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Le soleil s'est couché et Kemal amca est arrivé. Mes frères l'accueillent et le font entrer. En me voyant, il m'embrasse le front.

- Comment tu vas, ma fille ? Me demande-t-il.

- Bien, Kemal amca. Dis-je en souriant.

Je l'emmène alors dans le salon.

- Tu veux boire ou manger quelque chose ? Lui demandais-je.

- Non, ma fille. Viens t'asseoir. Me dit-il.

Je hoche la tête puis m'assois à côté de mes frères.

- Nihan, tu travailles toujours avec Adil ? Me demande-t-il.

Je hoche la tête. Il soupire alors. Adil hoca et Kemal amca ne se sont jamais aimés. La dernière fois qu'ils se sont vus remontent à très longtemps... Adil hoca tient Kemal amca responsable pour ceux que font mes frères, et Kemal amca a peur qu'Adil hoca m'éloigne de lui. Mais malgré leur différence, ces deux hommes sont comme mon père.

On discute un peu, puisque lorsque je vois mes frères se racler la gorge, je comprends très vite qu'ils vont parler de leurs affaires, alors je me lève.

- Nihan, reste là. Je dois te parler aussi. Me dit Kemal amca.

Je hoche la tête puis m'assois de nouveau.

- Pour que tu comprennes, tes frères sont en guerre depuis un certain temps avec un homme appelé Rüzgar. Rüzgar Aksoy. M'explique-t-il. Même si tes frères ne le veulent pas, je suis venu pour enterrer la hache de guerre. On a subi énormément de pertes humaines et matériels.

Je tourne ma tête vers mes frères. Ils n'osent pas s'opposer à Kemal amca.

- Il y aura une réunion, la semaine prochaine. Je vais te présenter à tout le monde. M'annonce-t-il. Pour la première fois, tout le monde verra la soeur des Kaya. Et de là, on discutera des solutions.

Je reste hésitante.

- Qu'est-ce que je vais faire à cette réunion ? Lui demandais-je. Je n'ai rien à voir avec vos affaires, moi...

- Tu verras. Me dit-il. Mais ne t'inquiète pas, tu n'auras rien à faire. Tu seras juste là, et tu nous écouteras.

Je soupire puis hoche la tête. Même si je refuse, il arrivera à me convaincre d'une manière ou d'une autre. A vrai dire, je suis curieuse de savoir ce qu'ils vont se dire. D'un coup, j'entends mon téléphone sonner.

- Je dois répondre, c'est peut-être important. Les prévenais-je.

Ils hochent la tête puis je m'éloigne d'eux et réponds.

- Allo ? Dis-je.

- Sors. Entendis-je.

Je fronce les sourcils.

- Sortir où ? Qui êtes-vous ? Lui demandais-je.

- Sors devant ta maison, tu verras. Me dit-il.

Puis il raccroche. Je reste troublée, qui est-il ? Que veut-il de moi ? Je prends mon arme discrètement, puis ma veste avant de sortir. On m'ouvre le portail, puis je sors devant la maison. Je regarde de droite à gauche, et ne trouve personne. J'allais rentrer à l'intérieur, mais je sens quelqu'un me tenir par le bras. Je me tourne et vois...

- Encore toi ? Dis-je.

C'est le patient de la dernière fois.

- On est passé du "vous" au "tu", ça progresse. Dit-il en souriant.

Je fronce les sourcils.

- Qu'est-ce que tu fais là ? Lui demandais-je. Et comment tu as trouvé ma maison ?

- Ce n'est pas compliqué de trouver la maison de Serhat et Eymen Kaya. Me dit-il en haussant ses épaules.

Je soupire.

- Pars de là, avant que je n'appelle mes frères. Lui dis-je.

- Tu ne sors plus ton arme, docteur ? Dit-il en riant. Bon, plus sérieusement, je voulais juste parler. Rien de bien méchant.

Je me tourne, sans rien lui dire, pour rentrer. Mais il m'attrape par le bras.

- T'enfuis pas, docteur. Je ne mange pas. Dit-il en souriant.

- Off ! Lâche moi, enfin ! Lui dis-je. Je vais appeler mes frères.

- D'accord, d'accord, c'est bon. Me dit-il.

Je me dirige enfin à l'intérieur de chez moi, mais en même temps, j'entends un petit cri. Je me tourne et le vois sur le sol, se tenant sa jambe. J'allais lui tourner le dos, mais je finis par le rejoindre.

- Tu vas bien ? Lui demandais-je. Tu t'es fais mal à ta jambe ?

Il lève son regard vers moi, puis me tire par le bras. Je tombe alors au sol, face à lui, qui éclate de rire. Je le frappe alors sur son épaule.

- T'es un gamin ! Lui dis-je.

Je me lève ensuite, et cette fois, je lui tourne le dos pour de bon.

- Bonne nuit, princesse. Me crie-t-il.

Je me mets à marcher en lâchant un petit sourire. J'efface mon sourire dès que j'arrive à l'intérieur de la maison.

- Kemal amca est monté dormir ? Demandais-je à mon frère Serhat.

Il hoche la tête, alors je m'assois à côté de lui, puis pose ma tête sur mes jambes.

- Caresse mes cheveux, abi. Lui dis-je doucement.

Aussitôt que je lui ai demandé, il s'exécute. Je ferme les yeux, tout en sentant ses mains caresser mes cheveux. Il se baisse et m'embrasse la tête, avant de continuer.

- Abim. (Mon frère). Dis-je doucement. Qu'est-ce que je ferais dans cette vie sans vous ?

- Ben sana kurban olurum. (je serais ton sacrifice, dans le sens de "je t'aime beaucoup"). Me dit-il doucement. Et qu'est-ce qu'on ferait dans cette vie sans toi ?

Je fais un petit sourire.

- Est-ce que je mérite ton amour, ma soeur ? Me dit-il faiblement. Tu ne le dis pas, mais je sais que tu nous en veux de ne pas quitter notre monde. Je sais que tu as honte de nous avoir comme frère...

Je me relève d'un coup.

- Ne dis pas ça... Jamais je n'aurais honte de vous avoir, abi ! Tu ne peux pas imaginer à quelle point je vous aime. Dis-je. Oui, je n'aime pas ce que vous faites, mais tu sais pourquoi ?

Il hoche sa tête lentement.

- Parce que je vis dans l'inquiétude, abi. Chaque matin, je me demande si je vous reverrais le soir. Chaque fois que vous rentrez très tard, ou que vous ne répondez pas à mes appels, je prie pour que rien ne vous soit arrivés. Dis-je tristement. Parce que j'ai peur de vous perdre...

Il me regarde longuement, puis me serre contre lui.

- On ne te laissera jamais seule, Nihan. Me chuchote-t-il. Je ne partirais pas et ne te laisserais pas, ma soeur. Jamais.

Je lui souris faiblement. Quoi qu'il dise, cette inquiètude restera en moi. Je dois continuer à vivre avec, comme je l'ai fais toutes ces années. Mais quand je pensais pouvoir m'habituer, cette peur ne faisait que de grandir. Enfin, je finis par reposer ma tête sur les jambes de mon frère et dormir dans ses bras.

Le silence d'une âmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant