Deux mois sont passés depuis la naissance de mes enfants. Six mois depuis la mort de Serhat et Meryem. Dire que je vais mieux, ce serait mentir. Le fait qu'Eymen ressemble trait pour trait à Serhat ne m'aide pas vraiment, mais d'un autre côté, ça me réconforte de voir l'image de mon frère vivant...
Je descends dans le salon où j'entends des voix. J'entends Rüzgar, Eymen et une autre voix inconnue. Je fronce les sourcils, tout en m'avançant. Il y a un homme que je n'avais jamais vu auparavant.
- Rüzgar ? Dis-je, et toutes les têtes se tournent vers moi.
Rüzgar se lève puis se met à mes côtés, ensuite il pose sa main sur mon dos.
- Caleb, je te présente ma femme, Nihan. Lui dit-il.
- Enchanté, Nihan. Me dit l'homme.
Je hoche la tête en faisant un petit sourire.
- Caleb Al-Hassan, c'est un ancien ami. M'informe Eymen. Il connaissait Serhat...
- Toute mes condoléances. Nous dit-il. Je devais venir plus tôt, mais j'ai eu quelques problèmes...
Je baisse la tête. Il y a toujours quelque chose qui me rappelle que mon frère n'est plus là.
- Je vais vous préparer du thé. Leur dis-je avant de m'éclipser dans la cuisine.
Je prends un grand souffle, puis prépare le thé en essayant de ne penser à rien d'autre. Une fois finis, j'allais entrer dans le salon mais leur discussion m'arrête.
- J'ai fais mes recherches comme vous me l'avez demandés. Dit Caleb. Cet homme n'était pas l'ennemi de tes parents, Eymen...
Mon cœur se met à battre rapidement. Il parle de l'homme qui a assassiné mon frère. Je le sais.
- Il travaille pour tes parents. Annonce-t-il.
Le choc. Je recule et me colle contre le mur, en mettant ma main sur ma bouche.
- Ce n'est pas logique ! Rétorque Eymen. Ils aimaient Serhat plus que nous ! Pourquoi ils auraient voulu le tuer ?
- ... Cet homme devait tuer Nihan. Dit Caleb en soupirant. Serhat a tenté de l'arrêter, mais...
Je n'ai pas eu à écouter la suite pour comprendre. Serhat est mort pour moi. Serhat est mort à cause de mes parents. Serhat est mort à ma place. Les larmes se mettent à couler.
- Nihan hanim... Entendis-je.
Je relève la tête. C'est un de nos hommes.
- Vous m'avez demandés de vous prévenir lorsque vos... parents viennent ici. Me dit-il. L'homme est ici. Que dois-je faire ?
Prise par un excès de rage, je prends un couteau du tiroir et sors de la maison en furie.
- Ouvrez la porte ! Criais-je.
Les hommes se regardent avant de l'ouvrir. Je vois, en face de moi, l'homme qui m'a pris mon frère. Cet homme qui voulait prendre ma vie. Je tiens le couteau fortement, comme si ma vie en dépendait.
- Nihan, ma fille... Dit-il doucement.
Je fais un sourire crispé face à ses mots. "Ma fille" ? Ma main tremble. Je n'en peux plus de le voir vivant. Serhat est mort, pourquoi lui, peut-il vivre ? Je m'approche de lui en courant puis plante le couteau dans sa chair. Il crit de douleur, mais ça ne m'empêche de répéter l'action jusqu'à ce qu'il s'écroule au sol.
- J'espère que tu périras en enfer. Dis-je la voix tremblante de rage.
Je me relève et regarde son corps gisant au sol. Les larmes me montent aux yeux. J'ai fais ce que j'ai cru ne jamais pouvoir faire. J'ai tué mon père. Je marche lentement jusqu'à l'intérieur de la maison, le sang coulant du couteau que j'ai en main. Les larmes ne s'arrêtent pas. Elles coulent jusqu'à me brouiller la vue.
J'ouvre la porte et rentre à l'intérieur. Rüzgar, Eymen et Caleb me regardent avec incompréhension. Leurs yeux se baissent sur le couteau et ma main recouverte de sang.
- Nihan ? Qu'est-ce que t'as fais ? Me demande Rüzgar, inquiet.
Eymen s'approche de moi puis me fais asseoir. Je me laisse faire, sans rien dire.
- Nihan... me dit Eymen d'une voix douce.
Je ferme les yeux. Mon Seigneur... qu'est-ce que j'ai fais ? Je lâche le couteau qui tombe au sol. Qu'est-ce que j'ai fais ?
- Je pense que vous devriez voir à l'extérieur. Leur dit Caleb.
Rüzgar et Eymen se regardent avec incompréhension puis ils sortent à l'extérieur en courant. Caleb s'approche de moi et se baisse à ma hauteur.
- Tu nous as entendu, n'est-ce pas ? Me dit-il en grimaçant.
Je hoche la tête difficilement.
- Alors ne regrette pas. S'il t'avait tué, il n'aurait pas regretté. Me dit-il. Crois moi, Serhat aurait fait la même chose à ta place.
Je le sais. Je sais tout ça. Mais ce qu'il ne comprend pas, c'est que je m'en veux de me sentir bien. Comment puis-je me sentir bien quand le sang de mon géniteur est sur mes mains ?
- La personne que tu as tué n'était pas ton père. D'accord ? Il ne l'a jamais été. Tu as quoi ? Vingt-six ans ? Et est-ce qu'il est resté à tes côtés durant ces vingt-six ans ? Me dit-il. Non. Il t'a renié. Il n'a jamais été ton père. La personne que tu as tué est le meurtrier de ton frère. Et qu'est-ce qu'on dit ?
Je baisse la tête, les larmes aux yeux.
- Œil pour œil, dent pour dent, vie pour vie. Me dit-il fermement.
- Pourquoi je me sens bien, Caleb ? Dis-je faiblement. Je ne peux pas me sentir bien d'avoir pris la vie de quelqu'un !
- Parce que tu as vengé Serhat ! Me répond-il. La seule chose que tu dois garder en tête est que Serhat a été vengé. Tu l'as vengé. Et il n'y a rien d'autre de plus important. D'accord ?
Je hoche la tête. Ses paroles m'ont rassurés.
- Merci... Dis-je d'une voix faible.
- Tu m'as été confié par Serhat, petite. Me dit-il en souriant. Quand tu as besoin, je suis là. Je serais toujours là pour la sœur de Serhat.
Je hoche la tête en guise de remerciement. D'un coup, la porte s'ouvre en grand puis Rüzgar et Eymen entrent. Ils ont dû voir le corps de cet homme. Ils s'approchent de moi puis me prennent dans leur bras.
- Notre frère a été vengé, Eymen. Dis-je doucement. Abim a été vengé... Mon seul vrai père a été vengé... Son cœur l'a vengé.
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Le silence d'une âme
Novela JuvenilNihan, une jeune femme à l'âme innocente se retrouve dans un monde sombre où seul l'adversité règne. Elle deviendra, malgré elle, la source d'une nouvelle guerre. Lui, il baigne dans ce monde depuis toujours. Mais que se passera-t-il lorsque deux êt...