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Une semaine et demi restant. Dix jours. 240 heures. 14400 minutes. Voilà le compte avant le jour-J. Étonnement, je ne suis pas stressée. Je ne sais pas, j'ai l'impression que ce que je vis n'est pas réel. Que je suis dans un rêve, et que je vais bientôt me réveiller. Peut-être est-ce l'espoir que Rüzgar revienne qui me trompe ?

- Nihan, la robe est prête. Me dit Eylem. Tu ne vas pas aller l'essayer une dernière fois ?

Je secoue ma tête.

- Je ne veux même pas la voir, Eylem. Dis-je doucement.

- À ce point ? Dit-elle.

- Oui, à ce point. Dis-je, d'un ton colérique. J'étais censée porter cette robe pour Rüzgar et personne d'autre !

Elle soupire puis s'assoit.

- Mais il ne se rappelle pas de toi, ma chérie. Tu ne vas pas rester seule toute ta vie pour lui... me dit-elle. Écoute, je ne veux pas te faire de mal mais Rüzgar peut ne jamais retrouver sa mémoire... Il peut tomber amoureux et refaire sa vie. Et toi...

Je me bouche les oreilles avant qu'elle ne finisse sa phrase.

- Je ne veux pas l'entendre ! Dis-je, les larmes aux yeux. Rüzgar ne peut pas aimer une autre femme !

Elle me regarde tristement. Je sais qu'elle a raison. Le fait de savoir qu'on a eu une histoire ne l'empêchera pas d'aimer quelqu'un d'autre... mais je ne veux pas qu'il aime quelqu'un d'autre. C'est peut-être égoïste mais j'en deviendrais folle !

- D'accord Nihan, fais ce que tu veux mais j'espère que tu ne seras pas celle qui souffrira, dans cette histoire... Dit-elle en soupirant.

Je suis déjà celle qui souffre dans cette histoire ! Je suis celle qui a perdue mon bien-aimé, je suis celle qui se mariera avec un homme qu'elle n'aime pas et qu'elle n'aimera pas.

- Nihan ! Entendis-je.

Je descends dans le salon, où m'appelle mes frères.

- On doit y aller, le patron nous a appelé et il te veut avec nous. Me dit Eymen.

Ça me paraît étrange mais je hoche la tête. Je prends ma veste et les suis jusqu'à la voiture. Serhat démarre et va vers l'endroit où se tient la grande majorité de nos réunions. Une fois arrivé, nous allons dans cette salle. Lorsque je vois plusieurs hommes, mes yeux cherchent instinctivement Rüzgar. Lorsque mes yeux rencontrent les siens, je remarque qu'il me regardait. Je baisse directement les yeux.

Je m'assois auprès de mes frères, en sentant un regard sur moi. Je sais que c'est lui mais j'évite de le regarder à mon tour... Bref, lorsque le grand patron entre dans la salle, tout le monde se tait.

- Il y a quelques semaines de cela, Serhat et Eymen Kaya ont annoncés leur décision de ne plus travailler avec nous. Dit-il. Est-ce toujours d'actualité ?

- C'est toujours d'actualité. Lui affirme Serhat.

Le patron fait alors un signe de main. Deux hommes font entrer Kemal.

- Je ne peux pas risquer de perdre mes deux plus grands hommes. Dit-il. Kemal sera un sacrifice pour le bien de notre communauté.

Je fais les gros yeux. Non... lorsque je vois un des deux hommes donner l'arme au patron, mon coeur se met à battre rapidement.

- Patron, cette femme n'a pas à voir ça ! Lui dit Rüzgar. Laissez la sortir.

- Ses frères se sont retournés contre mon homme à cause d'elle. Dit-il en me regardant. C'est ce qui arrive quand une femme se mêle de nos affaires. Elle restera et verra la conséquences de ses actes.

La peur s'empare de moi. Je ne veux pas voir ça !

- Elle n'a rien fait de mal ! Rétorque Serhat. Cette affaire était par rapport à notre vie privée. Laissez ma soeur sortir.

- Elle ne s'est jamais mêlée de nos affaires. Dit Rüzgar en me regardant. C'est nous qui l'avons mêlé à nos affaires, elle ne voulait pas. Patron, je-

- J'ai dis qu'elle va le regarder mourir. Dit-il d'un ton sec. Et celui qui s'oppose à ma décision, qu'il vienne face à moi, que je l'exécute face à elle aussi.

Je tiens le bras de mon frère pour qu'il ne se lève pas. Mon corps entier tremble. Bien que je déteste Kemal, je ne veux pas le voir mourir. Puisqu'ils n'ont pas d'autres choix, mes frères me tiennent près d'eux. Les larmes me montent aux yeux lorsque je vois le patron lever son arme sur le front de Kemal. Je ferme fortement les yeux.

- Ouvre les yeux, sinon je tirerais sur Rüzgar ! Crie le grand patron.

Je tourne mon regard vers Rüzgar. Il me lançait un regard désolé. Je regarde alors en direction du Patron, en griffant mes jambes avec mes doigts. Kemal ferme les yeux, puis le patron tire. Au même moment où je vois le sang éclabousser, je crie en pleurant. Je me cache le visage contre le torse de Serhat.

- Maintenant, faites la sortir. Dit le patron. Je ne veux pas supporter des pleurs.

Serhat se lève et m'accompagne jusqu'à l'extérieur. Il me couvre les yeux avec sa main pour que je ne vois pas le corps de Kemal. À ce moment, je ne sais pas comment réagir... mon corps est comme gelé. L'image de Kemal tourne dans ma tête. Il est mort à cause de moi. Tout est de ma faute. A cause de moi...

- Calme toi, mon coeur... me chuchote Serhat.

- Il... Il est mort à cause de moi, abi ! Dis-je en pleurant. Il lui a tiré dessus et...

Je ne pouvais plus continuer, les mots ne sortent pas. J'ai déjà tué et vu des hommes mourir, mais il y avait une raison. C'était soit leur vie, soit la mienne et ceux que j'aime. Mais là, c'est différent... je le considérais comme un père, autrefois. Même s'il m'a fait beaucoup de mal, il ne méritait pas de mourir. Il est mort à cause de moi, et ça, je ne peux pas y passer outre...

- Si ce n'était pas le "patron", je l'aurais tué pour ce qu'il a fait ! Dit Serhat en colère. Mais il va le payer. Je ne resterais pas sans rien faire.

- Ne fais rien, abi. Cet homme est cruel... il te fera la même chose. Dis-je les larmes aux yeux.

Au lieu de me répondre, il se contente de me prendre dans ses bras.

- A cause de vous ! Entendis-je. Mon père est mort à cause de vous !

Ces mots me sont adressés. Je relève la tête et fais les gros yeux en la voyant... Aylin.

Le silence d'une âmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant