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Je finis par rentrer chez moi. Sans attendre, je monte dans ma chambre. Je prends une cigarette pour fumer dans le balcon, en regardant le ciel.

- Rüzgar ? Entendis-je.

Je me tourne et vois Enes.

- Tu as parlé avec Nihan ? Me demande-t-il.

Je tourne ma tête vers le ciel, puis hoche la tête.

- On s'est parlé, et je me suis ouvert à elle. Dis-je, doucement.

- Tu lui as parlé de... Commence-t-il.

- Non. Le coupais-je. Elle le saura que quand j'aurais pris ma vengeance. Je lui ai parlé de mes parents. Je lui ai avoué que j'ai tué mon père.

Il me regarde, surpris.

- Tu lui fais confiance ? Me demande-t-il.

- Je ne fais confiance à personne. Lui dis-je. Et encore moins à la famille Kaya.

Il hausse des épaules.

- Normalement, tu ne t'ouvres qu'aux personnes auxquelles tu fais confiances. Me dit-il.

Je ne réponds rien, puis jette ma cigarette. Sûrement. Mais elle était là au moment où j'étais le plus faible. Je ne me suis pas contrôlé.

- Qu'est-ce qu'elle t'a dit ? Me demande-t-il.

Elle me prend dans ses bras. Je reste figé, surpris par son geste. Je finis par me lever directement.

- Où vas-tu ? Me demande-t-elle.

- ...Tu n'es pas dégoûté par un homme qui a tué son propre père ? Lui demandais-je.

Elle secoue sa tête.

- Tu n'aurais pas dû le tuer, mais je ne peux pas te blâmer. Me dit-elle. N'importe qui deviendrait fou en voyant son père prendre la vie de sa mère.

Je hoche la tête en faisant un faible sourire.

- ... Rien. Lui dis-je. Je suis partis directement après.

Il me regarde comme pour me dire qu'il ne me croit pas, mais il ne rétorque rien. Nihan ne doit ressentir que de la pitié envers moi, elle doit me voir comme un homme faible alors que j'essayais de paraître fort.

Si elle ressent de la pitié pour cette petite partie de mon passé, que ressentira-t-elle si elle connait le reste ? Elle ne me croira pas. Et puis, je pense que ce sera la dernière chose à laquelle elle pensera. Elle comprendra seulement qu'elle a été la victime d'une vengeance. Qu'elle aura payée pour l'erreur de son frère.

Je ne sais pas comment cette histoire se finira pour elle, mais pour moi, je le sais. Je prendrais ma vengeance, et je m'en irais de cette ville, de ce pays. Je recommencerais ma vie de zéro. Cette vengeance me permettra de revivre de nouveau. Un nouveau Rüzgar naitra. Et de cette manière, je ne souffrirais pas de ma conscience.

NIHAN

Je retourne enfin chez moi après cette nuit mouvementée. En rentrant à l'intérieur, je vois Ryad avec mes frères. Je les salue puis sors dans le jardin, ils doivent être en train de parler d'affaires. Alors que j'allais à peine m'asseoir, je vois Inaya. Elle s'approche de moi.

- Nihan, comment tu vas ? Me demande-t-elle.

- Bien, et toi ? Lui demandais-je en souriant.

- Bien. Me dit-elle.

Puis elle s'assoit à côté de moi.

- Mon frère m'a raconté ce qui t'est arrivé en Italie, et j'ai décidée de venir te voir. M'explique-t-elle.

Je hoche la tête.

- Il ne s'est rien passé de grave. Lui assurais-je. J'ai juste dû vivre avec l'ennemi de mes frères.

- Il ne t'a rien fait, pas vrai ? Me demande-t-elle.

Je secoue la tête.

- Rüzgar ne me fera rien. Lui dis-je.

- ... Comment tu peux en être sûr ? Demande-t-elle.

Je hausse des épaules. Je ne sais pas. J'ai l'impression qu'il ne me fera jamais de mal... Mais qu'est-ce que je raconte ? Il m'a fait passer pour morte, devant mes frères !

- ... Bref, comment se passe ta grossesse ? Lui demandais-je.

Elle me regarde pour me dire qu'elle a compris que j'ai fais exprès de changer de sujet.

- Bien, al hamdulilLah. Dit-elle en souriant. Il ne reste plus que quatre mois avant la naissance de notre enfant, in shaa Allah. Mon mari n'attend plus que ça.

Je me mets à rire. Ce moment doit être tellement incroyable... On se met ensuite à discuter de tout et de rien, jusqu'au moment où elle doit partir.

- Nihan, viens chez nous. Me dit-elle. Comme ça, on pourra discuter et se boire un café ensemble.

Je hoche la tête puis je lui fais la bise.

- Et, si j'ai un conseil à te donner... écoute ton coeur. Me conseille-t-elle. Ne fuis pas. Ecoute le.

Je vois ce qu'elle cherche à me faire comprendre. Mais il n'y a rien... Je ne peux pas, c'est impensable. Je vais écouter ma raison, plutôt que mon coeur. Parce que mon coeur me fera couler.

Après qu'elle soit partie, je monte dans ma chambre pour me reposer. Je n'ai pas dormis de la nuit, et je sens que je vais m'évanouir à cause de la fatigue. Je ferme la porte de ma chambre, puis m'endors sur mon lit avant de sombrer dans un sommeil profond.

Mes yeux s'ouvrent lentement dans un endroit inconnu. Je ne vois rien à cause de la fumée. Je m'avance, sans rien voir.

- Serhat ? Eymen ? Criais-je. Quelqu'un est là ?

Je continue à m'avancer, jusqu'à arriver à un champ. Un champ en ruine. Je vois au loin deux silhouettes. Je cours vers eux, mais remarque qu'ils ont tous les deux des armes.

- Qu'est-ce que vous faites ? Leur dis-je.

Ils tournent leurs têtes vers moi.

- Rüzgar ? Serhat abi ? Dis-je doucement.

Je m'approche d'eux de plus en plus. Aucun d'entre eux ne parlent.

- Rüzgar, abi, baissez vos armes. Leur dis-je.

Et aucun d'eux ne m'écoutent. Ils se regardent, puis se préparer à tirer. Mon grand frère reçoit un coup invisible, et son arme s'envole loin de lui, ça n'empêche pas Rüzgar de viser mon frère.

- Non, Rüzgar... Dis-je faiblement. Ne le fais pas !

Mon regard voyage entre lui et mon frère. Il tient fermement son arme, il va tirer. Je me mets alors à courir vers mon frère, quand il tire. Je sens quelque chose rentrer dans ma chair.

- Nihan ! Crient-ils.

Je lève le regard vers le ciel.

- Je te l'ai dis... Je donnerais ma vie pour mes frères. Chuchotais-je. Je serais face à toi... quand tu seras contre eux.

Le silence d'une âmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant