu'il imaginait. Mais lorsque le sang commence à perler et ruisseler le long de son bras, il en reste figé, oubliant de réfléchir.

Le spectacle est hypnotique. Et ce n'est rien comparé à l'instant où Sylath commence à boire, recueillant le liquide écarlate sur le creux de sa langue.

Ilashan doit se forcer à déglutir.

Quelques jours plus tôt, il en est certain, ce spectacle lui aurait donné froid dans le dos. Mais à cet instant précis, dans la chaleur des flammes, il se demande s'il a déjà assisté à quelque chose de plus érotique.

Sylath avale le sang qui dévale sa peau comme s'il s'agissait de la chose la plus délicieuse au monde. Ilashan est incapable de détacher les yeux de son visage, troublé par le plaisir qu'il exprime, par son regard de glace qui semblent soudain s'enflammer. Quand il referme les paupières, c'est comme si le vampire était submergé par l'extase. Et cette vision est loin de le laisser indifférent.

Ilashan s'humecte les lèvres, essayant de retrouver le contrôle de ses pensées. Il s'est laissé emporter par ce spectacle au point d'en oublier ses propres sensations, de la douleur jusqu'aux perceptions plus agréables.

Il fronce légèrement les sourcils face à l'avidité du vampire, tenté de grommeler un refus, juste par principe. Mais il n'a pas si mauvais caractère.

Il replace son bras sur l'épaule de Sylath, prenant le temps de se recaler sur lui avant de donner sa réponse. Son corps est puissant et souple contre le sien, ses propres cuisses emprisonnant ses jambes, leurs bassins bien trop proches. Maintenant qu'elle n'est plus autant associée qu'avant à un sentiment d'urgence et danger, cette proximité est loin de l'aider à garder son calme.

Peut-être que la douleur fera refluer ce désir qui menace de bouillonner en lui, qui frémit déjà dans le creux de ses reins, à l'endroit exact où Sylath a laissé sa main.

— D'accord, dit-il après un instant de silence.

Il remue très légèrement sur lui, un peu mal à l'aise malgré tout. Cette position est intime, et il n'a pas l'habitude de l'adopter avec quelqu'un qui lui est encore aussi peu familier. Pas dans ce sens-là, en tout cas.

— Mais n'en profitez pas non plus en me mordant à un endroit fantaisiste.

Il s'attend à tout de la part du vampire, commençant à discerner ce qu'il cache derrière son air autoritaire et son visage implacable. Une certaine malice, malgré la mélancholie qu'il affiche parfois. Une envie de contrer la tension et la mauvaise grâce d'Ilashan par la taquinerie et l'audace. Alors le mercenaire préfère prendre les devants, pour ne pas laisser la ruse de Sylath le prendre au dépourvu — presque certain que cette précision le fera rire.