Le train filait à travers les paysages pittoresques qui défilaient tels des tableaux animés, ponctuées par des champs verdoyants parsemés de fleurs chamarrées. C'est après un périple de trois heures qu'il franchit enfin le seuil de la gare Saint-Lazarre, abandonnant cet environnement bucolique pour se fondre dans le tourbillon effervescent de la vie citadine.
— Allons les filles du nerf, nous arrivons d'un instant à l'autre, somma Madame Ausbourg en leur tapotant chacune l'épaule pour les réveiller.
Il leur fallut l'espace de deux minutes pour s'étirer avec délice et frotter leurs yeux engourdis, afin de se défaire pleinement de l'emprise de leurs songes avant de laisser place à l'allégresse en prévision de leur débarquement imminent. Lorsque la locomotive finalement s'arrêta, elles se pressèrent aux portes du wagon pour descendre.
— Grand Dieu, je ne me souvenais pas d'une architecture aussi grandiose. Il semblerait que notre Président eût entrepris des travaux de rénovations dans la capitale, s'étonna la matriarche.
Les vastes voûtes de la structure s'élevaient majestueusement, soutenues par d'imposantes colonnes. Les rayons du soleil qui traversaient les impérieux vitraux baignait l'espace d'une lumière tamisée lui octroyant une aura chaleureuse et solennelle.
Les voyageurs vêtus de leurs parures les plus distinguées se pressaient avec une aisance raffinée, tandis que les domestiques attentifs s'activaient pour satisfaire leurs moindres besoins. Le hall central, spacieux et aéré, respirait une atmosphère de vivacité et d'excitation mêlée à une ambiance feutrée de respect et de courtoisie.
Les lignes de quais s'étendaient en un ordre académique, offrant un spectacle fascinant de locomotives étincelantes, prêtes à s'élancer vers des horizons lointains. Les voies, impeccablement entretenues s'étiraient à perte de vue, promettant des voyages audacieux vers des contrées inexplorées.
Les boutiques luxueuses, alignées dans une symétrie parfaite, exhibaient leurs marchandises avec une élégance sans pareille. Les commerçants, vêtus avec distinction, dévoilaient leurs trésors aux yeux des passagers aisés en quête de raffinement. Cette scène semblait hors du temps, à la manière d'un tableau qui s'animerait soudainement.Madame Ausbourg pressa un porteur de la débarrasser de leurs bagages tandis qu'elle s'élançait à l'extérieur de la gare pour chercher un attelage, suivit de près par ses filles. Il ne lui fallut pas plus de quelques secondes pour se voir proposer par un cocher de la mener où bon lui semble. Un simple coup d'œil sur cette femme élégamment vêtue à la noble démarche pouvait certifier à n'importe quel voiturier un bon paiement pour un bon service.
— Bien ! Je vais m'occuper d'aller déposer nos coffres à l'hôtel du Louvre et de nous réserver une suite. Dans cette attente, rendez-vous à la maison Félix afin d'y acquérir vos somptueuses parures, je vous y rejoindrai sans délai. Elle se situe sur la rue de la Chaussée-d'Antin. Surtout n'oubliez pas vos ombrelles ! Élisabeth, je compte sur toi pour veiller sur tes sœurs, Esther, ne t'éloigne sous aucun prétexte d'elles. Je vous fais confiance, à plus tard.
Sur ce, la matriarche embarqua dans la voiture en leur accordant un bref signe de la main.
— Allez, pressons-nous, s'exclama Élinor, devrions-nous nous balader bras-dessus bras-dessous pour s'assurer de ne pas nous égarer ?
— Je ne crois pas. Regardez autour de vous, les démonstrations d'affection publiques sont proscrites il semblerait, leur fit remarquer l'aînée en balayant avec attention les rues aux alentours. Qu'il soit question du peuple ou de la bourgeoisie, tous conservaient une distance raisonnable entre eux et se préservaient de tout contact physique.
— En pareille occurrence, ne nous séparons point des regards, préconisa la cadette à ses deux sœurs benjamines.
— Je t'en prie, nous ne sommes pas sottes au point de nous égarer, répliqua Evalyn en déployant son ombrelle pour l'appuyer gracieusement sur son épaule, dans un soupir empreint d'exacerbation.
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Élinor
Ficción históricaProvins, 1850. Héritière d'une puissante famille bancaire parisienne, Élinor Ausbourg se délecte de la quiétude de sa campagne natale, loin des agitations tumultueuses de la Ville Lumière. Telle une âme solitaire, elle trouve refuge dans la nature e...