Le retour à Paris fut promptement orchestré, et le couple en devenir s'engagea dans l'élaboration des festivités du mariage. Cependant, cette tâche incombait principalement à Élinor. Aron, peu concerné et intéressé par les fastes, lui indiqua seulement la liste des personnes qu'il souhaitait inviter. Le soin de la mise en place du banquet, de l'ornementation, de la cérémonie et de tout ce qui s'ensuivait fut légué entièrement à sa future épouse qui s'en réjouit. Être ainsi occupée la galvanisait, l'arrachant aux pensées qui l'accablaient ou l'égaraient, telles que sa mère, son père, le mal du pays et bien d'autres choses encore.
Elle se pointa à son appartement parisien en compagnie de Victor un vendredi soir, désireuse de surprendre ses sœurs le soir du Shabbat. Lorsqu'elle frappa à la porte, ce furent les deux jumelles à la chevelure flamboyante qui vinrent lui ouvrir.
— Mademoiselle Ausbourg, s'étonna Rose.
— Soyez la bienvenue Mademoiselle. Veuillez nous excuser, nous n'avons pas été mises au courant de votre arrivée, l'accueillit Éloïse.
— Cela ne saurait vous être reproché, car il s'agissait d'une surprise. Ainsi vous n'avez pas démissionné, même après tout ce temps, notifia-t-elle, à peine étonnée.
— Vous aviez promis que vous nous rétribueriez pour notre travail. Nous avions eu vent que vos affaires reprenaient brillamment leur essor. Nous étions persuadées que tôt ou tard, vous vous acquitteriez de votre dette, assura l'une des jumelles avec aplomb.
— Quelle certitude.
Tandis qu'elles se dévouaient à délester Élinor de son manteau, celle-ci, d'un geste empreint de grâce, extrayait de l'une des poches de son vêtement une somptueuse liasse de billets, qu'elle leur présenta, le sourire aux lèvres. Avec une délicatesse exquise, la jeune domestique les accueillit dans ses mains, tandis que sa sœur s'empressait de se pencher au-dessus de son épaule, éblouie par la somme colossale que la demoiselle leur offrait, une fierté à peine voilée perçant son regard.
— Mademoiselle, nous...
— Nous n'en espérions pas autant, s'écria Rose.
— J'ai ajouté un modeste supplément, car votre patience et votre fidélité méritent bien rétribution.
— Merci infiniment Mademoiselle Ausbourg, s'exclamèrent les jumelles à l'unisson.
— Je vous en prie. Si, dans l'avenir, vous caressez l'ambition d'établir votre propre maison de couture, sachez que ma banque demeure à votre disposition pour octroyer les fonds nécessaires à votre essor, tandis que les journaux placés sous ma tutelle se feront l'écho de vos talents, vous assurant ainsi une publicité des plus favorables. Si d'aventure je devais devenir le principal actionnaire de votre entreprise, nul doute que mon investissement serait fructueux. Les bonnes domestiques se recrutent aisément, mais les excellents artisans, voilà qui est plus ardu. Toutefois, il serait indécent de discuter de ces affaires importantes sur le perron un soir de Shabbat.
— Bien sûr ! Veuillez me suivre jusqu'au salon, ma sœur va aller informer Mesdemoiselles Ausbourg de votre arrivée. Je crois que Mademoiselle Esther s'occupe de la comptabilité et que Mademoiselle Evalyn...
— S'exerce au violon. C'est agréable de constater qu'après tout ce temps, certaines choses ne changent pas et ne changeront jamais...
— Excusez-moi, Mademoiselle, s'enquit Éloïse avec une délicatesse empreinte d'une curiosité polie, je me suis interrogée depuis le moment de votre arrivée, sur l'identité du jeune homme qui vous accompagne
Elle s'avança légèrement, inclinant son buste vers lui, lequel, embarrassé par tant d'attention, se sentit rougir avant de redresser fièrement la posture.
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Élinor
Historical FictionProvins, 1850. Héritière d'une puissante famille bancaire parisienne, Élinor Ausbourg se délecte de la quiétude de sa campagne natale, loin des agitations tumultueuses de la Ville Lumière. Telle une âme solitaire, elle trouve refuge dans la nature e...